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Maires de France


Juridique
19/05/2022
Vie locale

Le maire et les animaux

Au titre de ses pouvoirs de police, le maire doit remédier aux problèmes résultant de la présence d'animaux errants, nuisibles, dangereux. Panorama de ses prérogatives en la matière.

Fabienne Nedey
Illustration
© AdobeStock
La présence d’animaux, a fortiori lorsqu’ils sont «en état de divagation », même lorsqu’il s’agit simplement de chiens ou de chats, peut être source d’accidents (circulation, morsures…), de dégradation de biens, de diffusion de maladies… Rappel des compétences et responsabilités des maires sur ce sujet.

I - Animaux errants ou en divagation : que faire ?

L’article L 211-19-1 du Code rural interdit de laisser divaguer les animaux domestiques comme les animaux sauvages apprivoisés. Confronté à des animaux errants, y compris des chiens et chats, le maire est habilité à intervenir au titre de son pouvoir de police générale et d’un pouvoir de police spéciale que lui confère le Code rural. La jurisprudence considère qu’un simple arrêté interdisant la divagation ne suffit pas si aucune démarche n’est engagée pour assurer son respect effectif.

Pouvoirs de police du maire. Outre son pouvoir de police générale (articles L 2212-1 et L 2212-2 du Code général des collectivités territoriales - CGCT), le maire détient un pouvoir de police spéciale (article L 211-22 du Code rural) en matière de chiens et chats errants. À ce titre, il prend un arrêté interdisant la divagation des animaux, enjoignant aux propriétaires de tenir leur animal en laisse, les avertissant que tout chien ou chat errant trouvé sur la voie publique pourra être conduit à la fourrière.

Pour ce qui concerne l’exécution de cet arrêté, la capture des animaux errants est, en pratique, souvent confiée à des sociétés spécialisées chargées des activités de fourrière municipale (lire ci-dessous).

Information de la population. En application de l’article R 211-12 du Code rural, le maire doit informer la population, par un affichage permanent en mairie et tout autre moyen, des modalités de prise en charge des animaux errants ou en état de divagation. Doivent notamment être portés à connaissance : les coordonnées des services compétents pour la capture et la prise en charge de ces animaux, les conditions dans lesquelles il peut être fait appel à ces services, les coordonnées, jours et heures d’ouverture de la fourrière ou lieu de dépôt, les conditions dans lesquelles les animaux peuvent être remis à leur propriétaire (montants des frais de garde et d’identification), les modalités de prise en charge des animaux errants en dehors des heures d’ouverture de la fourrière… Lorsque des campagnes de capture de chiens et chats errants sont envisagées sur le territoire communal, le maire doit en informer la population au moins une semaine avant.

La fourrière : un service public obligatoire. Chaque commune doit disposer d’une fourrière apte à l’accueil et à la garde des chiens et chats errants ou, par convention, du service d’une fourrière établie sur le territoire d’une autre commune (article L 211-24 du Code rural). Les animaux sont gardés pendant huit jours ouvrés. Pour les chiens et chats identifiables (par puce, tatouage, collier...), le gestionnaire de la fourrière prévient le propriétaire. Si celui-ci vient chercher l’animal dans le délai, il lui est restitué après versement des frais de fourrière et des éventuels frais d’identification (l’animal ne peut être remis qu’après avoir été pucé ou tatoué).
 
Les animaux non réclamés au-delà du délai sont considérés abandonnés. Ils peuvent être conservés par le gestionnaire de la fourrière dans la limite de la capacité d’accueil de la structure, cédés à titre gratuit à des fondations ou des associations de protection des animaux disposant d’un refuge ou à des associations habilitées à proposer les animaux à l’adoption, après avis favorable d’un vétérinaire, ou euthanasiés si le vétérinaire en constate la nécessité.
 
En dehors des horaires d’ouverture de la fourrière, le maire doit prendre «toutes dispositions de nature à permettre une prise en charge rapide d’un animal errant ou en état de divagation » : par exemple, en passant des conventions avec des cabinets vétérinaires.

La loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale, dans sa version initiale, prévoyait de rendre obligatoire la création d’une fourrière ou d’un refuge dans chaque commune ou EPCI. Cette mesure a été supprimée, le législateur ayant suivi la position prônée par l’AMF. Les fourrières peuvent être mutualisées entre plusieurs EPCI ou avec un syndicat mixte fermé. Et une commune peut confier le service public de la fourrière à des fondations ou associations de protection des animaux disposant d’un refuge, sous la forme d’une délégation de service public.

 

Pas de stérilisation obligatoire des chats errants 
Dans sa version initiale, la proposition de loi sur la maltraitance animale prévoyait de transformer l’actuelle faculté ouverte au maire de faire procéder à la capture et à la stérilisation de chats errants vivant en groupe (article L 211-27 du Code rural) en une obligation. Cette obligation aurait fait peser sur les maires une responsabilité hors de proportion avec leurs moyens humains et financiers. Cette position, défendue par l’AMF, a été entendue par le législateur. La stérilisation des chats errants reste donc, aujourd’hui, une «possibilité », comme c’était le cas auparavant.
 
La proposition de loi envisageait aussi, initialement, l’extension aux présidents d’EPCI du dispositif permettant aux maires de faire capturer et stériliser des chats errants. Là encore, une fausse bonne idée, le maire étant seul détenteur du pouvoir de police. La loi adoptée précise simplement que les EPCI à fiscalité propre peuvent « mettre les moyens nécessaires à disposition des maires pour exercer le pouvoir de police ».
 
