Dossiers et enquêtes
01/06/2020
Votre mandat

Les premières décisions du mandat 2020-2026

Les 30 139 conseils municipaux et 154 EPCI élus au complet le 15 mars ont pu procéder à leur installation fin mai-début juin, tandis que 4 922 communes et 1 100 EPCI attendent la tenue du second tour de l'élection municipale fixée au 28 juin. Dans ce dossier spécial, Maires de France synthétise les principales décisions devant être prises en début de mandat.

Le conseil municipal des communes de 1 000 habitants et plus doit adopter son règlement intérieur dans les six mois qui suivent son installation. Ce document fixe les règles de fonctionnement de l'assemblée délibérante.
La crise sanitaire a particulièrement chahuté la transition électorale de ce printemps 2020, qui a vu la prorogation du mandat des équipes sortantes jusqu’à fin mai alors que l’élection était acquise dans 30 139 communes, tandis que 4 922 communes attendent la tenue du second tour de l’élection municipale fixée au 28 juin au moment où nous rédigeons ces lignes. Elle a aussi illustré le rôle clé des maires, et souligné, si besoin était, la difficulté et la complexité croissantes de l’exercice du mandat. Le gouvernement a vanté le «couple maire-préfet », pierre angulaire de la gestion de l’épidémie avec, bien sûr, les soignants. Les Français ont applaudi ces derniers chaque soir, pendant plusieurs semaines. Ils auraient pu en faire autant pour les élus et les nombreux bénévoles mobilisés. À chaque consultation, ils plébiscitent leurs maires, dans lesquels ils placent constamment leur confiance mais aussi leurs attentes, de plus en plus exigeantes. Nul doute que leur rôle essentiel dans la gestion du covid-19 aura renforcé un peu plus cette image de dévouement et de fiabilité chez leurs administrés. 
Et maintenant ? Fatigués pour la plupart d’entre eux, les élus entament (enfin) le mandat 2020-2026 dans un contexte sanitaire encore incertain. La crise épidémique, doublée d’une crise économique, a pompé beaucoup d’énergie. Elle a aussi coûté beaucoup d’argent aux collecti­vités, rendant difficile l’élaboration du budget, grevant d’entrée de jeu les marges de manœuvre (certaines communes pourraient être en défaut de paiement), contraignant les équipes municipales à modifier leurs projets. Elle gèle l’engagement de projets dans les communes et EPCI en attente du second tour. Premiers investisseurs publics, les élus locaux souhaitent soutenir leur tissu économique, investir pour entretenir et créer de nouveaux équipements, développer de nouveaux services à la population. Mais le confinement a amoindri leurs recettes fiscales (impôts économiques, DMTO, taxe d’aménagement, octroi de mer dans les Outre-mer, versement transport pour les autorités organisatrices de la mobilité…) et tarifaires avec la fermeture, notamment, des services publics et leur lente relance depuis le 11 mai, tandis que la taxe de séjour est réduite à la portion congrue dans les communes touristiques, du littoral et de montagne (lire pp. 26-28). Ces pertes concernent les produits 2020 mais, plus encore, ceux de 2021. 

20 Mds€     C’est, selon les estimations les plus pessimistes de Bercy, le coût de la crise sanitaire sur trois ans pour l’ensemble des collectivités (pertes de recettes fiscales notamment). Ces pertes cumulées pourraient, selon l’AMF, conduire à une baisse «d’au moins 20 % » de la capacité d’autofinancement des communes et des EPCI.

