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01/01/1970 - JANVIER 2022 n°397
Administration générale Votre mandat

Maires délégués: un mandat à part ?

Les communes historiques deviennent généralement des communes déléguées de la commune nouvelle. Zoom sur ces maires délégués dont le rôle n'est pas négligeable.

Christophe Robert
« Les maires délégués ont pour mission d'animer le réseau de proximité avec les habitants et ils jouent ainsi le rôle de "thermomètres de  la population" ».
© Mairie de Châtel-en-Trièves
« Les maires délégués ont pour mission d'animer le réseau de proximité avec les habitants et ils jouent ainsi le rôle de "thermomètres de la population" ».
La mise en place de quelque 778 communes nouvelles, regroupant aujourd’hui un peu plus de 2 500 communes historiques, a eu pour conséquence de créer un mandat local d’une nature bien particulière : celui de maire délégué. La création de communes déléguées au sein d’une commune nouvelle
« entraîne de plein droit pour chacune d’entre elles (…) l’institution d’un maire délégué » (article L.2113-11 du Code général des collectivités territoriales). Lors de la création de la commune nouvelle, les maires délégués sont de droit les maires en fonction des anciennes communes. En revanche, à l’issue du renouvellement général du conseil municipal de la commune nouvelle, ils sont élus par le conseil municipal parmi ses membres lors de l’installation du conseil municipal.

Ni vraiment maires, ni simples conseillers municipaux, les maires délégués occupent donc une place spécifique au sein des communes nouvelles. Ainsi, lors du premier renouvellement du conseil municipal de la commune nouvelle, les maires délégués, par ailleurs adjoints de droit de la commune nouvelle sans être comptabilisés parmi les adjoints, sont considérés comme de «simples » conseillers municipaux dans l’ordre du tableau, comme le rappelle l’AMF dans une publication intitulée «2020-2026 : créer une commune nouvelle, guide pratique et retour d’expérience » (lire ci-dessous).
 

Rôle et attributions du maire délégué
Le maire délégué est officier d’état civil et officier de police judiciaire sur le territoire de la commune déléguée. Il dispose des attributions des maires en matière éducative liées au respect de l’obligation scolaire. Il peut recevoir du maire de la commune nouvelle des délégations territorialisées, par exemple en matière de police municipale et d’autorisation d’urbanisme.

Il dispose d’un pouvoir consultatif (autorisations d’urbanisme, ­permissions de voirie, projets d’acquisition, d’aliénation d’immeubles réalisés par la commune nouvelle…). Il est informé des projets d’équipements, des déclarations d’intention d’aliéner (DIA) lors des procédures de préemption.

En savoir + : Guide pratique sur la création des communes nouvelles (pp. 18-21).


Un garant de la proximité

Si les fonctions de maire délégué peuvent être cumulées avec celle de maire d’une commune nouvelle (sans toutefois cumuler les indemnités), ces deux mandats sont complémentaires. «La distinction entre les deux mandats est importante, souligne Fanny Lacroix, maire de la commune nouvelle de Châtel-en-Trièves (38). Le rôle du maire délégué, en contact direct avec les habitants, est de faire remonter leur parole au maire de la commune nouvelle. » La jeune élue cumule trois casquettes : celle de mère de famille, de fonctionnaire territoriale et de maire de sa commune nouvelle. Selon elle, «le rôle du maire est plutôt de se placer dans une dimension stratégique tandis que les maires délégués sont là pour incarner l’identité historique du territoire ». Dans sa commune nouvelle, fruit du mariage entre deux communes rurales regroupant aujourd’hui quelque 500 habitants, «le maintien des maires délégués a permis de respecter le souhait des habitants de conserver l’identité forte des deux villages historiques et de garder la proximité. Les maires délégués ont pour mission d’animer ce réseau de proximité avec les habitants et ils jouent ainsi le rôle de «thermomètres de la population » », poursuit Fanny Lacroix pour qui «la création d’une commune nouvelle nécessite de véritablement tenir compte du point de vue des habitants, avec la plus grande concertation possible ».

« Pour moi, un maire délégué, c’est avant tout un négociateur de proximité », considère, pour sa part, Nadège Moreau, maire déléguée de La Pommeraye (49). Une mission qui nécessite beaucoup de temps. L’élue, qui confie consacrer entre 40 et 50 heures par semaine à son mandat, a d’ailleurs choisi de quitter son activité professionnelle pour se consacrer à sa commune déléguée (4 000 habitants). Dans sa commune nouvelle de Mauges-sur-Loire (18 284 habitants), toutes les mairies des communes historiques et les maires délégués ont été maintenus. La mairie déléguée de La ­Pommeraye est ouverte tous les jours, du lundi matin au samedi midi, où Nadège Moreau reçoit quotidiennement les habitants.

