Petite Souris photographie
Delphine Labails, maire de Périgueux (24) et co-présidente de la commission éducation de l'AMF.
La préparation de la carte scolaire 2021-2022 vient, comme de coutume à cette période, sur le haut de la pile des dossiers des maires. Mais l’ambiance est moins sereine que l’an passé. Un consensus prévalait en 2020 entre le gouvernement et les élus, en faveur d’un moratoire sur les fermetures de classes ou d’écoles, compte tenu du contexte sanitaire. Cette année, les premières remontées d’information en provenance des associations départementales de maires alertent sur de possibles tensions. « Dans plus de 20 départements ruraux, le dialogue est compliqué », précise Delphine Labails, maire de Périgueux (24) et co-présidente de la commission éducation de l’AMF, avec Frédéric Leturque, maire d’Arras (62). Ce dernier avait, dès février, demandé à l’inspecteur d’académie de reconduire un moratoire sur les fermetures dans son département, « car tout le monde est assez perturbé », explique-t-il. Dans un contexte sanitaire imposant des effectifs moins nombreux dans les classes, les élus peinent à comprendre la logique de décisions favorisant au contraire la concentration des élèves. Deux autres dossiers sont notamment à l’ordre du jour. Le premier concerne l’impact de la Covid-19 sur l’organisation du temps périscolaire (matin, midi, soir, restauration, etc.) et scolaire (mise à disposition de locaux, de matériels, etc.). Selon les élus, l’État doit tirer les leçons des « difficultés » vécues localement par les maires, soumis à « des injonctions tardives et parfois paradoxales » et confrontés à « un dialogue faible, pour ne pas dire inexistant » avec l’Éducation nationale, explique Delphine Labails.
Le second dossier porte sur la scolarisation à domicile. Le projet de loi confortant le respect des principes de la République, examiné, en avril, par le Sénat, soumet cette possibilité à un régime d’autorisation et implique les maires dans son contrôle (
lire l'article " Contrôler l'instruction à domicile "). Comme le résume Delphine Labails, « nous devons organiser l’enquête sur les conditions de scolarisation et le projet de la famille mais cela arrive trop tard dans l’année, en fin d’année scolaire le plus souvent. Nous demandons donc que l’enquête soit un préalable à l’autorisation ». Les maires demandent aussi à être mieux épaulés par l’État dans cette mission (notamment sur le plan méthodologique), voire dotés de moyens pour les plus petites communes. Parmi les autres sujets figurent la décision du gouvernement de développer, à la rentrée prochaine (en nombre et fréquence), le petit-déjeuner gratuit à l’école ; la « consultation participative citoyenne sur le bâti scolaire » (
batirlecole.education.gouv.fr), lancée par le gouvernement sans concertation avec les associations d’élus (
www.amf.asso.fr, réf. BW40618), dont les résultats devaient paraître le 8 avril ; l’organisation des tests salivaires à l’école, depuis mars. Delphine Labails a assisté aux tests d’une classe de CM2. « Vingt minutes pour que des enfants réussissent à saliver dans un tube de 1,5 cm de diamètre ! », constate l’élue, dubitative sur l’intérêt de la mesure.
Numérique à l'école : un bilan contrasté
Les outils numériques à l’école ont montré leur limite. C’est la principale conclusion de la Cour des comptes, dans son étude sur « La contribution du service public numérique éducatif à la continuité scolaire pendant la crise sanitaire », et notamment durant le confinement. La Cour a choisi de se pencher sur cette question dans le cadre de son rapport annuel, rendu public le 18 mars. Elle rappelle que ce service public, créé en 2013, « avait pour vocation le développement des usages numériques dans la classe pour une pédagogie plus active, participative et différenciée », mais qu’il « n’a jamais été pensé pour offrir à plus de 12 millions d’élèves un enseignement à distance en période de confinement, comme ce fut le cas à compter du 16 mars 2020 ». Ce qui s’est ressenti dans les faits.
Au-delà des lacunes propres aux outils, la Cour critique « l’insuffisance du travail collectif au sein des équipes pédagogiques », « la place trop réduite du pilotage local par les chefs d’établissement », « la faiblesse des moyens d’accompagnement à leurs côtés ». Pour pallier ce manque d’« organisation collective », elle fait quatre recommandations, au premier rang desquelles la mise en place « d’un socle numérique de base dans les écoles, collèges et lycées » et d’un plan de continuité pédagogique opérationnel par établissement.
n°389 - AVRIL 2021