Plein emploi : les principales mesures de la loi
Création de France travail, d'un réseau pour l'emploi, contrat d'engagement pour les demandeurs d'emploi, création d'un service public de la petite enfance : le point sur les dispositions clés de ce texte.

Pour lever les freins à la reprise d’emploi des parents de jeunes enfants, la loi crée un service public de la petite enfance (SPPE) avec l’objectif de créations de 200 000 nouvelles places d’ici à 2030. Elle confie aux communes le rôle d’autorité organisatrice de la politique d’accueil du jeune enfant.
I - Pôle Emploi devient France travail
• France travail devient au 1er janvier 2024 le nouvel opérateur avec plusieurs objectifs : être le guichet unique de l’emploi, ne plus uniquement «laisser venir » mais «aller vers » les demandeurs d’emploi, assurer un suivi plus intense des bénéficiaires dans un contexte d’obligations renforcées, accompagner les entreprises dans leur processus de recrutement.
• Un Réseau pour l’emploi est créé par la loi. Il aura pour mission l’accueil, l’orientation, l’accompagnement, la formation, le placement des demandeurs d’emploi ou des personnes en difficultés sociales ou d’insertion, et répondra aux besoins des employeurs. Ce réseau réunira France travail, l’État, les collectivités locales, les missions locales et Cap emploi, qui partageront des procédures, des critères d’orientation et un système d’information communs. Ils travailleront à un socle de services au bénéfice des personnes et des employeurs.
Dans sa décision n°2023-858 du 14 décembre 2023, le Conseil constitutionnel a censuré des dispositions autorisant les personnes morales de ce réseau à partager entre elles certaines informations relatives aux bénéficiaires de leurs services. Il juge que le partage de données à caractère personnel, « y compris de nature médicale » (…) « communiquées à un très grand nombre de personnes, dont la désignation n’est subordonnée à aucune habilitation spécifique et sans qu’aucune garantie n’encadre ces transmissions d’informations » porte « une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée ».
Un comité national pour l’emploi fixera les règles de fonctionnement de ce réseau, définira ses orientations stratégiques au niveau national et sera chargé d’évaluer les moyens alloués au suivi et à l’accompagnement des personnes sans emploi. Des comités territoriaux à chaque échelon (régional, départemental, bassins d’emploi) déclineront cette stratégie, se coordonneront au niveau local, réuniront des conférences de financeurs pour l’insertion sociale et professionnelle. Le représentant de l’État dans le département fixera le découpage territorial des comités locaux après consultation et désignera les représentants des collectivités qui co-présideront l’instance, après avis du comité local.
• La position de l’AMF. Elle partage l’objectif d’une meilleure coordination des acteurs de l’emploi et de l’insertion, notamment sur le plan du partage d’information entre les acteurs du réseau France travail. Mais elle souhaite que la mise en œuvre de cette réforme respecte une logique ascendante et elle sera vigilante sur les ressources qui y seront allouées. La place exacte du bloc communal dans le dispositif reste, en effet, encore floue.
L’AMF entend qu’il soit étroitement associé au pilotage national et territorial. Ainsi, elle plaide pour que les représentants des collectivités locales dans les comités territoriaux France travail ne soient pas désignés par le représentant de l’État après consultation mais par les associations départementales de maires et présidents d’EPCI, comme il l’était prévu dans le projet de loi à sa sortie du Sénat.
Les communes et EPCI développent des initiatives locales d’emploi et d’insertion permettant notamment la prise en charge des freins périphériques à l’accès à l’emploi (logement, mobilité, fracture numérique, santé, modes d’accueil des enfants) qui doivent être préservées et prises en compte par France travail, de même que le rôle des missions locales et de Cap emploi.
Le projet de loi prévoit ainsi que les jeunes qui sollicitent les missions locales se voient affectés ces dernières comme organisme référent, mais l’AMF rappelle que la nécessité de l’inscription à France travail pour solliciter une mission locale complexifie l’accès à ce service spécialisé et de proximité.
L’Association s’interroge sur le financement de l’opérateur compte tenu de l’impact de la réforme (ressources humaines, refonte des lieux d’accueil, de transformation des systèmes informatiques). En effet, d’après le rapport de préfiguration remis en avril, la réforme coûtera entre 2,3 et 2,7 milliards d'euros en cumulé d’ici à 2026, soit 300 millions d'euros en 2024, puis 500 millions d'euros en 2025, 750 millions d'euros en 2026 et 1 milliard d'euros en 2027, à financer par l’Unedic dans un contexte de conjoncture prévisionnelle du chômage négative.
II - Inscription généralisée et contrat d’engagement
• L’inscription généralisée auprès de France travail, au plus tard en 2025, concernera les demandeurs d’emploi qui relèvent aujourd’hui de Pôle emploi, les demandeurs du RSA, les jeunes suivis par les missions locales, les personnes handicapées accompagnées par Cap emploi. L’inscription sera automatique pour les demandeurs du RSA dès le dépôt de leur demande d’allocation et pour les jeunes ou personnes handicapées demandant à être accompagnées.