Impact financier et institutionnel de la crise

AMF en tête, qui s’inquiète du risque de « baisse brutale de la capacité d’autofinancement » des communes et des EPCI, de l’ordre de « 20 % », les associations d’élus négocient avec l’État une juste compensation des dépenses engagées et des pertes de recettes, en demandant une «nationalisation des pertes ». Tous les voyants sont au rouge : même si les chiffres s’affineront au fil des semaines, il semble que les estimations les plus pessimistes de Bercy – qui a parlé d’un coût de 20 MdsE sur trois ans pour l’ensemble des collectivités – soient « proches de la réalité », selon l’Observatoire de la gestion et des finances locales (OGFL). Le gouvernement a présenté, le 29 mai, un plan de soutien financier aux collectivités locales avec une « compensation » des pertes de recettes « fiscales et domaniales », un effort sur la dotation de soutien à l’investissement local et un mécanisme de « lissage » – sur trois ans – des dépenses liées à l’épidémie (lire p. 13). Sera-t-il suffisant ? Les élus en doutent.
Au-delà de son coût humain et financier, la crise a aussi relancé le débat sur l’approfondissement de la décentralisation et la gestion de proximité. « L’État ne peut pas tout, tout seul. Il faut sortir de cette relation hiérarchique et verticale entre l’État et les élus. Mais il y a un préalable : que l’État accède – et accepte – à une culture décentralisatrice », estime Martial Foucault, directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (lire ci-dessus). Le président de l’AMF, François Baroin, a plaidé, le 18 mai, pour une « grande politique » de décentralisation. « La santé est un sujet. Il faut en confier une bonne partie de la gouvernance (aux collectivités), conserver une ligne nationale de protection contre les épidémies et une adaptabilité, une territorialisation (…) On peut avoir le même raisonnement pour le logement, pour la culture, le sport », estime François Baroin dont la proposition est partagée par l’ADF et Régions de France. Le gouvernement relèvera-t-il le gant ? Le projet de loi « 3D » (décentralisation, différenciation, déconcentration), que d’aucuns considéraient tombé dans les oubliettes, revient dans l’actualité. « Je ne peux pas vous donner de date mais la crise a montré que les thématiques de ce texte sont d’actualité », a souligné Jacqueline Gourault, le 18 mai, devant les députés. L’ouvrage doit, de toute évidence être remis sur le métier.


Xavier BRIVET

 

trois questions à...  Martial Foucault,   
directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF)
«Les projets des maires seront impactés par la crise sociale»
Comment jugez-vous la gestion de la crise sanitaire ?
Cette crise a révélé la quasi faillite de notre État très centralisé. En mars et jusque début avril, l’État pensait pouvoir gérer seul l’épidémie, sans concertation avec les élus locaux. Ce modèle a vite trouvé ses limites. Cette crise, très hétérogène selon les territoires, appelait des réponses locales. La concertation et la coordination entre les préfets et les maires a été déterminante. L’État ne peut pas tout, tout seul. Les préfets doivent accepter de perdre une partie de leur pouvoir et les maires doivent être responsabilisés encore davantage. Il faut sortir de cette relation hiérarchique et verticale entre l’État et les élus. Mais il y a un préalable : que l’État accède – et accepte – à une culture décentralisatrice. 
Cette crise va-t-elle changer les relations entre l’État et les élus ?
Deux grands rendez-vous le confirmeront ou l’infirmeront. Le premier est financier : l’État sera-t-il présent aux côtés des collectivités pour les soutenir, notamment en 2021 où elles risquent de rencontrer des difficultés financières ? Leur donnera-t-il les moyens d’agir, sera-t-il solidaire de leur endettement ? Le deuxième rendez-vous est institutionnel : le projet de loi «3D » sera-t-il un texte véritablement audacieux et ambitieux pour approfondir la décentralisation ? Allons-nous sortir d’une décentralisation jacobine, et donner plus de compétences aux collectivités en renforçant leur autonomie financière et fiscale ? 
Quel sera, selon vous, l’impact de cette crise sur le mandat 2020-2026 ?
Elle aura un impact sur toute la durée du mandat. Les maires se sont engagés sur des programmes et des projets qui seront percutés par la crise sociale. L’activité économique a chuté de 30 % dans tous les territoires. Les élus vont devoir réparer cette crise, prendre en charge les blessures et le dénuement d’une partie de leurs concitoyens. Espérons que cette situation et leurs difficultés financières ne les cantonnent pas dans le rôle de maires «gestionnaires ».       
Propos recueillis par X. B.

 



Les premières décisions du mandat 2020-2026

Confier les délégations, délibérer sur les indemnités, voter le budget…, Maires de France synthétise les principaux chantiers à engager.

