Force est en effet de reconnaître que nombre d’élus locaux, pour ne pas dire la plupart des conseillers municipaux, ignorent encore aujourd’hui l’existence de leur droit à la formation et de ses conditions d’exercice. « Lorsque j’ai été élue, je n’avais absolument aucune idée de mes droits dans le cadre du statut de l’élu », confie en ce sens Élodie Taillandier, professeure des écoles et adjointe au maire de Champhol (28) depuis les dernières municipales. La loi prévoit pourtant qu’« une formation est obligatoirement organisée au cours de la première année de mandat pour les élus ayant reçu une délégation » (art. L.2123-12 du CGCT) ainsi que l’obligation pour les assemblées délibérantes de débattre chaque année sur la formation de leurs membres. Enfin, la formation des élus peut être financée soit au travers du budget « formation » des élus par la collectivité, soit au titre du DIFE géré par la Caisse des dépôts (CDC). « Comme dans de nombreuses situations, si l’on ne creuse pas nous-mêmes, on ne sait pas quels sont nos droits. J’ai notamment découvert l’existence du DIFE lors d’une formation organisée par l’association des maires de mon département », poursuit l’élue. « En tant qu’élus municipaux, nous devrions en principe avoir de moins en moins de domaines de compétences à gérer puisque la plupart des décisions se prennent au niveau des EPCI. Mais encore faut-il connaître l’articulation des compétences entre les communes, les intercommunalités, les syndicats divers, le conseil départemental, le conseil régional, la préfecture… Difficile de s’y retrouver pour les nouveaux élus de notre équipe ! », témoigne, pour sa part, Patrice Cartier, premier adjoint au maire du Val-de-la-Haye (76). Pour lui, « le droit à la formation des élus n’est pas assez connu et, quand il l’est, il n’est pas toujours aisé à mettre en œuvre notamment parce que cela nécessite un minimum de disponibilité et de concilier cela avec son activité professionnelle ». Depuis son entrée en fonction, Patrice Cartier s’est renseigné : « si j’ai bien compris, les frais de formation ne coûtent rien aux élus. Ils peuvent être pris en charge soit sur le budget formation des élus, ce qui me semble assez peu fréquent à en croire les échanges avec mes collègues d’autres communes, soit via le DIFE financé par la CDC ». Un message reçu cinq sur cinq par l’élu qui a pris connaissance des conditions d’exercice de son droit à la formation grâce au Statut de l’élu(e) local(e), édité par l’AMF (www.amf.asso.fr, réf. BW7828). Selon Patrice Cartier, « les règles à connaître relatives à la comptabilité publique, aux appels d’offres, à la mise en concurrence, aux questions liées à internet et à la gestion des réseaux sociaux font sans aucun doute partie des principaux besoins de formation des élus municipaux en début de mandat ».
Parmi les thèmes les plus fréquemment retenus par les élus locaux, on trouve ainsi des formations générales sur le mandat (la fonction de maire, la responsabilité civile et pénale, l’environnement institutionnel, l’intercommunalité, etc.), des formations plus techniques (élaborer un budget municipal, les règles des marchés publics, l’urbanisme, les pouvoirs de police, la gestion des cimetières, etc.) ou des formations sur le « savoir-être » (prendre la parole en public, faire face à un conflit, etc.). « Depuis le renouvellement municipal, communautaire et métropolitain, nous observons une très forte demande de formation de la part des élus », relève Claire Peigné, maire de Morancé (69, lire ci-dessous). L’édile observe en outre que « les demandes de formation sont très différentes entre les nouveaux élus et ceux qui poursuivent leur mandat ». « D’une manière générale, ces demandes s’articulent aussi bien autour des compétences du bloc communal (finances, urbanisme, fonctionnement des collectivités, etc.) que du développement personnel (gestion d’une réunion, prise de parole en public, etc.) ». Consciente de la nécessité d’encourager son équipe à se familiariser avec le droit à la formation dès la première année du mandat, Claire Peigné a, « en tant que maire, souhaité que son conseil municipal puisse bénéficier d’un séminaire d’une journée sur le fonctionnement du conseil municipal et les finances locales. Ce fut une journée studieuse qui a également permis de souder l’équipe », témoigne-t-elle. Et la démarche semble avoir porté ses fruits : « Après ce séminaire, les élus municipaux ont déjà participé à plus de 17 autres sessions ! ». Pour l’heure, les élus locaux peuvent se former auprès de l’un des 220 organismes agréés par le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales après avis du Conseil national de la formation des élus locaux. Les organismes officiellement agréés se répartissent, pour un tiers, entre les structures privées, pour un autre tiers, entre les associations d’élus (nationales et départementales). Le reste est constitué des structures d’enseignement (université, école) ou encore, pour une très faible part, par des partis politiques. « Les nouvelles élues ont, de fait, une aspiration plus forte à la formation », selon le rapport interministériel de janvier 2020. Avec désormais 42,4 % de femmes siégeant dans les conseils municipaux, les élues municipales sauront montrer l’exemple à leurs homologues masculins !