L'actu
02/02/2021
Écoles, éducation, alimentation

Éducation prioritaire, école rurale : expérimentations

L'État souhaite redonner des moyens là où ils peuvent faire défaut. L'AMF livre ses premières réactions. Par Emmanuelle Stroesser

Selon Frédéric Leturque, co-président de la commission éducation de l'AMF, il ne faudrait pas que l'expérimentation remette en cause la carte de l'éducation prioritaire.
Dans la perspective d’une « nécessaire évolution » de l’éducation prioritaire, l’État a décidé de lancer une expérimentation. L’enjeu est de « gommer les imperfections » du système actuel, constitué de REP et REP+, afin que certains publics, notamment de lycées professionnels, ne soient pas mis de côté (70 % de leurs élèves viennent de territoires prioritaires). L’État veut aussi résoudre le problème des écoles dites « orphelines », et intégrer des écoles « socialement proches » de l’éducation prioritaire ou «ayant des besoins d’accompagnement particuliers identifiés ». L’expérimentation, qui débutera en septembre prochain, va prendre la forme de contrats locaux d’accompagnement (CLA), à ne pas confondre avec les CLAS (pour l’accompagnement scolaire). La secrétaire d’État à l’Éducation prioritaire, Nathalie Elimas, les avait annoncés en novembre. Trois académies sont concernées : Aix-Marseille, Lille et Nantes, qui ont des « caractéristiques sociales, géographiques et économiques très différentes ». Sous réserve des résultats de l’expérimentation, le gouvernement envisage une généralisation du dispositif à la rentrée 2022. Le CLA sera signé entre un établissement et l’Éducation nationale. En pratique, cela pourra débloquer, ici, un poste dédié pour l’accueil d’enfants de saisonniers sur un temps limité, là, des temps de décharge, cite, en guise d’exemples, le ministère de l’Éducation ­nationale. « C’est donc plus un outil au service des enseignants et du projet d’établissement que du ­territoire, pointe Delphine Labails, maire de ­Périgueux (24), et co-présidente de la commission éducation de l’AMF. Mais tout ce qui ­permet de maintenir un tissu d’écoles en proximité est une bonne mesure. » Son homologue à la présidence de la commission éducation de l’AMF, le maire d’Arras (62), Frédéric Leturque, est ravi, « car je dénonçais depuis longtemps ce système qui écartait certains établissements ». Il apporte toutefois quelques réserves : il ne faudrait pas «que cela remette en cause la carte de l’éducation prioritaire. Le ministère nous a rassurés sur ce point, mais nous resterons vigilants ». Autre point souligné par l’élu : « Ce sera à nous de nous mobiliser pour défendre des moyens supplémentaires. » Car la question du financement reste encore la grande inconnue. Seule promesse du ministère : les crédits ne seront pas pris sur le budget de l’éducation prioritaire. L’autre « rôle de l’AMF sera de veiller à ce que cela n’entraîne pas de concurrence entre les ­territoires », ajoute Delphine Labails.

 

" Territoires éducatifs ruraux " : renforcer la coopération
Le gouvernement a présenté, le 18 janvier, une autre expérimentation qui touche cette fois spécifiquement la ruralité. Sur le modèle des cités éducatives, développées dans les quartiers politique de la ville, elles doivent permettre «de constituer un réseau de coopération autour de l’école » pour offrir «un égal accès d’un service public de grande qualité pour tous ». Les enfants réussissent bien dans les écoles rurales, « même mieux », relève le ministère de l’Éducation nationale, « mais ils n’enclenchent pas d’études », par manque d’ambitions et en raison des contraintes de mobilité. Il s’agit donc de redonner de l’« ambition scolaire » et de « l’attractivité » en créant des « alliances éducatives ­territoriales » autour des jeunes (de 3 à 25 ans). En pratique, là encore, trois académies (Normandie, Amiens, Nancy-Metz) serviront de test (155 écoles en tout). Des objectifs pédagogiques et éducatifs vont être définis. Le calendrier est serré, car si l’expérimentation doit démarrer en février, un premier bilan est attendu pour juin afin d’envisager un premier déploiement à la rentrée prochaine. Delphine Labails et Frédéric Leturque insistent d’ores et déjà pour que les maires puissent être « dès le départ dans la boucle », de la conception à l’évaluation. « Parce que nous pouvons apporter l’ingénierie que les petites écoles ne pourront pas mobiliser », souligne la maire de Périgueux (24).
n°387 - FEVRIER 2021