Les 30 139 conseils municipaux élus au complet le 15 mars ont pu procéder à leur installation le 18 mai et à l’élection du maire et des adjoints, entre le 23 mai et le 28 mai, tandis que 154 EPCI dont les conseils municipaux ont été élus au complet le 15 mars devaient s’installer d’ici au 8 juin. La date du second tour pour les 4 922 communes concernées est fixée au 28 juin à l’heure où nous écrivons ces lignes. Dans les 3 253 communes de moins de 1 000 habitants où le conseil municipal n’a pas été élu au complet, le mandat des conseillers élus le 15 mars prendra effet à l’issue du second tour. 
Après la première réunion d’installation des conseils municipaux, les élus doivent très vite préparer les premières décisions que les exécutifs communaux et intercommunaux ont à prendre en début de mandat. Confier les délégations, désigner les représentants de la commune au sein des syndicats et des principaux établissements de la commune, délibérer sur les indemnités, adopter le règlement intérieur, adopter le budget et prendre les premières décisions budgétaires et fiscales (si le budget n’a pas été voté avant le scrutin), constituer les commissions municipales et intercommunales, récoler les archives municipales et intercommunales, établir un état des lieux de la situation financière de la collectivité, des marchés et contrats publics en cours. Maires de France propose, de façon très synthétique, un tableau de bord des décisions devant être prises en début de mandat. Elles sont toutes détaillées dans le Guide du maire 2020 et dans le Guide du président et des élus de l’intercommunalité, documents de référence rédigés par l’AMF (lire ci-contre).

1 Confier les délégations
Bien que les textes ne fixent pas de délai impératif pour confier les délégations, celles-ci doivent être décidées au plus tôt, pour des raisons évidentes de fonctionnement opérationnel. Il y a plusieurs types de délégations : du conseil municipal au maire, du maire aux adjoints et conseillers municipaux, du maire au personnel. Pour les premières, outre les attributions que le maire est chargé d’exécuter sous le contrôle du conseil municipal, il peut se voir déléguer certaines des responsabilités attribuées au conseil municipal (limitativement énumérées par le Code général des collectivités territoriales). 
S’agissant des délégations du maire aux adjoints et conseillers municipaux, rappelons qu’elles sont nominatives, que le maire doit prendre des arrêtés pour les préciser, que ces arrêtés doivent être publiés, affichés et transcrits sur le registre des arrêtés. Le maire peut confier librement des délégations aux adjoints comme aux conseillers municipaux, sans avoir à consulter le conseil municipal, sans avoir à tenir compte de l’ordre du tableau. Le droit de priorité accordé auparavant aux adjoints dans l’attribution des délégations a été supprimé. 
Attention : seuls les adjoints et les conseillers municipaux délégués peuvent percevoir une indemnité de fonction. Un maire peut toujours intervenir dans un domaine qu’il a délégué à un adjoint ou à un conseiller municipal. Il reste responsable de toutes les décisions prises dans ce cadre. Les délégations subsistent tant qu’elles ne sont pas retirées par le maire. Ce dernier peut y mettre fin à tout moment, de manière discrétionnaire et sans avoir à le motiver, mais il ne peut le faire dans un but autre que l’intérêt de la commune. Les maires et les adjoints sont «ès qualités », dès leur élection, sans procédure de délégation, officiers de police judiciaire et officiers d’état civil. 
Sur la délégation du maire au personnel, les agents communaux ne peuvent recevoir que des délégations de signature ou des délégations spécifiques : les textes définissent précisément les tâches pour lesquelles elles sont possibles et les agents à qui elles peuvent être données. 
À noter : l’ordonnance n° 2020-562 du 13 mai 2020 (JO du 14/05) prolonge le régime dérogatoire de délégations jusqu’au 10 juillet (date de la fin de l’état d’urgence sanitaire) dans les 4 922 communes où le conseil municipal n’a pas été élu au complet (et dans les 1 100 intercommu­nalités dont au moins une commune membre attend encore le second tour). 
Une ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 a en effet donné aux maires des pouvoirs renforcés pendant l’état d’urgence sanitaire (1) : il doit, par délégation et de plein droit, exercer presque toutes les attributions mentionnées à l’article L.2122-22 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), à l’exception de la réalisation des emprunts destinés à l’investissement qui nécessite toujours une délibération. Ce texte a également permis des délégations de droit au président d’intercommunalité.
En revanche, dans les 30 139 communes qui ont élu leur maire et leurs adjoints entre le 23 et le 28 mai, «les maires nouvellement élus (…) bénéficieront du régime de droit commun des délégations ». Il en est de même pour les 154 EPCI qui doivent s’installer d’ici au 8 juin.

