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06/12/2022
104e Congrès de l'AMF 2022 Commande publique

Mise en oeuvre des projets : la boîte à outils juridique

Lors d'un forum du 104e Congrès des maires organisé par l'AMF le 22 novembre, les élus ont pu explorer différentes pistes juridiques pour monter leurs projets. 

Bénédicte Rallu
Forum "Mettre en oeuvre ses politiques locales : entre commande publique et opérations innovantes", 104e Congrès des maires et des présidents d'intercommunalité, 22 novembre 2022.
© Victoria Viennet
Forum "Mettre en oeuvre ses politiques locales : entre commande publique et opérations innovantes", 104e Congrès des maires et des présidents d'intercommunalité, 22 novembre 2022.

 

« La commande publique est un outil, pas une contrainte ». Dès le début du forum du 104e Congrès, consacré à la mise en œuvre des politiques locales et au montage de projets «entre commande publique et opérations innovantes », le ton était donné par Pierre Le Goff, maire de Guimaëc (973 hab., 29), maire-référent Commande publique de l’AMF. Tout l’objet de cette matinée était de décliner les étapes du montage de projet (traduction du besoin en projet, choix du montage juridique et opportunités financières) en explorant diverses solutions juridiques à disposition des élus.

Renverser sa manière de penser

Et, en renversant sa manière de penser : «Le maire doit être un ingénieur système : il doit construire des écosystèmes et ensuite regarder les outils juridiques et financiers à sa disposition », posait Mohamed Gnabaly, maire de L’Île Saint Denis (8329 hab., 93) car «lorsque l’on n’a pas d’argent, on a des gens » ! Exemple pour son projet de restauration scolaire :  le maire a repéré un boulanger bio travaillant sur une autre commune. «Nous avons travaillé sur l’allotissement de nos marchés de restauration scolaire sur le volet pain pour qu’il puisse répondre. Nous devons allotir les marchés à l’échelle des territoires et des acteurs en fonction de l’impact social que l’on veut avoir », estime Mohamed Gnabaly.

Namoeata Bernadino, adjointe au maire de Teva I Uta (10254 hab., Polynésie), qui vise l’autonomie alimentaire, ne dit pas autre chose. Seul problème : «les achats en local coûtent beaucoup plus cher que les produits importés ». Tout dépend évidemment du projet. Pour l’énergie, Nathalie Nieson, maire de Bourg-de-Péage (10102 hab., 26) et président du syndicat de l’énergie local, mise par exemple sur l’achat groupé : «plus on est nombreux, plus on a une influence sur les fournisseurs qui doivent être solides. Mais cela n’a pas d’influence sur les coûts ».

Recherche de financements

Parfois, les maires héritent de cadeaux empoisonnés. Jean-Michel Desse, maire de Vieille-Chapelle (820 hab., 62), explique que sa commune a hérité en 2006 d’un corps de ferme de 120 mètres-carrés installé sur un terrain de dix hectares. Le legs testamentaire oblige la commune à utiliser le bâtiment pour des œuvres sociales. La municipalité a choisi un foyer d’accueil d’adultes autistes. Coût du projet : trois millions d’euros. La commune a eu besoin de trouver des fonds. Solution trouvée : une petite chapelle présente sur le terrain a permis de récupérer un financement de la Fondation du patrimoine et de bénéficier du Loto du patrimoine, en plus des aides du conseil départemental, de la région, de la DETR, de dons, de la réserve parlementaire d’un député (à l’époque où cela était encore possible).

Le bilan s’avère tout de même lourd pour la commune : «Nous sommes deux à trois fois plus endettés qu’une commune de notre strate, révèle Jean-Michel Desse. Nous n’avons plus beaucoup de marges de manœuvre. En 2023, nous devons emprunter 300000 euros pour clôturer le projet ». Sur les 400000 euros qu’il a coûté à la commune. «Une fois qu’on se lance dans ce genre de projet, il faut assurer. Nous avons eu 60000 euros de subventions annulés car elles ne cadraient pas juridiquement avec le projet ».

Le tout, dans un projet, est aussi de regarder qui peut financer et dans quelles conditions. Le maire de Draguignan (40344 hab., 83), Richard Strambio, a conclu un contrat de revitalisation artisanale et commerciale (CRAC), porté par une société d’économique mixte (SEM), chargée de l’opération de restructuration de la ville. «Ce CRAC a permis d’avoir les fonds pour acheter [les bâtiments] et en faire des logements pour les jeunes actifs et les étudiants. Il a ensuite été étendu en opération de revitalisation territoriale (ORT) et nous menons parallèlement une politique publique d’animation et culturelle » pour dynamiser la commune. «En 2014, ce CRAC est arrivé au bon moment par rapport à notre projet urbain. » [Les CRAC étaient un outil expérimental. Aujourd’hui, les contrats de revitalisation artisanale et commerciale sont plutôt conclus dans le cadre de concession d’aménagement, art. L.300-9 du code de l’urbanisme, NDLR].

Appels à projets

A Naucelle (2000 hab., 12), la maire Karine Clément s’est lancée dans la rénovation de bâtiments dans le centre-bourg pour y créer des maisons intergénérationnelles. «Nous sommes lauréats d’appels à projets dans le cadre du Fond friches. Nous sommes intégrés dans le programme Petites Villes de demain. Je suis allée voir la sous-préfète pour la DSIL, la région, le département… Nous sommes les commerciaux de notre ville » ! L’acquisition du bâti a été réalisé par un établissement public foncier. «Il est difficile de répondre à des appels à projets. Il faudrait toujours avoir un projet ficelé en amont, anticiper au maximum, puis aller vendre son projet, faire du lobbying ».

Société commerciale

Pour monter sa maison médicale et pouvoir y installer deux médecins, Robert Bodiguel, maire de Guiclan (29) a dû se passer d’une bonne partie des aides car l’Agence régionale de santé n’a pas donné son accord au projet. «Cela nous a fermé la porte de beaucoup de subventions », affirme le maire. La commune a retenu une formule juridique des plus étonnantes pour récupérer des fonds : celui de la société coopérative d'intérêt collectif (SCIC). Une SCIC est une société commerciale qui peut revêtir la forme d’une société anonyme, d’une société par actions simplifiées ou d’une société à responsabilité limitée.

Elle a pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d'intérêt collectif présentant un caractère d'utilité sociale. Ce choix a permis aux habitants de prendre des parts dans la société, tout comme la mairie et les professionnels de santé, et surtout d’ouvrir la maison médicale avec des médecins. «La santé est un sujet sensible. 8% à 10% des habitants ont adhéré. Mais sur un autre sujet, je ne suis pas sûr que cela aurait fonctionné », avertit Robert Bodiguel. Pierre Le Goff à Guimaëc prévoit pourtant d’utiliser cet outil juridique pour deux projets : de l’habitat basse consommation et de l’installation de panneaux solaires.

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