La loi du 30 novembre 2021 prévoit que l’État doit élaborer, dans les six mois suivant sa promulgation (mai 2022), un rapport dressant un diagnostic chiffré sur la question des chats errants, évaluant le coût de leur capture et stérilisation, et proposant des modalités de financement par les collectivités territoriales et l’État. 


II - La lutte contre les animaux nuisibles 

Pigeons. Il appartient au maire d’appliquer le règlement sanitaire départemental en matière de lutte contre la prolifération des pigeons. Celui-ci interdit à toute personne de nourrir «les animaux errants, sauvages ou redevenus tels », en mentionnant les pigeons. Le maire peut prescrire aux propriétaires d’habitation de grillager les endroits où les pigeons viennent se reproduire. Il peut mettre en œuvre des moyens contraceptifs destinés à réduire le nombre de pigeons ou décider de moyens de capture. Les mesures édictées doivent rester «proportionnées », ne doivent pas générer un risque pour les administrés, ni constituer de mauvais traitement envers les animaux.
 
Rats. Il appartient au maire, et non au préfet, d’assurer le respect du règlement sanitaire départemental. Au titre de son pouvoir de police générale, le maire peut mener des campagnes de dératisation, imposer un contrôle d’infestation par les rats, voire accompagner les habitants dans leur lutte pour se débarrasser des rongeurs.

Gros gibier. Compte tenu des dégâts engendrés par le gros gibier, notamment les sangliers qui ravagent les récoltes sur certains territoires, le maire concourt à la mise en œuvre des mesures de régulation prises par l’État et la fédération départementale de chasse. Il peut notamment prescrire les modalités techniques des battues ou organiser leur piégeage, en application des articles L427-4 du Code de l’environnement et de l’alinéa 9 de l’article L2122-21 du Code général des collectivités territoriales (lire notre article: Lutter contre les dégâts causés par le gros gibier).

 

Recensement des propriétaires d’oiseaux 
La recrudescence actuelle des cas de grippe aviaire (début avril 2022, près de 1 200 élevages contaminés, 45 cas identifiés dans la faune sauvage, 22 en basses-cours) impose de rappeler que le maire doit procéder au recensement des propriétaires d’oiseaux et en tenir la liste à disposition du préfet.
Sont concernés tous les détenteurs non commerciaux de volatiles ou d’autres oiseaux élevés en extérieur (sont exclus, par dérogation, ceux détenus en permanence à l’intérieur de locaux à usage de domicile ou de bureau).
Les propriétaires doivent remplir un formulaire Cerfa et l’adresser en mairie. Dans les départements touchés par l’épizootie, le préfet peut demander au maire d’actualiser cette liste. 
En savoir + :
L'AMF vous répond " Quel est le rôle du maire vis-à-vis des propriétaires d'oiseaux " ?
Note de l’AMF sur la prévention de la propagation de la grippe aviaire www.amf.asso.fr (réf. CW41202). 


III - Les prérogatives du maire face à des animaux dangereux

L’article L 211-11 du Code rural permet au maire de prendre des mesures préventives, notamment d’enjoindre au maître la prise de précautions particulières (maintien du chien enfermé, port de laisse ou muselière, construction d’une clôture...), ou faire diligenter une évaluation comportementale de l’animal à l’issue de laquelle le propriétaire pourra être contraint de suivre une formation et d’obtenir une attestation d’aptitude. Le maire peut agir en la matière même en l’absence de divagation et même concernant, par exemple, des chiens ne relevant pas de races catégorisées «chiens dangereux ». 


IV - La présence d’animaux dans les cirques 

La réglementation autorise à ce jour la présence d’animaux dans les cirques et elle l’encadre (www.amf.asso.fr, réf. CW24371).

Il n’appartient pas aux maires de prendre des décisions qui ne relèvent pas de leur champ de compétence ni des attributions qui leur sont conférées par la loi.
 
Des documents à demander. Le Guide des bons usages sur l’accueil des spectacles itinérants dans les territoires, publié en 2020, dont la rédaction concertée entre les acteurs, notamment l’AMF, a été coordonnée par Artcena (lire référence ci-contre), rappelle les obligations imposées par la réglementation aux entreprises artistiques concernées. Elles doivent notamment présenter à la mairie des certificats vétérinaires et, le cas échéant, un certificat de capacité pour l’entretien et la présentation au public d’animaux non domestiques.
 
Interdiction future des animaux non domestiques dans les cirques. La loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale a acté l’interdiction aux cirques itinérants, deux ans après sa promulgation (soit le 1er décembre 2023), « d’acquérir, commercialiser et faire se reproduire en vue de les présenter au public des animaux appartenant aux espèces non domestiques ». Et, sept ans après sa promulgation (soit le 1er décembre 2028), de « détenir, transporter et présenter au public » ces mêmes animaux. Les autorisations d’ouverture de ces établissements ne seront plus délivrées si ceux-ci envisagent de présenter au public des animaux non domestiques.
 
La loi impose dorénavant à tout établissement itinérant détenant un animal en vue de le présenter au public de l’enregistrer dans un fichier national (le délai est fixé à mai 2022).
 
La loi acte, enfin, l’interdiction de détention de cétacés en captivité, sauf exceptions, dans un délai de cinq ans (1er décembre 2026). Elle interdit la détention «des ours et des loups » en vue de les présenter au public. 
 

En savoir +: 

Loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes (JO du 1er/12/2021). 
Guide des bons usages sur l’accueil de spectacles itinérants sur un territoire 
 

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Cet article a été publié dans l'édition :

n°401 - MAI 2022
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