Pratique
01/09/2019
Fonction publique

Fonction publique : ce que change la loi pour la gestion RH

La réforme entend répondre aux attentes des employeurs, des agents et des usagers. Zoom sur les dispositions impactant la fonction publique territoriale.

Publiée au JO le 7 août 2019, la loi n° 2019-831 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique rebat des cartes en matière de gestion des ressources humaines. Décryptage des principales dispositions dont l’AMF, le CNFPT et la FNCDG ont publié début août une analyse synthétique qui sera complétée par des journées d’information (lire ci-contre). 

1 Dialogue social 
Objet du titre 1er de la loi, la promotion «d’un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics » apporte notamment des modifications profondes au fonctionnement des instances paritaires.
Création du comité social territorial (CST).
Il se substitue au comité technique et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Le CST est créé « dans chaque collectivité ou établissement employant au moins 50 agents et auprès de chaque centre de gestion pour les collectivités et établissements affiliés employant moins de 50 agents ». En outre, « dans les collectivités territoriales et les établissements publics employant 200 agents au moins, une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est instituée » au sein de ce même CST. Cette nouvelle architecture doit entrer en vigueur lors du prochain renouvellement des instances en 2022.

50 %  c’est la part respective du financement de l’apprentissage  prise en charge par le CNFPT et les collectivités.

Révision de l’organisation des CAP. Les commissions administratives paritaires (CAP) voient leurs compétences recentrées. Leur avis préalable sur les questions liées aux mutations, aux mobilités, à l’avancement et à la promotion est supprimé. En contrepartie, « les agents peuvent choisir un représentant désigné par l’organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister dans l’exercice des recours administratifs contre les décisions individuelles défavorables » prises par leur employeur. Par ailleurs, les commissions consultatives paritaires des contractuels ne fonctionneront plus par catégorie (A, B, C) mais en fonction d’une commission unique.

2 Recours aux contrats 
Abaissement du seuil démographique pour les emplois fonctionnels. Les communes et les EPCI à fiscalité propre de plus de 40 000 habitants peuvent dorénavant recruter des contractuels sur des emplois de direction : directeur général des services, directeur général adjoint et directeur général des services techniques. 
Création d’un contrat de projet. Un contrat de projet est créé afin de permettre à l’État, aux collectivités territoriales et aux hôpitaux de recruter un agent sur un emploi de toute catégorie (A, B ou C) pour «mener à bien un projet ou une opération identifié ». Il prend la forme d’un CDD s’achevant en même temps que « la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu ». Sa durée est comprise entre un an au minimum et six ans au maximum. Il peut être renouvelable. 
Recours au contrat sur emploi permanent.
Les employeurs territoriaux peuvent déroger au principe de l’occupation des emplois permanents par des fonctionnaires pour toutes les catégories. Cela s’applique pour les communes de moins de 1 000 habitants et les groupements de communes regroupant moins de 15 000 habitants. Pour les autres collectivités et leurs établissements publics, cela concerne tous les emplois à temps non complet dont la quotité de temps de travail est inférieure à 50 %. Les communes nouvelles  de moins de 1 000 habitants peuvent aussi y recourir. 

3 Discipline et déontologie 
La loi modifie le cadre juridique issu de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. 
• L’échelle des sanctions appliquées par les employeurs est harmonisée entre les trois versants de la fonction publique. En outre, elle est élargie pour les employeurs territoriaux. La procédure de recours disciplinaire ainsi que les instances disciplinaires de recours sont supprimées pour les titulaires et contractuels de la FPT.
• La commission de déontologie de la fonction publique est supprimée et ses prérogatives sont confiées à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). 
• En cas de grève des agents territoriaux, un service minimum est instauré dans les services « de collecte et de traitement des déchets des ménages, de transport public de personnes, d’aide aux personnes âgées et handicapées, d’accueil des enfants de moins de trois ans, d’accueil périscolaire, de restauration collective et scolaire ».