En savoir +
• L’AMF a créé un dossier « Mandat communal et intercommunal 2020 – 2026 » qui synthétise toutes les informations utiles pour l’exercice du mandat. Il comprend notamment le Guide du maire 2020. www.amf.asso.fr
• Note de la DGCL du 20 mai sur les 
1res mesures à prendre après l’installation des conseils municipaux et communautaires. www.amf.asso.fr (réf. BW40150).
Égalité femmes-hommes : l’AMF mobilise les élus
Dans un communiqué diffusé le 6 mars, l’AMF invite les exécutifs municipaux et intercommunaux à s’emparer de la question de l’égalité entre les femmes et les hommes dès «les premières semaines du mandat ». Elle a publié un «Mémento » sur ce sujet (1). Cette publication fait suite à la signature, lors du dernier Congrès des maires, de « l’engagement de l’AMF contre les violences faites aux femmes ». Cet engagement invite notamment les collectivités à «désigner un élu référent », à mener une vaste campagne de communication sur ce sujet, à créer des groupes de travail au sein des associations départementales de maires. 
(1) www.amf.asso.fr (réf. BW39945).

 

2 Désigner les représentants de la commune 
Au sein des EPCI à fiscalité propre

La date limite d’installation de l’organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) est le 8 juin pour les 154 EPCI dans lesquels toutes les communes ont élu leur conseil municipal au premier tour, le 15 mars. 
Dans les 1 100 EPCI dans lesquels au moins une commune connaîtra un second tour, une phase transitoire s’est ouverte entre la date d’entrée en fonction des conseillers municipaux et communautaires issus du premier tour, et l’élection de ceux issus du second tour (2). Au cours de cette phase, « siègent » les nouveaux conseillers communautaires (élection définitive au premier tour) et une partie de ceux élus lors du mandat précédent (communes qui doivent encore organiser un second tour). Le conseil communautaire est donc mixte. 
Mais il est possible qu’il ne se réunisse pas. L’ordonnance n° 2020-562 du 13 mai 2020 (JO du 14/05) visant à adapter le fonctionnement des institutions locales à la prolongation de l’état d’urgence sanitaire a en effet corrigé un oubli de l’ordonnance du 1er avril. Cette dernière avait suspendu la règle selon laquelle le conseil municipal doit se réunir au moins une fois par trimestre, mais pas celle imposant une réunion trimestrielle des conseils communautaires. Désormais, ils en sont par conséquent temporairement dispensés eux aussi. Dans ces conseils communautaires provisoires, l’ensemble des membres du bureau sortant sont maintenus en fonction, qu’ils aient conservé leur mandat ou pas, y compris le président, qui a quasiment tous pouvoirs jusqu’à l’installation du nouveau conseil communautaire, après le second tour. Une situation qui deviendra cependant difficile à gérer si le second tour n’a pas lieu en juin… Le cas échéant, si la période transitoire devait perdurer, il faudra sans doute que le gouvernement revoie les principes de fonctionnement de ce conseil communautaire provisoire. 
En attendant, si une réunion du conseil communautaire se tient, les membres de l’exécutif ayant perdu leur mandat (parce qu’ils ne sont pas représentés ou parce qu’ils ont été battus) siègeront, mais ils ne seront pas comptabilisés dans le quorum et n’auront pas le droit de participer aux votes.

