Le maire et les cercueils
Maire d'Ars-Laquenexy (938 habitants, 57), Dominique Strebly doit, tous les jours, sceller des cercueils des personnes décédées à l'hôpital et ce, sans compensation.

Sacerdoce
« Vous savez, il y a le poinçonneur des Lilas qui, lui, fait des trous “et toujours des petits trous”. Eh bien moi, depuis que je suis maire (2014), et même avant quand j’étais adjoint, je scelle, je fais “des petits sceaux” sur des cercueils. Je ne conteste pas l’utilité de la mission. Les défunts dont je scelle le cercueil, en application de la loi [art. L. 2214 du CGCT, NDLR], sont des personnes sans famille ou destinées à la crémation, mortes à l’hôpital situé sur ma commune et dont nous avons la charge de l’état civil (1 600 décès par an).
La métropole de Metz nous rembourse en grande partie, sinon nous n’aurions pas accepté l’hôpital chez nous. Mais sceller 450 cercueils par an, c’est un travail de bénédictin. Cela me prend une heure par jour, sauf les week-ends et jours fériés. Avec ce qui pèse sur les épaules d’un maire, j’aurais mieux à faire. »
Obligation
« Pourquoi est-ce à moi, “premier magistrat” d’Ars-Laquenexy, de sceller ces cercueils ? Tout simplement parce que nous sommes en zone dite “gendarmerie” qui implique que ni les gendarmes ni les policiers ne peuvent intervenir. Plusieurs municipalités en France sont dans ma situation, mais nous sommes sans doute celle qui a le moins de moyens. Alors, si aucune force de l’ordre nationale [un fonctionnaire de la police nationale, NDLR] ne peut le faire, qui reste-t-il ?
Un maire, un adjoint ou un policier municipal [ou un garde champêtre, NDLR]. Las, comme je n’ai pas de policier, c’est moi qui me coltine les scellés avec un adjoint. Bien sûr, j’ai demandé aux policiers municipaux de la métropole s’ils le feraient mais cela aurait un coût que me facturerait Metz : je préfère qu’ils interviennent sur nos événements ou qu’ils patrouillent dans nos rues. »
Évolution
« La mission a du sens. Chaque jour, à 11h15, je vais à l’hôpital. Auparavant, une secrétaire m’a dit : “M. le Maire, vous avez un (ou 6-7 parfois) cercueil(s) à fermer – voici les noms des personnes décédées”. À la morgue, je vois les corps, chacun a un bracelet, avec son nom qui est sur ma liste. “On peut fermer”, dis-je. Chalumeau et bâton de cire en main, je fais apposer le sceau de la commune sur les vis du cercueil. Mission accomplie, nous sommes sûrs que le corps est le “bon”, assurons l’intégrité de sa dernière demeure.
Je scelle avec émotion et, par mon métier de gendarme, j’ai vu pas mal d’autopsies, je le vis bien. Mais des agents de l’hôpital ne pourraient-ils pas me remplacer ? Je ne touche même pas la vacation de 25 euros par cercueil qui est prévue pour ces actes [art. R2213-48 du CGCT, NDLR]. J’ai alerté mais je suis un cas trop singulier pour attirer l’empathie du législateur. »
Cet article a été publié dans l'édition :
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