Les règles de financement de la campagne électorale
Ces règles s'appliquent à partir du 1er septembre 2019. Leur violation entraîne des sanctions pénales, financières et électorales.
1 Déclaration d’un mandataire financier
Dans les communes de 9 000 hab. et plus, chaque candidat tête de liste (même s’il n’envisage pas de recueillir des fonds en vue de sa campagne ou lorsqu’il fait valoir qu’il n’a reçu aucune recette et n’a engagé aucune dépense) doit déclarer un mandataire financier (art. L. 52-4 du Code électoral).
Procédure : le candidat déclare par écrit, au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée, à la préfecture de la circonscription électorale dans laquelle il se présente le nom du mandataire financier choisi. La déclaration doit être accompagnée de l’accord de ce dernier.
Rôle du mandataire : le 1er septembre 2019 constitue la date à compter de laquelle les candidats aux élections municipales dans les communes de 9 000 hab. et plus doivent commencer à recenser l’ensemble des recettes perçues pour assurer le financement de leur campagne électorale et l’ensemble des dépenses effectuées en vue de l’élection par eux-mêmes ou pour leur compte. Le mandataire recueille les fonds destinés au financement de la campagne, règle les dépenses engagées en vue de l’élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, sauf les dépenses prises en charge par un parti ou un groupement politique.
Ouverture d’un compte bancaire : pour l’exercice de sa mission, le mandataire a droit à l’ouverture d’un compte bancaire, un droit qui a été renforcé par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Désormais, l’établissement de crédit qui refuse l’ouverture d’un compte bancaire à un mandataire financier doit lui remettre systématiquement, gratuitement et sans délai, une attestation de refus. Il doit en outre l’informer qu’il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit situé dans la circonscription dans laquelle se déroule l’élection ou à proximité d’un autre lieu de son choix. Pour procéder à la désignation d’un autre établissement, la Banque de France dispose d’un délai d’un jour ouvré à compter de la réception de la demande du mandataire et des pièces requises.
Par ailleurs, le mandataire qui fait l’objet d’au moins deux refus d’ouverture de compte ou de prestations liées à ce compte peut effectuer une demande de médiation auprès du médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques et ce, jusqu’au 5e jour ouvré avant le jour du premier tour (article 6 du décret du 27 mars 2018 relatif au médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques).
Cas des communes de moins de 9 000 habitants : aucune disposition n’interdit la désignation d’un mandataire financier. Lorsque le candidat fait ce choix, le mandataire n’a pas à être déclaré auprès de la préfecture de la circonscription électorale.
2 Établissement et dépôt d’un compte de campagne
L’article L. 52-12 du Code électoral, alinéas 1 et 2, impose l’établissement et le dépôt d’un compte de campagne à tous les candidats têtes de listes dans les communes de 9 000 hab. et plus, ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou bénéficié de dons de personnes physiques.
Dépenses et recettes électorales à intégrer au compte de campagne : le compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses effectuées en vue de l’élection au cours de la période de six mois avant l’élection. Ce compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire, il ne peut présenter un déficit.
Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l’accord de celui-ci, par les personnes physiques qui lui apportent leur soutien, ainsi que par les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien ou qui lui apportent leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Une note détaillée du Département administration et gestion communales de l’AMF fournit de nombreux exemples de jurisprudences, relatives notamment à la forme du compte de campagne et à ce qui constitue ou non une dépense ou une recette électorale à y intégrer (lire ci-contre).
Dépôt du compte de campagne : au plus tard avant 18 heures le 10e vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) son compte de campagne et ses annexes, accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d’une copie des contrats de prêts conclus en application de l’article L.52-7-1, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte.
Le compte de campagne est présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met le compte de campagne en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises.
Lorsqu’aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, le mandataire établit une attestation d’absence de dépense et de recette, que le candidat adresse à la CNCCFP. Cela ne le dispense pas de déposer son compte de campagne, mais lui permet de ne pas faire présenter son compte par un membre de l’ordre des experts-comptables.
Cas des communes de moins de 9 000 habitants : aucune disposition n’interdit l’établissement d’un compte de campagne, mais lorsque le candidat fait ce choix, le compte de campagne n’est pas soumis à dépôt auprès de la CNCCFP.
3 Respect d’un plafond par habitant des dépenses électorales
L’article L. 52-11, alinéas 1, 2 et 5, fixe, pour les communes de 9 000 hab. et plus, un plafond (déterminé en fonction du nombre d’habitants de la circonscription électorale) des dépenses électorales exposées par chaque candidat au cours de la période de six mois avant l’élection. Les montants, fixés par décret, n’ont pas varié depuis 2012.
