Renforcer la « force de frappe » du CdR et améliorer son ancrage dans les territoires ont été son combat quotidien durant deux ans. Il l’a conduit partout en Europe, et notamment en France où il se souvient de sa participation à une manifestation commune des maires, départements et régions en marge du Congrès des Régions de France, en 2018, à Marseille. « J’ai rarement vu une séance aussi animée, ça m’a beaucoup appris sur la vivacité des collectivités territoriales dans un État qui reste aussi centralisé que la France. » Temps fort de son mandat : la montée en puissance du débat sur le budget de l’UE et la place de la politique de cohésion et de la politique agricole commune. «Certains qualifient la politique de cohésion de politique du passé. Nous nous inscrivons totalement en faux », s’insurge Karl-Heinz Lambertz. Le CdR s’est notamment battu pour que la catégorie des «régions en transition », chère à la France, soit préservée dans la future politique de cohésion après 2021. Un combat qui n’était pas gagné d’avance alors que certains États défendent une politique davantage concentrée sur les territoires les moins développés de l’UE. «Il faut rester vigilant, prévient le Belge. Dans le sprint final, il y a toujours des gens qui viennent avec des compromis surprenants. »
Le CdR plaide pour une hausse des taux de cofinancement européen – qui allègent la part que les collectivités doivent investir. Surtout, « il faut que l’on rende assez flexibles les règles du pacte de stabilité. Si tout cela n’est pas cohérent, les collectivités, qui réalisent une grande partie des investissements publics en Europe, ne peuvent agir. »
Le CdR partage une autre préoccupation des collectivités françaises : le resserrement du lien urbain-rural. Cela fait longtemps que les élus français réclament un « agenda rural » au niveau européen, sur le modèle de l’agenda urbain.
Pour Karl-Heinz Lambertz, « il faut faire autre chose de l’Europe rurale qu’un endroit de loisirs ou un endroit périphérique. Il y a une crainte sur leur avenir alimentée par ce que les gens vivent dans ces territoires : moins d’infrastructures collectives, une moins bonne couverture télécoms, pas de travail… Et cela entretient la montée du populisme en Europe ».
Le grand rendez-vous pour le CdR sera la Conférence sur l’avenir de l’Europe lancée au printemps pour réfléchir à l’avenir de la démocratie européenne. S’il entend bien sortir renforcé de cette vaste réflexion, il se garde d’avancer des revendications précises à ce stade. « Nous avons des idées. Pour l’instant, nous devons surtout nous assurer d’être à la table des discussions. » Pour Karl-Heinz Lambertz, le passage par les collectivités est « sans aucun doute » le moyen le plus assuré d’asseoir un « dialogue permanent » entre l’Europe et ses citoyens. « Vous avez 100 000 maires en Europe, 1 million de mandataires élus qui s’occupent de la chose publique tous les jours. Ce sont eux qui restent après que la caravane des commissaires et des ministres est passée dans les territoires. C’est d’eux dont dépend l’ancrage des politiques européennes. Il faut donc vraiment privilégier la dimension territoriale dans la manière de fonctionner en Europe. »
Isabelle SMETS
(1) Le CdR est le porte-voix des intérêts des collectivités locales et régionales de l’Union européenne auprès de la Commission européenne et du Conseil, auxquels il transmet des avis sur les nouveaux actes législatifs.