Mais la population semble encore avoir parfois du mal à comprendre qui fait exactement quoi entre le maire de la commune nouvelle et les maires délégués. «Les habitants pensent que je dispose de beaucoup de pouvoir, ce qui n’est pas le cas. Quand ils viennent me voir pour des projets de permis de construire par exemple, je dois les réorienter vers l’adjoint référent chargé de l’urbanisme. Les habitants ont parfois du mal à comprendre qu’un maire délégué n’ait pas réponse à tout et qu’il ne gère pas toutes les thématiques », témoigne l’élue. «Avec la mise en place des maires délégués, je pensais que je serai peu interpelée en tant que maire de la commune nouvelle, mais tel n’est pas forcément le cas, constate Fanny Lacroix. Car si les habitants vont voir les maires délégués dans un premier temps, c’est bien moi qu’ils viennent solliciter pour des sujets plus particuliers. »
 

Polyvalents et adaptables

Les maires délégués se considèrent aujourd’hui comme des «généralistes de proximité ». Pour les anciens maires de communes historiques devenus maires de communes déléguées, la tâche est relativement aisée. Si elle avait un conseil à donner à ses homologues maires délégués, Nadège Moreau leur préconiserait ceci : «Intéressez-vous à tout, aussi bien à la voirie qu’au social. Car nous devons être polyvalents et adaptables pour pouvoir répondre au mieux aux demandes de premier niveau. » Très souvent sollicitée, elle dispose de peu de pouvoir. «Être maire délégué, c’est très énergivore, chronophage, mais cela reste passionnant ! », affirme-t-elle cependant.

« Nous devons être au point sur tous les sujets », confirme également Gilles Maloisel, maire délégué de Coulonces (14, lire ci-dessous). «Les textes évoluent très vite, par exemple sur les transferts de compétences aux EPCI, le commerce, l’habitat, l’organisation des mobilités, le plan alimentaire territorial ou encore l’urbanisme », souligne-t-il en estimant que les maires délégués ont aujourd’hui «un travail de communication et de pédagogie énorme à faire sur le terrain auprès des habitants ».

Pour l’heure, c’est donc bien sur le terrain que les maires délégués continuent à trouver leur place, au plus près des attentes de leurs administrés. Une tâche d’autant plus délicate que ces élus ont parfaitement conscience des limites de leurs pouvoirs. Sans compter que les conseils municipaux des communes nouvelles peuvent faire le choix à tout moment de maintenir ou, au contraire, de supprimer les mairies déléguées des communes historiques.

Cependant, beaucoup de maires de communes nouvelles semblent déjà convaincus de leur présence indispensable. À l’instar de Fanny Lacroix : «À l’horizon 2026, je compte bien maintenir l’existence des maires délégués. Cela permet de tenir la barre à plusieurs en impliquant le plus grand nombre, ce qui est toujours enrichissant. »
 

TÉMOIGNAGE
Gilles Maloisel, maire délégué
de Coulonces (14)
« Nous devons être toujours présents en mairie et sur le terrain »
« Ancien agriculteur, je suis maire depuis 25 ans et aujourd’hui maire délégué de Coulonces, commune historique de 700 hab. Selon moi, l’engagement dans la vie publique repose sur un trépied : l’envie, le devoir et la disponibilité.

Dans notre commune nouvelle de Vire-Normandie (18 766 hab.), ­chacune des huit communes historiques a conservé un maire délégué avec une mairie et une secrétaire. En tant que maires délégués, nous sommes des marathoniens, c’est du «non-stop » en permanence car nous devons être toujours présents en mairie et sur le terrain. Si nous abandonnions cet ancrage local, les habitants ne comprendraient pas.

Il faut surtout éviter d’avoir des mairies déléguées fantômes. Je suis un maire délégué très présent qui travaille même le dimanche ! J’assure les permanences en mairie tous les jours et le maire nous fait confiance. Pour moi, c’est avant tout la présence qui fait la performance. La vision politique et stratégique du maire d’une commune nouvelle doit être celle d’un projet de territoire qui émane de ses communes historiques. Le succès de notre commune nouvelle repose donc sur le maintien des mairies déléguées. Car au bout de la course, il faut que tous les chevaux soient à l’arrivée ! »

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Cet article a été publié dans l'édition :

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