Les maires espèrent l'adoption rapide d'un "véritable" statut de l'élu
Il y a unanimité pour améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux. Lors du forum du 19 novembre, élus, parlementaires et gouvernement se sont accordés pour souligner l'urgence à l'approche des municipales. La proposition de loi sénatoriale arrivera en discussion à l'Assemblée nationale, début 2025, et sera enrichie des travaux des députés.
« Pour lutter contre ces démissions mais aussi renouveler et diversifier le profil des élus locaux, il faut faciliter l'exercice du mandat et favoriser l’engagement». Catherine Lhéritier, maire de Valloire-sur-Cisse (41), présidente de l'Association des maires de Loir-et-Cher et co-présidente du groupe de travail sur les conditions d’exercice des mandats locaux de l’AMF, insiste sur l’importance du chantier. Avec Frédéric Roig, maire de Pégairolles-de-l’Escalette (34), président de l'association des maires de l'Hérault, également co-président du groupe de travail de l’AMF, qui plaide pour «mieux concilier vie publique, vie professionnelle et vie privée des élus », elle coprésidait le Forum du congrès des maires, organisé le 19 novembre sur le statut de l’élu.
Une charge mentale élevée des maires
Mandat de plus en plus complexe et prenant, agressivité des habitants, manque de moyens… Entre fatigue et lassitude, être maire devient un sacerdoce comme l’atteste l’enquête ELUSAN (les élus et leur santé), présentée par les sociologues Didier Demazière et Jérôme Pélisse (CNRS/Sciences Po), à laquelle 4 928 maires ont répondu. «Elle montre bien qu’on est maire H24. Le mandat déborde de plus en plus sur la vie personnelle et familiale. 80% des maires disent qu’ils prennent moins de vacances et de loisirs », souligne Jérôme Pélisse.
Face à un mandat jugé «usant pour la santé » par 83% des maires, Didier Demazière constate une charge mentale élevée – 40% se disent souvent sous pression – et des difficultés à la contrôler comme à en parler. Un sujet tabou qui les enferme souvent dans un sentiment de solitude.
Dans ce contexte dégradé, Catherine Lhéritier met l’accent sur quelques-unes des propositions formulées par l’AMF en novembre dernier : améliorer l’articulation entre vie professionnelle et exercice du mandat (heures d’absence et leur rémunération), renforcer la protection sociale des élus, faciliter l’accès à la formation, revaloriser les indemnités et favoriser un régime fiscal plus attractif… Pour assumer le coût de ces mesures, Catherine Lhéritier préconise de «créer un fond financé par l’Etat permettant aux communes de les couvrir ».
Lever les freins pour s'engager
« Face à un engagement républicain qui s’est détérioré durant cette mandature, il faut impérativement redonner l’envie d’être élu local ». Soulignant l’urgence d’agir face à cette «crise des vocations » et à «une augmentation des agressions et des incivilités envers les élus locaux », Murielle Fabre, maire de Lampertheim (67) et Secrétaire générale de l’AMF, appelle à l’adoption rapide d’une loi.
Présente à ses côtés, Françoise Gatel, ministre déléguée à la Ruralité, au Commerce et à l’Artisanat, souligne «que le gouvernement partage tous ces constats et sera pragmatique en s'appuyant sur les différentes initiatives parlementaires ». «Il est temps de conclure », lance-t-elle en s’amusant à parodier la réplique culte de Michel Blanc. La ministre promet ainsi «d’avancer rapidement » via la proposition de loi (PPL) sénatoriale, adoptée le 7 mars en première lecture par la Haute assemblée, qui arrivera en discussion à l’Assemblée nationale début 2025 (lire encadré ci-dessous) et sera complétée par les travaux des députés.
Les deux députés Stéphane Delautrette et Violette Spillebout ont redéposé, une PPL, le 17 septembre. «Elle agrège nos deux textes précédents afin d’avoir une PPL la plus complète possible, explique le président de la Délégation aux collectivités de l’Assemblée. Elle vise à lever les freins pour s'engager et exercer un mandat mais aussi à faciliter la reconversion professionnelle ».
Sur ce dernier point, Violette Spillebout propose de s’inspirer de ce qui existe dans le privé en créant «un contrat de sécurisation de l’engagement [qui] confierait à France travail l'accompagnement, le bilan de compétences et les liens avec des employeurs potentiels, et contiendrait aussi des mesures d’intégration facilitée à la fonction publique pour reconnaître les années d’engagement ».
Un statut de l’élu étudiant
Seulement 3% des maires ont moins de 40 ans. Pour inciter plus de jeunes à se lancer, Florent Rossi, adjoint au maire d’Auribeau-sur-Siagne (06) et président de l’Association des jeunes élus de France (AJEF), défend un statut de l’élu étudiant, en se réjouissant que sa création soit prévue par la PPL sénatoriale. «Il est anormal que des étudiants puissent avoir une dispense d'assiduité pour une compétition sportive mais pas pour participer à un conseil municipal », pointe-t-il. Parmi ses autres propositions : une formation obligatoire pour les primo-élus sur les fondamentaux ou la possibilité de suivre les conseils municipaux par visio-conférence, «dans un cadre strict et clair ».
Une note positive pour finir. Selon Martial Foucault, «la France est le seul pays au monde capable de réunir, le temps des municipales, près d’un million de citoyens engagés dans des listes sur un corps électoral de 47 millions de personnes ». Bien qu’abimé, l’engagement aurait donc encore de beaux jours devant lui.
La promesse de Michel Barnier
Revoir le débat de Maires de France.TV " Les conditions d'exercice du mandat local " :
Revoir la vidéo du forum " À moins de deux ans des élections : aboutir enfin sur le statut de l’élu " :
Raccourci : mairesdefrance.com/28213
Cet article a été publié dans l'édition :
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