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08/12/2022
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Sécurité : les principales mesures de la Lopmi

Le texte de compromis élaboré en commission mixte paritaire a été adopté par les députés, le 7 décembre, et sera voté définitivement par les sénateurs le 14 décembre. Rappel des principales dispositions du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (Lopmi). [article mis à jour le 23 janvier 2023 suite à la décision du Conseil constitutionnel du 19 janvier]

Xavier Brivet
Illustration
© Adobestock
Les députés ont adopté, le 7 décembre, le texte de la commission mixte paritaire. Les sénateurs le feront le 14 décembre.
Examiné en procédure accélérée (une lecture par chambre), le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (Lopmi) a fait l’objet d’un accord, le 1er décembre, en commission mixte paritaire. Le texte de la CMP doit maintenant être adopté formellement par les députés (7 décembre) puis les sénateurs (14 décembre).

Présenté par le ministre de l’Intérieur, le 7 septembre, en Conseil des ministres, après une première mouture du texte dévoilée en mars, le projet de loi est assorti d’un rapport annexe qui comporte des points de doctrine du ministère de l’Intérieur dans plusieurs domaines et précise la mise en oeuvre de nombreuses mesures. L’article 1er du projet de loi consiste à approuver ce rapport, ce que les parlementaires ont fait en l’amendant. 

Globalement, le texte prévoit une rallonge de 15 milliards d’euros sur le budget du ministère de l’Intérieur, «sur la période 2023-2027 ». Celle-ci fait suite à l’augmentation de 10 milliards d'euros pendant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Sur ces 15 milliards d’euros, 8 seront consacrés à la transformation numérique notamment pour lutter contre la cybercriminalité et accélérer la dématérialisation des procédures et des démarches. 

Voici les principales mesures du projet de loi :

Renforcement des moyens humains : le gouvernement promet le recrutement de 8 500 policiers et gendarmes durant le quinquennat, «dont 3 000 dès l’année prochaine », a indiqué le chef de l’État, le 15 septembre, devant les préfets, sans préciser pour le moment la répartition des effectifs entre la police et la gendarmerie. Ce chiffre de 8 500 ne figure pas dans le projet de loi pas plus que les «200 brigades de gendarmerie (…) sous la forme d’implantations nouvelles ou de brigades mobiles » annoncées également par l’État pour renforcer leur présence, en particulier dans les zones rurales et périurbaines. Le détail des mesures figure en effet dans le rapport sur «la modernisation du ministère de l’Intérieur », annexé au projet de loi, qui énonce que «policiers et gendarmes seront davantage sur le terrain et verront leur présence doublée sur la voie publique d’ici 2030 ».  

L’AMF juge positif «ce renforcement du maillage territorial » mais elle fait remarquer que les critères opérationnels d’implantation des nouvelles brigades de gendarmerie ne sont pas précisés. Elle déplore ne pas avoir été associée aux modalités de concertation que l’État envisage de mener au niveau départemental.

En séance, les sénateurs ont amendé le rapport en prévoyant que «le choix des territoires d'implantation de ces nouvelles brigades sera effectué selon des critères objectifs liés à la population, aux flux, aux risques locaux, à la délinquance et délais d’intervention, à l'issue d'un diagnostic partagé avec les autorités administratives et judiciaires ainsi qu’avec les élus. » Le gouvernement s’engage également dans le rapport à ce que la répartition des policiers et gendarmes soit «réalisée après un processus de concertation avec les représentants des acteurs de chaque territoire, en particulier les parlementaires, les associations départementales de maires et les conseils départementaux ».

Dans chaque département «sera signé par les responsables locaux de la police nationale et de la gendarmerie nationale, sous l’égide des préfets et après consultation des élus locaux, un protocole de coopération opérationnelle entre les deux forces visant à améliorer leur coordination ». Et «aucun commissariat ou brigade de gendarmerie ne pourra être fermé sans que le maire de la commune siège du commissariat ou les maires des communes du périmètre d’intervention de la brigade territoriale soient préalablement consultés », s’engage le ministère de l’Intérieur.

L’AMF souligne les conséquences financières de la création des brigades pour les collectivités, qui devront participer au financement des nouvelles casernes. Les sénateurs ont ainsi adopté un amendement prévoyant une subvention de 200 millions d’euros par an pour «la reconstruction de casernes et les réhabilitations et restructurations de grande envergure », et une autre de 100 millions d’euros pour «les travaux de maintenance ». Les modalités de financement de ces aides ne sont pas précisées pour le moment. 

Continuum de sécurité : Le rapport annexé au projet de loi évoque le «continuum de sécurité » entre les forces de l’ordre nationales, les polices municipales et les sociétés de sécurité privées. «Les polices municipales et les gardes champêtres jouent un rôle essentiel, aux côtés des forces de sécurité intérieure, pour la sécurité des citoyens », souligne le document.

Mais l’État exclut une «expansion supplémentaire » de leurs pouvoirs au motif que celle-ci «connaît une limite de nature constitutionnelle ». Le gouvernement souhaite cependant «mieux structurer les partenariats ». La loi crée pour ce faire une «direction unique des partenariats chargée de l’animation du continuum de sécurité » qui les structurera «dans le cadre de conventions nationales, dont elle assurera le suivi et l’évaluation en lien avec les échelons locaux, notamment les communes ». L’AMF estime nécessaire de clarifier cette notion de continuum et sa concrétisation opérationnelle.