• Un contrat d’engagement «unifié » devra être signé par toutes les personnes inscrites à France travail. Ce contrat remplacera les dispositifs actuels. Il comportera un plan d’action avec les objectifs d’insertion sociale et professionnelle et une obligation d’au moins 15 heures d’activité par semaine (actions de formation, notamment).
Cette durée pourra être minorée, voire supprimée, en fonction de la situation du signataire (problèmes de santé, handicap, parent isolé sans solution de garde…). Ces possibilités nécessitent la demande des personnes concernées, d’où le besoin d’une information suffisante sur leurs droits.
Saisi sur la légalité de ce contrat d’engagement, le Conseil constitutionnel (décision du 14/12/2023) juge qu’avec ce dispositif, « le législateur a entendu leur appliquer un cadre commun de droits et d’obligations en vue d’améliorer leur accompagnement socio-professionnel. Il a ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général. » Il assortit toutefois cette validation d’une réserve d’interprétation en considérant que la durée hebdomadaire de travail « devra être adaptée à la situation personnelle et familiale de l’intéressé et limitée au temps nécessaire à l’accompagnement requis, sans pouvoir excéder la durée légale du travail en cas d’activité salariée ».
III - Emploi et handicap
Le texte simplifie les orientations en ESAT (établissement et service d’accompagnement par le travail), confiées aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sur une préconisation de France travail, en privilégiant l’orientation des personnes qui le peuvent en milieu ordinaire, simple ou accompagné.
Les personnes sans la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) mais titulaires d’une pension d’invalidité ou d’une rente d’incapacité bénéficieront des mêmes droits que les titulaires d’une RQTH, sans passer par la MDPH. Une équivalence de RQTH sera accordée aux jeunes de 15 à 20 ans en situation de handicap.
La loi pérennise les entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) et les contrats à durée déterminée «Tremplin » (CDDT). Elle aligne les droits des travailleurs en ESAT sur ceux des salariés ordinaires, avec préservation de leur protection spécifique. Elle entérine la création du «sac à dos numérique », une mesure annoncée lors de la Conférence nationale du handicap d’avril 2023. Il s’agit d’un dossier numérique personnel qui recensera les aménagements dont une personne handicapée a bénéficié tout au long de sa vie, et garantira leur portabilité en cas de mobilité professionnelle.
IV - Accueil des jeunes enfants et crèches
La Première ministre avait annoncé, en juin, lors de la restitution des travaux du Conseil national de la refondation sur la petite enfance, la création de 200 000 places d’accueil du jeune enfant supplémentaires d’ici à 2030 et la volonté de créer un service public de la petite enfance (SPPE).
La loi instaure ce SPPE et confie aux communes le rôle d’autorité organisatrice de la politique d’accueil du jeune enfant. À ce titre, au 1er janvier 2025, toutes les communes devront recenser les offres d’accueil des enfants âgés de moins de 3 ans et les besoins de leurs familles sur leur territoire (assistantes maternelles et établissements d’accueil du jeune enfant – EAJE – notamment). Elles devront informer et accompagner les familles ayant un ou plusieurs enfants âgés de moins de 3 ans, ainsi que les futurs parents.
Les communes de plus de 3 500 habitants devront planifier, au vu du recensement des besoins, le développement de ces modes d’accueil et soutenir la qualité des modes d’accueil. Celles de plus de 10 000 habitants devront établir et mettre en œuvre un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l’offre d’accueil (dont le contenu sera précisé par décret) au 1er/01/2025. Elles sont tenues de mettre en place un relais petite enfance (RPE) au 1er/01/2026.
La loi introduit des mesures concernant le contrôle des crèches et donne au maire un rôle nouveau de contrôle et d’encadrement des autorisations d’ouverture des EAJE : l’avis préalable de l’autorité organisatrice sera dorénavant nécessaire avant toute demande de création, d’extension, de transformation d’un établissement ou d’un service de droit privé accueillant des enfants de moins de 6 ans.
- la compensation financière intégrale par l’État du transfert des compétences créées par ce statut d’autorité organisatrice (couvrant l’ensemble des dépenses générées par ces nouvelles missions) ;
- un calendrier progressif de mise en œuvre afin de laisser le temps aux communes de s’approprier ces nouvelles compétences et aux acteurs de s’organiser ;
- des solutions pour résoudre l’épineuse question de la pénurie de professionnels. Sur ce dernier point, les maires attendent les solutions qui sortiront du comité de filière petite enfance.
L’AMF demande aussi de disposer de deux sièges au sein du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) : avec la création du nouveau statut d’autorité organisatrice incombant aux communes, cette demande apparaît plus que jamais légitime.
L’Association a obtenu le transfert «à la carte » et non «en bloc » à l’EPCI des compétences liées au statut d’autorité organisatrice. Et la suppression du pouvoir de substitution du préfet en cas de défaillance de la commune dans la réalisation de nouvelles places d’accueil.
Raccourci : mairesdefrance.com/2493
Cet article a été publié dans l'édition :
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