Santé mentale. S'investir et agir
La pandémie a rendu plus visibles les besoins des personnes en souffrance psychique et les communes ont démontré leur implication. Des outils existent pour mieux les accompagner au quotidien.

Le dernier baromètre 2021 de l’association indique que seuls 19 % des 15 000 adhérents ont accès à l’emploi. L’accès au logement n’est guère plus facile : 33 % vivent dans leur famille faute d’accès à un logement accompagné. C’est pourquoi la présidente attire notamment l’attention des élus sur le soutien qu’ils peuvent apporter à la création et à l’animation de groupes d’entraide mutuel, les GEM. Comme celui d’Arnouville (95).
Ces GEM regroupent en journée des personnes souffrant de troubles psychiques. «La maladie mentale fait que c’est difficile de vivre seul. Le GEM nous donne de la force. On se soutient beaucoup. C’est valorisant. Ce sont des leçons de vie qu’on apprend ici. Même si notre chemin est tortueux, c’est bénéfique à tous », témoigne Tahirou Sissoko, secrétaire du GEM, membre du comité de pilotage du comité local de santé mentale Val-d’Oise Est. La commune n’a pas forcément de rôle direct dans leur création, mais plutôt dans leur impulsion et dans le réseau d’acteurs mobilisés autour des groupes, localement. Les GEM sont rarissimes en milieu rural.
Le département doit déployer un projet territorial de santé mentale. Ce n’est pas le cas des communes. Elles n’ont aucune obligation de créer un comité local de santé mentale (CLSM). En revanche, si un CLSM se met en place, c’est grâce à elles. De plus en plus s’y mettent. Cela devient la base à partir de laquelle vont se développer des actions répondant à des besoins spécifiques au territoire, du général au particulier, du collectif à l’individuel. Cela passe par exemple par des actions de sensibilisation, comme à l’occasion de la Semaine de la santé mentale (cette année reportée à l’automne), ou la gestion de cas individuels compliqués et complexes.
Plusieurs élus citent la mise en relation de la ville, des bailleurs, de travailleurs sociaux, de praticiens ayant permis de désamorcer des conflits de voisinage, de pallier des expulsions locatives.

« Le rôle de l’élu est important »
C’est pourquoi nous participons à l’initiative de formation “Premier secours en santé mentale” (https://pssm france.fr/), qui donne les clés pour ne pas être perturbé par quelqu’un ayant un trouble psychique. Nous sommes en train de développer un complément destiné aux acteurs travaillant auprès de la jeunesse. »
Contre les préjugés : Mérignac (Gironde)
« Créer un CLSM. C’est mon projet, la première étape pour mettre les gens autour de la table, voir ce qui se fait, ou pas, ce qui manque, et essayer d’impulser la mise en place d’un GEM sur la ville, car il n’y a pas d’autre choix que Bordeaux pour l’heure », explique Ghislaine Bouvier, adjointe déléguée à la santé et à la lutte contre les pollutions de Mérignac (33). Nouvelle élue, elle a été forcée de «se plonger dedans » à cause des astreintes. «Mais je ne peux pas me cantonner à me demander s’il faut hospitaliser une personne ou non », reprend-elle.
« Encore récemment, un collègue m’a demandé : “Est-ce vrai que quand on a des espaces verts proches de chez soi, on va mieux ?” Autrement dit, le fait que l’urbanisme, l’environnement, la précarité soient des gros déterminants de la santé mentale ne tombe pas sous le sens. Nous avons encore besoin de batailler pour que cela se sache et que cela devienne des sujets au sein de nos municipalités ».
Le CLSM doit aider à décloisonner les acteurs, agir en fonction des déterminants sociaux et de l’environnement. Cela passe aussi par le développement d’actions de prévention. Comme ces groupes de parole mis en place au service municipal d’aide à domicile de Mérignac pour le personnel confronté à des situations de souffrance. Les agents peuvent avoir besoin d’une aide pour que cela ne les impacte pas trop.
