La mise à disposition d'un local communal pour l'exercice d'un culte
Un arrêt du Conseil d'État du 7 mars 2019 rappelle les règles à respecter en matière de mise à disposition d'un local communal au profit d'associations cultuelles.
1 Rappel du cadre juridique
L’article L. 2144-3 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que les locaux communaux peuvent être utilisés «par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande ». C’est le maire qui «détermine les conditions dans lesquelles des locaux communaux peuvent être mis à disposition », «compte tenu des nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public », précise le CGCT. Le conseil municipal «fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation ».
2 Deux cas de figure
Dans son arrêt du 7 mars 2019, le Conseil d’État rappelle les principes qui s’appliquent au regard de la loi de 1905 concernant la séparation des églises et de l’État, selon que les locaux en question relèvent du domaine public ou du domaine privé de la commune.
Salles relevant du domaine public communal. L’arrêt confirme que les communes peuvent, en tenant compte de leurs nécessités, autoriser l’utilisation d’un local relevant du domaine public communal par une association pour l’exercice d’un culte, dans le respect du principe de neutralité à l’égard des cultes et du principe d’égalité, si «les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte ». En clair, une mise à disposition d’un local à une association pour l’exercice d’un culte, dans le respect du principe d’égalité de traitement des usagers devant le service public (c’est-à-dire au même titre et dans les mêmes conditions, en particulier financières, qu’à toute autre association, syndicat ou parti politique qui ferait la même demande), ne constitue pas une subvention en nature à une association cultuelle (laquelle est formellement prohibée).
Le Conseil d’État rappelle expressément deux principes essentiels. Tout d’abord, une commune ne peut pas rejeter une demande d’utilisation d’un tel local communal au seul motif que la requête lui est adressée par une association dans le but d’exercer un culte. Mais inversement, une commune ne peut pas décider de laisser un tel local à la disposition d’une association pour l’exercice d’un culte « de façon exclusive et pérenne ».
Salles relevant du domaine privé communal. Concernant cette fois un local relevant du domaine privé communal, l’arrêt est aussi très clair. La commune peut le donner à bail à une association cultuelle, même « pour un usage exclusif et pérenne », sans méconnaître les dispositions de la loi de 1905, « dès lors que les conditions, notamment financières, de cette location excluent toute libéralité ». Autrement dit, s’il y a une contrepartie financière appropriée, la mise à disposition est licite, même, dans ce cas, pour un usage exclusif et pérenne.
3 Un arrêt dans le prolongement de la jurisprudence précédente
Dans une décision plus ancienne, datant du 26 août 2011 (lire ci-contre), le Conseil d’État avait considéré que le refus d’un maire de mettre à disposition d’une association cultuelle une salle communale, une ou deux heures par semaine durant le mois du ramadan, était illégale. Le règlement d’utilisation des locaux communaux prévoyait en effet une mise à disposition gratuite des locaux pour les associations. La commune basait son refus sur le fait qu’une telle mise à disposition gratuite à une association cultuelle constituerait une libéralité. Mais le Conseil d’État n’a pas retenu cet argument compte tenu, notamment, de la brièveté de l’occupation envisagée.
Références
- Arrêt du Conseil d’État du 7 mars 2019, n° 417629.
- CE, ordonnance de référé, 26 août 2011, n° 352106, commune de Saint-Gratien.
À retenir
La commune n’est pas tenue de permettre l’utilisation de ses locaux ou de ses équipements par des associations, groupements ou autres organismes extérieurs. Mais si elle le fait, elle ne peut opposer un refus que pour les motifs listés par l’art. L. 2144-3 du CGCT (nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public), dûment étayés et justifiés. Au nom du principe d’égalité de traitement entre les demandeurs, le maire ne peut pas réserver les salles à certaines catégories d’utilisateurs. Il ne peut pas refuser la mise à disposition pour des motifs politiques ou religieux. La mise à disposition de la salle doit se faire dans le cadre d’une convention précisant, notamment, les conditions financières fixées par le conseil municipal. Celle-ci cadre l’usage des locaux, conformément aux réglementations en vigueur.
Cet article a été publié dans l'édition :
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