4 Sanctions
C’est au juge électoral d’apprécier souverainement s’il y a eu ou non financement irrégulier ou prohibé. Les sanctions encourues en cas de non-respect des règles du financement des campagnes électorales vont dépendre de la nature et du «degré de gravité » de l’irrégularité constatée. Le juge s’attache à vérifier l’écart de voix et le respect du principe d’égalité entre les candidats, le coût de la communication et le degré de propagande, la bonne foi du candidat, l’impact du message diffusé sur les électeurs, le contenu des informations diffusées.
La violation des dispositions du Code électoral peut engendrer des sanctions financières (réintégration de la contre-valeur de l’avantage consenti au candidat dans son compte de campagne, versement du montant du dépassement du plafond des dépenses électorales au Trésor public, suppression du remboursement forfaitaire des dépenses électorales par l’État) et des sanctions pénales. Ainsi, le non-respect des obligations relatives à la déclaration d’un mandataire financier, à l’établissement et au dépôt d’un compte de campagne, au dépassement du plafond de dépenses électorales est puni de 45 000 € d’amende et de trois ans d’emprisonnement (article L. 113-1 du Code électoral).
En cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité à ces règles, le juge de l’élection, saisi par la CNCCFP, peut déclarer l’inéligibilité du candidat pour toutes les élections futures pour une durée maximale de trois ans. Si le candidat est déjà proclamé élu, le juge peut annuler son élection ou, si l’élection n’a pas été contestée, le déclarer démissionnaire d’office (article L. 118-3 du Code électoral).
En mars 2019, une proposition de loi a été déposée devant le Sénat pour clarifier diverses dispositions du droit électoral. Parmi les mesures envisagées figurent :
• la dispense de l’obligation de présentation du compte de campagne pour les listes ayant obtenu moins de 2 % des suffrages exprimés si elles n’ont pas bénéficié de dons de personnes physiques,
• la possibilité pour les candidats de faire de menues dépenses par eux-mêmes,
• l’autorisation de recevoir des dons de personnes physiques via l’opérateur de paiement en ligne Paypal (ce qu’une jurisprudence de mai 2018 interdit, sous peine de rejet du compte de campagne).
Le texte, s’il est adopté, n’entrerait de toute façon en vigueur qu’après les municipales de 2020.
Financement par des personnes physiques et morales
Dons et prêts par une personne physique : articles L. 52-8 et L. 52-7-1 du Code électoral. La loi pour la confiance dans la vie politique du 15 septembre 2017 a introduit des nouveautés. Ainsi, elle a fixé une condition de nationalité française ou de résidence en France pour les personnes physiques pouvant faire un don à un candidat. Cette règle s’ajoute aux dispositions préexistantes, telles que le plafonnement à 4 600 € des dons consentis par une personne physique pour le financement de la campagne d’un ou plusieurs candidats lors des mêmes élections. La loi impose aux candidats de transmettre à la CNCCFP la liste complète de leurs donateurs avec le montant de leur don. Elle a aussi encadré les modalités de prêts accordés aux candidats par les personnes physiques, ainsi que le taux d’intérêt de ces prêts.
Financement par une personne morale. L’article L. 52-8, alinéa 2 du Code électoral interdit aux personnes morales, sauf les partis ou groupements politiques, de participer au financement de la campagne électorale d’un candidat (ni en lui consentant des dons, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux habituellement pratiqués). Cette interdiction vaut dans toutes les communes, quelle que soit leur importance démographique. De plus, seuls les établissements de crédits ayant leur siège dans un pays membre de l’Union européenne ou de l’espace économique européen peuvent consentir des prêts à un candidat.
Sanction. La violation de ces dispositions est punie d’une amende de 45 000 € et de trois ans d’emprisonnement (art. L. 113-1 du Code électoral). Le juge peut aussi décider de sanctions électorales : inéligibilité du candidat, annulation du scrutin, démission d’office du candidat élu (art. L. 118-3 du Code électoral).
• Articles L. 52-4, L. 52-6, L. 52-7, L. 52-8, L. 52-10, L. 52-11, L. 52-12, L. 52-15, L. 113-1, L. 118-3 du Code électoral.
• Loi du 25 avril 2016 de modernisation de diverses règles applicables aux élections.
• Loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.
• Décret du 27 mars 2018 relatif au médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques.
• Note de l’AMF du 18 mars 2019 www.amf.asso.fr (réf. CW39332)
• Le portail «Municipales 2020 » sur le site de l’AMF : www.amf.asso.fr
Cet article a été publié dans l'édition :
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