Prévention : les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (FIPDR) consacrés à la vidéo-protection «seront triplés sur les cinq années à venir » (2023-2027) pour soutenir l’effort d’équipement des collectivités.  

Cyberattaques : le versement d’une somme en application de la clause d’un contrat d’assurance visant à indemniser un assuré des pertes et dommages causés par cyberattaque est «subordonné au dépôt d’une plainte de la victime (…) au plus tard soixante douze heures après la connaissance de l’atteinte ». Ce dépôt de plainte conditionnera le remboursement des rançons éventuellement versées. Le paiement de rançons devra être déclaré aux forces de sécurité et l’autorité judiciaire afin qu’elles «disposent des informations nécessaires pour poursuivre les auteurs de l’infraction ». 

« Un équivalent numérique de «l’appel 17 » sera (…) mis en place afin que chaque citoyen puisse signaler en direct une cyberattaque et être mis immédiatement en relation avec un opérateur spécialisé ». Le rapport annexé au projet de loi indique que «1 500 nouveaux cyberpoliciers et cybergendarmes seront formés et déployés pour mieux lutter contre la cybercriminalité ». 

L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) diffusera «des messages de sensibilisation et des bonnes pratiques », notamment aux collectivités. Le gouvernement remettra au Parlement, «avant le 31 décembre 2023 », deux rapports d’évaluation des politiques publiques en matière de cybersécurité dont l’un évaluera «la protection des collectivités territoriales et leur vulnérabilité aux intrusions numériques. Des recommandations pour mieux les protéger, validées par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, sont proposées ».

Amendes forfaitaires délictuelles : l’État voulait initialement généraliser les amendes forfaitaires délictuelles (AFD) à tous les délits punis d'une seule peine d'amende ou d'un an de prison maximum. Onze délits sont déjà concernés par cette procédure (conduite sans permis, usage de drogue...). Députés et sénateurs ont préféré limité à 29 infractions le recours à ces amendes (filouteries, intrusion dans une école, exercice illégal de l’activité de taxi ou de VTC, rodéos nautiques, tapage nocturne…). 

Violences intrafamiliales et sexistes : le nombre d’enquêteurs affectés à la lutte contre les violences intrafamiliales au sein des unités spécialisées sera doublé au cours des cinq prochaines années, passant de 2 000 à 4 000 enquêteurs. «Un financement pérenne sera prévu pour la création d’au moins 200 postes d’intervenants sociaux supplémentaires en police et gendarmerie ».

Le ministère de l’Intérieur s’engagera en outre dans la voie «d’un déploiement généralisé des intervenants sociaux au sein des commissariats de la police nationale et des groupements de la gendarmerie nationale et encouragera pour cela l’établissement de conventions entre l’État, les départements et, le cas échant, les communes concernées relatives à la mise à disposition de travailleurs sociaux aux côtés des forces de l’ordre ». 

Un «fichier de prévention des violences intrafamiliales sera créé » afin «d’empêcher la réitération de faits de violence, de prendre en compte les signaux de dangerosité et de sécuriser les interventions des policiers et des gendarmes. » 

Le Code pénal est revu pour sanctionner plus sévèrement l'outrage sexiste, qui deviendra un délit dans certaines circonstances aggravantes passible de 3 750 euros d'amende. Mais l’action publique pourra être éteinte par le versement d'une amende forfaitaire de 300 euros. Pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes, «les effectifs des forces de sécurité intérieure dans les transports en commun seront doublés, en particulier aux horaires où ces agressions sont le plus souvent constatées ». 

Jeunesse : Cent «classes de reconquête républicaine », destinées prioritairement aux élèves décrocheurs, seront créées «dans les quartiers de reconquête républicaine (QRR) et dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) pour préparer aux concours de la fonction publique et du ministère de l’intérieur en particulier (policier, gendarme, pompier, administratif) ou pour inciter les jeunes à s’engager dans les réserves opérationnelles ». Dans ce même objectif, «un dispositif sera expérimenté dans les territoires ruraux afin de susciter l’ambition scolaire des élèves et de les inciter à intégrer les forces de sécurité intérieure ».


Outre-mer : l’État déploiera aux frontières des Outre-mer «de nouveaux outils technologiques pour lutter contre les trafics ou encore l’immigration irrégulière ». En matière de lutte contre la délinquance, «les territoires d’Outre-mer bénéficieront de l’augmentation des effectifs de réservistes, des cadets de la police nationale et de la gendarmerie nationale dans les Outre-mer ».

La création de «onze nouvelles unités de forces mobiles renforcera la capacité à projeter des forces localement, mais aussi des matériels adaptés (blindés) pour faire face à des événements d’importance, notamment en matière d’ordre public ». Le triplement des crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (FIPDR) permettra de soutenir plus massivement l’effort d’équipement des communes pour leur police municipale et en dispositifs de vidéoprotection. 

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