Suppression de la taxe d'habitation : les maires dénoncent une "usine à gaz"
En remplacement de la taxe d'habitation, les communes perçoivent la part départementale de taxe foncière. Lors d'un "point info" du 103e Congrès de l'AMF, qui s'est tenu le 17 novembre, les élus locaux ont pointé l'extrême complexité des modalités qui régissent l'affectation de la nouvelle ressource.
Selon le gouvernement, la solution permet d'assurer "une compensation à l'euro près" des communes et de leurs établissements publics. Mais pour l'AMF, le compte n'y est pas. Elle a formulé ses griefs avec force, obligeant le gouvernement à revoir parfois sa position. Ainsi, une mesure inscrite au projet de loi de finances pour 2022 permettra que la compensation s'appuie sur un recensement plus complet des rôles de fiscalité émis au titre de 2020. Toutefois, le gouvernement a été inflexible sur les taux : ceux de 2017 servent au calcul de la compensation. Les communes ayant augmenté leur taux de taxe d'habitation en 2018 ou 2019, sont donc ponctionnées - cette année - sur leurs recettes, du montant du produit supplémentaire qu'elles avaient obtenu.
Le lien entre le territoire et l'impôt est délité
Non seulement lésées par les règles de compensation, les communes se voient aussi appliquer une "usine à gaz", selon l'expression d'Antoine Homé, co-président de la commission des finances de l’AMF. La complexité du dispositif atteint un sommet avec le coefficient correcteur. Baptisé "coco", il permet de faire en sorte que le produit de taxe foncière départementale transféré à une commune corresponde au produit de taxe d'habitation qu'elle a perdu.
Un rôle d'équilibrage qui n'est pas sans rappeler celui que joue le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR), dans le cadre de la suppression de la taxe professionnelle et de son remplacement par la contribution économique territoriale. Mais à la différence de ce fonds, le coco n'est pas figé. Comme l'a expliqué Jean-Philippe Espic, sous-directeur du conseil fiscal, financier et économique à la direction générale des finances publiques, le coco est ajusté proportionnellement aux évolutions des bases de fiscalité, que celles-ci augmentent (du fait par exemple de l'accueil de nouveaux habitants), ou baissent (fermetures d'entreprises…). Reste qu'avec ce mécanisme, souligne le coprésident de la commission Finances de l'AMF, des transferts de taxe foncière sont opérés de certains départements vers d'autres. Ainsi, le lien entre le territoire et l'impôt est délité.
Le pouvoir de taux des communes est pleinement préservé
En outre, qu'en est-il si une commune décide de relever son taux de foncier bâti ? Dans ce cas, il n'y a pas de mauvaise surprise : la commune bénéficie, dans tous les cas, de la totalité du produit supplémentaire généré. "Le pouvoir de taux des communes est pleinement préservé", a souligné Sébastien Simoes, adjoint au sous-directeur des finances locales et de l'action économique, à la direction générale des collectivités locales. Pour Antoine Homé, les maires ont ainsi échappé au pire. Pour autant, la solution de lier le coco aux seules bases de fiscalité n'est pas sans défaut, puisqu'elle a pour conséquence de créer "une prime" à l'augmentation des taux, très loin de la volonté des maires.
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