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Maires de France
01/01/1970
Décentralisation Intercommunalité

Décentralisation, contractualisation : les élus intercommunaux rappellent leurs exigences à l'État

Le projet de loi 3DS, les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) et les financements de l'État ont été au coeur des échanges de la 31e convention de l'Assemblée des communautés de France (AdCF), rebaptisée à cette occasion « Intercommunalités de France ».

Xavier Brivet
© AdCF – Intercommunalités de France

 

Jacqueline Gourault n’est pas repartie les mains vides de Clermont-Ferrand où elle participait, le 14 octobre, à la convention de l’AdCF rebaptisée « Intercommunalités de France-AdCF »  pour « plus de lisibilité ». La ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales s’est vu remettre le Manifeste que l’Assemblée, présidée par Sébastien Martin, président du Grand Chalon (71), va envoyer dans les prochains jours aux candidats et candidates à l’élection présidentielle de 2022. Adopté par son assemblée générale, la veille, ce document « souhaite sensibiliser les futurs candidats aux principaux défis qui devront être relevés dans nos territoires », a indiqué l’élu, sur le développement économique, les transitions écologiques et énergétiques, la cohésion sociale et territoriale et « le continuum de l’action publique entre État et collectivités ». 

« Conforter les responsabilités des intercommunalités » 

L’occasion, pour Intercommunalités de France, de poser ses jalons avant l’examen du projet de loi 3DS (déclaré d’urgence par le gouvernement) par l’Assemblée nationale, dont Jacqueline Gourault a précisé qu’il se déroulera « les semaines du 6 et du 13 décembre prochain », la ministre espérant une commission mixte paritaire conclusive dans la foulée qui permettrait l’adoption définitive du texte avant la fin de la législature, en février prochain. Dans son Manifeste, l’Assemblée réitère son souhait de voir « conforter les responsabilités des intercommunalités comme pilotes du développement économique de leur territoire »  en concertation avec les régions. Surtout, elle veut que la future loi confie aux EPCI « volontaires une responsabilité d’autorité organisatrice de l’habitat »  (« AOH » ), notamment pour « piloter le chantier de la rénovation énergétique des logements au plus près des besoins ». Cette disposition a été votée par le Sénat, qui a adopté le texte en juillet dernier. La ministre de la Cohésion des territoires n’a pas fermé la porte à cette évolution tout en estimant qu’« il faut analyser précisément le contenu de cette compétence ». 

Les élus intercommunaux et la ministre sont tombés d’accord sur le fait que « le projet de loi 3DS ne doit pas se traduire par un détricotage de l’intercommunalité et un chamboule-tout institutionnel »  mais doit « profiter à tous les niveaux de collectivités », selon Sébastien Martin. En accord avec lui, Jacqueline Gourault a ainsi exclu « tout retour en arrière sur le transfert aux EPCI des compétences eau-assainissement, tourisme et urbanisme via les PLUI. On ne remettra pas en cause l’intégration intercommunale », a-t-elle affirmé tout en enjoignant les EPCI à « bien associer les maires à leur gouvernance ». 

De multiples questions sur les CRTE

Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ont également été au cœur des débats de la Convention : selon le décompte présenté par Jacqueline Gourault, « 844 périmètres de CRTE ont été définis en janvier 2021, 702 documents ont été signés et 142 sont en cours de finalisation ». Selon l’AdCF, « 80 % des contrats ont été signés à l’échelle intercommunale », les autres étant portés par des PETR. Jacqueline Gourault a demandé à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) d’engager une étude « sur le contenu de ces contrats pour cerner les priorités d’action des élus ». 

Plusieurs sujets posent question aux élus : le calendrier serré pour élaborer les contrats, leur financement par l’État, les moyens dédiés à l’ingénierie pour formaliser les projets, et les arbitrages entre les nombreux projets portés par les communes pour les inclure ou non dans le champ des CRTE (et le devenir de ceux qui ne seront pas retenus). Ils ont principalement déploré l’absence de financement pluriannuel de l’État pourtant nécessaire selon eux pour accompagner des contrats qui s’étaleront jusqu’en 2026. « Ne gâchons pas l’opportunité d’une relance solide et pleinement partagée par l’État et les collectivités, a résumé Sébastien Martin. Les CRTE sont une révolution culturelle pour l’État qui doit s’engager sur le long terme dans la mise en œuvre de ces contrats territoriaux afin que chaque territoire dispose d’une enveloppe lisible. Beaucoup reste à faire pour transformer l’essai ». 

Assistance technique et financements

Caroline Cayeux, présidente de l’ANCT, a rappelé que l’Agence « est là pour remplir un rôle d’assistance technique auprès des communes dépourvues d’ingénierie ». Jacqueline Gourault a, pour sa part, tenté de rassurer les élus sur les moyens dédiés par l’État aux CRTE en estimant qu’« il n’y a jamais eu autant d’argent disponible pour mener des projets » : elle a annoncé la reconduction en 2022 de l’enveloppe de 20 millions d’euros dédiés à l’ANCT afin qu’elle soutienne les besoins en ingénierie des collectivités. « Les CRTE pourront aussi bénéficier des crédits du plan de relance mais les projets doivent être définis avant fin 2022 », a-t-elle souligné. La ministre a rappelé que les nouveaux contrats de plan État-régions, « qui seront signés d’ici à la fin de cette année », comporteront « un volet territorial pour soutenir les investissements dans les territoires ». Elle a engagé les élus à se rapprocher des régions, autorités de gestion des fonds européens, pour utiliser « les 3 milliards d’euros de reliquats des fonds de cohésion non consommés au titre de la programmation 2014-2021 ». Et souligné que les régions pourront « affecter jusqu’à 25 % du Feder aux projets territoriaux », dans le cadre de la programmation 2022-2027. L’État quant à lui « affectera 350 millions d’euros de crédits non consommés, via la DSIL, aux CRTE », a indiqué Jacqueline Gourault, sans pour autant s’engager sur un financement pluriannuel des contrats demandé par les élus. 

Haro sur les appels à projets

Les échanges ont également été l’occasion pour les élus de tirer à boulets rouges sur les multiples appels à projets lancés par l’État. « Il faut cesser car ces dispositifs mettent les territoires en concurrence », a estimé Sébastien Martin. « Une concurrence déloyale, a souligné Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole, car ce sont toujours les grandes collectivités, outillées pour cela, qui peuvent y répondre ». « Rien que sur la relance économique, j’ai dénombré 70 appels à projets, a indiqué Carole Delga, présidente de la région Occitanie et de Régions de France. Quelles déperdition d’énergie pour les élus qui candidateront avec le risque d’initiatives qui ne seront pas coordonnées ! Les élus locaux ont une véritable maturité pour travailler ensemble. Que l’État les laisse élaborer leurs projets sur lesquels il doit ensuite flécher des moyens ». « Le gouvernement doit arrêter les appels à projets au profit de financements pérennes », a confirmé Sébastien Miossec, président de Qimperlé communauté et vice-président de l’AdCF. La ministre de la Cohésion des territoires leur a donné raison : « Je préfère moi aussi une logique de projet à une logique de guichet. C’est l’ambition des CRTE. Je dois moi-même expliquer à mes camarades ministres la nécessité d’adopter ce nouveau cadre de travail partenarial et contractuel. Il faut absolument réfléchir à la pluriannualité des financements pour donner de la visibilité aux élus ». Il y a encore loin de la coupe aux lèvres.

 

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