Le maire et le legs
Maire de Falaise (8 245 hab., Calvados), Hervé Maunoury a attendu plusieurs mois avant d'officialiser, en décembre dernier, un legs de 2 millions d'euros en faveur de la mairie.
Notaire. « En juin 2021, je reçois l’appel du notaire de la commune qui me dit que nous bénéficierions d’un legs. Je peine à le croire car la mairie en a déjà reçu un en 2017, de 1,24 million d’euros. En outre, je reste prudent car il pourrait y avoir des dettes liées à ce don ou à un testament plus récent, que sais-je !
Un mois plus tard, le notaire me dit que “ c’est bon ”, qu’aucun autre testament n’existe, qu’il y a des biens immobiliers et des liquidités. Je lui demande une idée du montant du legs et il me dit que ce serait “ plus d’un million ”. J’apprends au passage le nom de la donatrice, qui était commerçante à Falaise, décédée en avril sans héritier. Son mari était de la région et elle était née à Paris. Je garde la nouvelle pour moi, rien n’est formalisé et l’été passe, la rentrée… Je me méfie : le droit est complexe, les familles aussi. »
Testament. « Fin novembre, le notaire me dit avoir une “ vision claire ” du legs. Je me rends dans son étude où il me lit le testament. La mairie est seule héritière d’immeubles à Falaise et à Caen, pour 1 million d'euros, et d’épargne et d’assurances-vie, pour 1 million d'euros aussi. Notre obligation serait d’entretenir la tombe de la donatrice. J’accepte bien sûr le legs, je signe les papiers et, intérieurement, je remercie cette administrée. Nous allons faire de belles choses avec son don.
Mi-décembre, en conseil municipal, j’officialise l’information. La surprise est entière. Cet argent entrera en “ recette exceptionnelle ” dans le budget. Je prévois de mobiliser les liquidités assez vite et, d’ici la fin de mandat, de vendre une partie des immeubles, qui rapportent 35 000 euros de loyer annuel. »
Investissements. « Où investir ? Je veux que l’utilisation du legs honore la mémoire de la donatrice. Il s’agit d’être digne de son geste. Les investissements seront réalisés dans la commune de Falaise, où elle est enterrée, et une rue portera son nom. Son legs profitera à tous.
Des projets de mon programme vont être accélérés ou amplifiés – je pense par exemple aux mobilités douces ou à la rénovation d’un lavoir. Maintenant, que “ disent ” ces deux legs en quatre ans ? Que les Falaisiens, qui ont vécu la reconstruction, après guerre, sont attachés à notre ville. Ils font œuvre de philanthropie, qui est une forme de financement trop peu explorée par les maires. J’ai d’ailleurs contacté, il y a peu, un chef d’entreprise à succès, né à Falaise. Je lui ai proposé de soutenir un projet sous la forme d’un mécénat. Nul besoin d’être mort pour témoigner de son amour pour une ville ! »
« Je remercie la donatrice qui nous a légué ces 2 millions d’euros. Elle a rédigé son testament en 2009 et ne l’a jamais modifié. Elle aurait pu donner son argent à des associations humanitaires ou à l’État. Elle a choisi Falaise où pourtant elle n’est pas née, mais où elle a tenu un magasin Singer pendant des décennies avec son époux.
Personnellement, donnerai-je “ quelque chose ” à Falaise à ma mort ? (silence). Je vous dirais “ joker ”, je ne suis pas riche vous savez… mais pourquoi pas ? Je suis encore jeune, j’ai des enfants. Mais j’aime beaucoup ma ville. »
• Prudence : « Tout argent est bon à prendre. Mais un legs demande un travail d’inventaire et de patience. Il faut un bon notaire. Je ne me suis pas emballé même si j’avais envie de partager l’information avec mes élus. »
• Intérêt général : « Quand une personne donne à une ville, c’est pour l’intérêt général. Quand Falaise a reçu un legs en 2017, il a été utilisé pour baisser les impôts. Conseiller municipal, j’ai voté contre. Car tout le monde n’en profitait pas. Et les impôts ont ré-augmenté une fois le don épuisé. »
• Financement participatif : « Un territoire peut recevoir de l’argent privé. Mais le maire ne peut solliciter les personnes qui font leur testament ! À Falaise, nous avons créé une fondation « territoriale » qui permet le financement de projet par le crowdfunding (financement participatif). Ce levier est trop méconnu. »
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