4 Conditions de travail 
• Le congé de proche aidant (un an maximum) est créé pour les agents voulant aider un proche « souffrant d’un handicap ou d’une perte d’autonomie d’une particulière gravité ».
• Les autorisations spéciales d’absence liées « à la parentalité et à l’occasion de certains événements familiaux », dont bénéficient fonctionnaires et contractuels, seront uniformisées dans un décret à venir.
• Les collectivités et leurs établissements publics disposent d’un an à compter du prochain renouvellement de leurs assemblées délibérantes pour mettre fin aux régimes dérogatoires aux 1 607 heures de travail légales.

5 Recrutements, mobilité et évolution professionnelle 
• Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) versera dorénavant «aux centres de formation d’apprentis une contribution fixée à 50 % des frais de formation des apprentis employés par les collectivités et les établissements publics locaux pour les contrats d’apprentissage conclus après le 1er janvier 2020 ». Les 50 % restants seront à la charge de la collectivité.
• La portabilité du contrat à durée indéterminée (CDI) est désormais instituée entre les trois versants de la fonction publique. 
• La rupture conventionnelle apparaît dans le secteur public de manière expérimentale entre début 2020 et fin 2025 et donnera lieu au versement d’une indemnité, qui sera définie par décret. 

6 Égalité professionnelle 
Les mesures contenues dans l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 30 novembre 2018 sont intégrées dans le titre V de la loi.
• L’État, les hôpitaux, les collectivités territoriales et les EPCI de plus de 20 000 habitants doivent élaborer et mettre en œuvre, avant le 31 décembre 2020, un plan d’actions pluriannuel.
• Les employeurs publics doivent mettre en place un dispositif de signalement des agents s’estimant victimes «d’un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes ».
• D’autres mesures visent à favoriser l’insertion professionnelle et les parcours professionnels des personnes en situation de handicap. 
Les textes d’application seront publiés dans les six prochains mois (environ 50 décrets sont attendus). Des ordonnances touchant à la formation, à la santé et au dialogue social sont également prévues. 

En savoir +     
• Loi n° 2019-831 du 6 août 2019 de transformation de la ­fonction publique, JO du 7 août 2019.
• Décryptage des articles relatifs à la fonction publique territoriale co-rédigé par l’AMF, le CNFPT et la FNCDG. www.amf.asso.fr (réf. BW39564).

Tout savoir sur les évolutions
Une première journée d’information est proposée aux cadres territoriaux et élus locaux le 10 septembre, à l’AMF. Elle marquera le début d’une série de rencontres organisées à Paris et en région jusqu’à la mi-novembre par l’AMF, le Centre national de la fonction publique territoriale et la Fédération nationale des centres de gestion. Objectif : décrypter les principaux points de la réforme et analyser ses répercussions sur la gestion des RH. Les associations départementales de maires ont été invitées à s’associer à l’organisation de ces journées. https://info-cnfpt.fr/ViewOnline.php?&emtr=4265-499892-JmKkSmL-2&extc=JmKkSmL


Avis d’expert
Christophe Iacobbi
,
maire d’Allons (04) et membre de la commission FPT et RH de l’AMF
« La commission FPT et RH de l’AMF s’est fortement mobilisée pendant l’élaboration du projet de loi de transformation de la fonction publique. Des propositions et des amendements déposés par l’AMF, et soutenus par la Coordination des employeurs publics territoriaux, ont été retenus. Nous n’allons pas nous arrêter là. Nous allons mettre à profit les mois devant nous, dans l’attente des décrets et ordonnances, pour être de nouveau force de proposition. Dans cette optique, un groupe de travail devrait se constituer sur les sujets de la santé au sein de la commission FPT et RH. Les employeurs territoriaux rencontrent, en effet, des difficultés en matière de ­prévention et de gestion du risque santé. Nous serons très vigilants sur la protection sociale complémentaire des agents, compte tenu d’un contexte budgétaire contraint. Sans avoir la maîtrise de l’échéancier des décrets et ordonnances, le président François Deluga devait réunir la commission FPT et RH de l’AMF le 10 septembre pour évoquer tous ces points. Lors du prochain Congrès de l’AMF, un forum sera tiendra, le 20 novembre, et permettra aux employeurs publics de bien appréhender les évolutions de la fonction publique territoriale après le vote de la loi. »
 
Emmanuelle QUÉMARD
n°371 - septembre 2019