Autre exemple à Nice (06), où la moitié des agents d’accueil de la ville a reçu une formation sur la santé mentale et les préjugés. Cela favorise une «culture de santé mentale bienveillante », souligne Jean-Yves Giordana, chef de pôle de psychiatrie générale au centre hospitalier Sainte-Marie.
Prévenir le risque suicidaire : Saint-Quentin (Aisne)
La cheffe du pôle gériatrie à l’hôpital de Saint-Quentin, Béatrice Berteaux, adjointe chargée de la santé à Saint-Quentin (55 000 hab., Aisne), confirme l’intérêt des formations. Elle voit combien «la démence est une souffrance pour tout le monde et combien une posture, un comportement peu adéquat peut entraîner, ou non, des problèmes ».
Le CLSM n’est pas encore officiellement mis sur pied sur ce territoire. Mais les axes prioritaires d’intervention sont déjà définis. L’un d’eux porte sur la prévention du risque suicidaire des jeunes. La crise sanitaire a exacerbé «l’angoisse » de certains jeunes. Béatrice Berteaux n’imagine pas passer à côté de ce sujet majeur.
« Notre contrat local de santé, adopté en juillet 2021, a placé la santé mentale et environnementale comme priorité transversale. Le CLSM est la deuxième étape qui nous permet de construire des actions adaptées en direction des jeunes, en complément avec une maison des adolescents qui doit ouvrir dans quelques mois. » Actions d’information pour les collégiens, les étudiants, vacations de psychologues, groupe ressources pour faire remonter une situation, etc., sont autant de projets.
Garantir l’accès aux soins Bailleul (Nord)
Les projets en santé mentale peuvent se développer si et seulement si l’offre sanitaire existe. Or, la situation du secteur psychiatrique est catastrophique, alerte Nicolas Lefebvre, adjoint au maire de Bailleul (15 404 hab., Nord). Il compte sur ses collègues présidents de conseils de surveillance d’établissements publics de santé mentale (EPSM) pour construire une action commune. Lui préside celui des Flandres.
La démographie médicale, le numerus clausus, la concurrence entre hôpitaux, tout joue en défaveur de la psychiatrie. «On ne peut pas se reposer sur le seul ambulatoire (les centres médico-psychologiques) car nous aurons toujours des personnes pour lesquelles une hospitalisation est nécessaire à un temps T. Mais cela va devenir de plus en plus compliqué. » L’élu appréhende la fermeture de 60 lits sur l’arrondissement de Dunkerque, couvert par l’EPSM Flandres (200 000 hab.). Déjà deux secteurs sur les six n’ont plus de psychiatre. Il n’y a donc plus d’hospitalisation d’office de proximité possible, déplore l’élu.
Le Centre national de ressources et d’appui aux contrats locaux de santé mentale (CLSM) organise une rencontre nationale des CLSM couplée avec des journées d’études de l’association Élus, santé publique et territoires (ESPT). Il accompagne la création et les premiers pas des CLSM. Il peut aussi aider les élus à sensibiliser leurs collègues du conseil municipal, parfois hésitants à s’engager.
En savoir + : brochure «Élus locaux, la santé mentale vous concerne ! ». https://espt.asso.fr/
• «La santé mentale dans la cité », une brochure AMF, ministère de la Santé et Psycom. www.psycom.org
• «Élus locaux, la santé mentale vous concerne ! Pourquoi ? comment agir ? Les conseils locaux de santé mentale », brochure de l’ESPT et du CCOMS. https://espt.asso.fr/
• Centre collaborateur de l’OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS).
• Association Élus, santé publique et territoires. [email protected]
• L’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques dispose de délégations départementales et régionales que les élus peuvent solliciter.
• Synthèse et vidéo du forum «Agir pour la santé des habitants » tenu lors du 103e Congrès de l’AMF.
