La Loi Élan renforce les mesures pour lutter contre l'habitat indigne
Le texte aggrave l'arsenal de sanctions contre les "marchands de sommeil", dont les revenus illégaux peuvent être saisis.
1 Marchands de sommeil : les sanctions se durcissent
Pour lutter contre les propriétaires louant des logements indécents – les « marchands de sommeil » –, la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan) renforce les sanctions financières et fiscales qui peuvent être prononcées à leur encontre. L’administration fiscale peut désormais saisir les revenus que les « marchands de sommeil » sont présumés avoir tirés de la mise à disposition des logements visés par la procédure – en clair, les loyers illégalement perçus.
En cas de condamnation pour «délit d’hébergement contraire à la dignité humaine », la loi Élan rend obligatoire et automatique (sauf décision motivée du juge) le prononcé des peines complémentaires de confiscation des biens litigieux, et d’interdiction d’acheter de nouveaux biens immobiliers qui peut désormais aller jusqu’à dix ans. Autre peine complémentaire envisageable par le juge, mais non systématique : la saisie de tout bien de la personne (physique ou morale) condamnée pour son activité de marchand de sommeil. Ces mesures sont entrées en vigueur le 1er mai dernier.
Les syndics de copropriété et les agents immobiliers sont désormais tenus de signaler au procureur de la République les faits susceptibles de constituer une activité de marchand de sommeil. La loi Élan oblige les notaires à informer le maire qu’une personne condamnée à une interdiction d’acheter un bien immobilier a tenté de se rendre acquéreur d’un bien situé sur sa commune.
2 L’astreinte administrative se généralise
Jusqu’ici réservée aux procédures prescrivant la réalisation de travaux, l’astreinte administrative de la loi Alur de 2014 est généralisée à l’ensemble des procédures de police spéciale de lutte contre l’habitat indigne. Surtout, son prononcé devient automatique si le propriétaire ne se conforme pas aux prescriptions de l’arrêté dans les délais fixés.
D’un montant maximal de 1 000 euros par jour de retard, cette astreinte court « à compter de la date de la notification de l’arrêté la prononçant et jusqu’à complète exécution des mesures et des travaux prescrits ».
En cas de péril, lorsque l’arrêté n’a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure le propriétaire de procéder à cette exécution dans un délai minimal d’un mois. À défaut de réalisation des travaux dans les temps, le maire fait procéder d’office à leur exécution par décision motivée. De même, il peut aussi faire procéder à la démolition, prescrite sur ordonnance du juge des référés, et rendue à sa demande.
Des textes d’application sont encore attendus sur ce volet, notamment une ordonnance devant harmoniser les procédures de lutte contre l’habitat indigne. Mais le drame de la rue d’Aubagne à Marseille, en novembre dernier, a rendu le sujet brûlant : une proposition de loi est en cours d’examen pour répondre à l’urgence (lire ci-dessous).
Caroline SAINT-ANDRÉ
À nos lecteurs
Maires de France a consacré une série de fiches décryptant les multiples volets de la loi Élan. Sont parues une fiche sur le volet «aménagement » (n° 365, février 2019, p. 52), «urbanisme » (n° 366, mars, p. 60), «littoral » (n° 367 avril, p. 52), «construction » (n° 368, mai, pp. 50-51) et «logement social » (n° 369, juin, p. 50).
Référence
Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, publiée au JO du 24 novembre 2018.
Une proposition de loi en cours d’examen
Le Sénat a adopté, le 11 juin, en première lecture, une proposition de loi déposée par Bruno Gilles, sénateur des Bouches-du-Rhône, et visant à améliorer la lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux. Sa mesure phare est la création, dès 2020, d’une « police spéciale du logement » gérée par le président d’EPCI ou le maire, qui devra traiter des procédures d’habitat indigne relevant de leurs compétences.
Le diagnostic technique global (DTG) deviendrait obligatoire pour les copropriétés de plus de quinze ans. Un organe opérationnel de suivi des copropriétés dégradées – composé du maire, du président du tribunal de grande instance, des administrateurs provisoires et des services de l’État – serait aussi créé.
Ce texte est en instance d’examen à l’Assemblée nationale.
Cet article a été publié dans l'édition :
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