Lire aussi nos articles :
- Prévenir plutôt que guérir
- Les maires face au mal-être des citoyens
- Répondre à l'urgence de la santé mentale
- Prendre en charge les troubles mentaux
Suivez Maires de France sur Twitter: @Maires_deFrance
Raccourci : mairesdefrance.com/1228
Cet article a été publié dans l'édition :
- Énergie : les collectivités devront se débrouiller
- Loi de finances pour 2022 : les principales dispositions concernant les collectivités
- Catastrophes naturelles : nouvelles règles pour l'indemnisation
- Justice : le délit de prise illégale d'intérêts précisé
- Foncier agricole : une meilleure régulation des terres
- Directeurs d'école : plus d'aides
- Modernisation de la gestion des finances publiques
- Ce que les élus locaux défendent à la Conférence sur l'avenir de l'Europe
- " Donner une vision à la ruralité "
- Politique agricole commune : plan stratégique national
- Discours de haine : bientôt dans la liste des infractions pénales
- Lancement d'une " communauté " sur les zones rurales
- " Zéro émission " pour les bâtiments publics
- Téléphonie : la gratuité des frais d'itinérance prolongée
- ADM 87 - Engagement pour la laïcité
- AMF28 - " Café-rencontre " avec les élus
- AMF43 - Convention avec la gendarmerie
- AMF - Tout savoir sur les fonds européens
- Nouvelle Aquitaine - Salon
- AMF33 - Assemblée générale
- AMD25 - Assemblée générale
- Les directions " Europe " dans les régions, de précieux relais
- Téléphonie : réguler les sites mobiles
- La gouvernance de la commune nouvelle
- Quelles sont les règles de lien entre les taux de fiscalité des intercommunalités ?
- Sécurité civile : du nouveau pour les intercommunalités
- Violences sexistes : les élues locales aussi
- Zéro artificialisation nette : attention aux délais
- Parrainages : jusqu'au 4 mars au plus tard
- Aménagement. Réduire l'artificialisation des sols
- Santé mentale. S'investir et agir
- Il crée du lien social via un projet culturel
- Rouen confrontée à l'incendie de Lubrizol
- Archéologie préventive. Concilier patrimoine et aménagement
- Référent laïcité : missions et modalités de désignation
- Le Fonds européen de développement régional (Feder)
- Travailler avec la DAECT
- Des cantines plus " vertes "
- Les règles régissant les relations entre communes et associations
- Textes officiels - Crise sanitaire. La loi instaure le passe vaccinal dès 16 ans
- Textes officiels - Polices municipales. Un décret définit les modalités de « l'engagement de servir »
- Textes officiels - Statut de l'élu - Un texte portant diverses dispositions sur les conditions d'exercice du mandat
- Textes officiels - Laïcité. Une instruction sur le mode d'emploi du déféré-suspension
- Éolien : contrôle de l'impact acoustique et environnemental
- Formation des élus : activer votre compte
- Laïcité : un " référent " et un " contrat "
- Fonction publique : nouveau Code au 1er mars 2022
- Protection sociale : ce qui change
- Loi Climat : pas de hausse de loyer pour les passoires thermiques
- Présidentielle : les élus ont jusqu'au 4 mars 2022 pour parrainer un candidat
- L'AMF vous répond
- L'AMF vous répond
- L'AMF vous répond
- Mouvements sectaires : il y a des moyens d'agir !
- Formation des élus. Des nouveautés depuis janvier
- Le maire et le tournage
Maires de France est le magazine de référence des maires et élus locaux. Chaque mois, il vous permet de décrypter l'actualité, de partager vos solutions de gestion et vous accompagne dans l'exercice de votre mandat. Son site Internet, mairesdefrance.com, vous permet d’accéder à toute l'information dont vous avez besoin, où vous voulez, quand vous voulez et sur le support de votre choix (ordinateur, tablette, smartphone, ...).