Au sein des syndicats de communes et des syndicats mixtes
Chaque conseil municipal doit élire ses délégués appelés à siéger dans les comités des syndicats de communes et des syndicats mixtes auxquels la commune appartient. Ces délégués, choisis parmi les membres du conseil municipal, sont élus au scrutin secret à la majorité absolue. Dans ces conditions (vote à bulletin secret), la réunion au cours de laquelle cette désignation est effectuée ne peut pas avoir lieu par téléconférence ou vidéo-conférence. Rappelons qu’à défaut d’avoir désigné ses délégués, la commune est représentée au sein du comité par le maire si elle ne compte qu’un délégué, par le maire et le premier adjoint si elle en compte deux. Au moment où nous publions cet article, les dates limites pour tenir la première réunion de l’organe délibérant des syndicats de communes et syndicats mixtes, ouverts ou fermés, restent à clarifier mais pourraient s’étendre sur les mois de juillet, voire d’août. Le droit commun veut normalement que l’organe délibérant des syndicats de communes se réunisse au plus tard le vendredi de la quatrième semaine qui suit l’élection des maires et, pour les syndicats mixtes, le vendredi de la quatrième semaine qui suit l’élection de l’ensemble des présidents des établissements publics de coopération intercommunale membres du syndicat.

Dans les principaux établissements de la commune
Le conseil d’administration du centre communal d’action sociale (CCAS), présidé par le maire, doit être renouvelé dans les deux mois suivants l’élection. Il est composé en nombre égal de membres élus en son sein par le conseil municipal et de membres nommés par le maire parmi les personnes qualifiées participant à des actions de prévention, d’animation ou de développement social menées dans la commune. Le comité de la caisse des écoles, présidé par le maire, comprend, lui, deux conseillers municipaux désignés par le conseil municipal. Les textes ne fixent pas de délai légal impératif pour cette désignation.

4 922 communes et 1 100 EPCI attendent la tenue du second tour du scrutin municipal.
La dotation élu local majorée
Lors du 102e Congrès de l’AMF, l’État s’était engagé à ce que la dotation particulière élu local (DPEL) – qui permet notamment aux petites communes de payer les indemnités des élus – soit «doublée » dans les communes de moins de 200 habitants et augmentée de 50 % dans celles de 200 à 500 habitants. Or, le gouvernement avait imposé une condition supplémentaire pour percevoir la majoration, excluant 3 500 communes de son bénéfice. Lors de la discussion du deuxième PLFR au Sénat, en avril, un amendement – proposé par l’AMF – a été adopté : il augmente de 8 millions d’euros la DPEL de façon à «élargir le bénéfice de la majoration à l’ensemble des communes de moins de 500 habitants éligibles à la dotation élu local ». L’AMF a rédigé une note expliquant le dispositif (1).
(1) www.amf.asso.fr (réf. BW40006).

 

Rendez-vous avec le préfet et le procureur
Dès leur prise de fonctions et pendant ces six prochaines années, les maires sont officiers de police judiciaire (OPJ) et officiers d’état civil. Sous l’autorité du représentant de l’État dans le département, ils sont chargés «de la publication et de l’exécution des lois et règlements », «de l’exécution des mesures de sûreté générale » et «des fonctions spéciales qui lui sont attribuées par les lois ». Ces «attributions » (parmi d’autres) leur seront présentées en détail dans la foulée de leur élection, au cours d’une réunion animée par le préfet de département ou de région et le ou les procureurs de la République dont leur commune dépend. D’autres réunions thématiques pourront être organisées par les préfectures.

 

3 Délibérer sur les indemnités
Les indemnités des élus municipaux et communautaires sortants qui voient leur mandat prorogé (dans l’attente du second tour des élections) sont maintenues. Les nouveaux élus ne pourront bénéficier d’indemnités qu’à compter du début réel de leur mandat. Les délibérations indemnitaires doivent être prises dans les trois mois qui suivent l’installation des conseils municipaux. Elles doivent préciser que les indemnités du maire, des adjoints et des conseillers municipaux délégués sont versées à compter de la date de leur désignation, ce qui permet un versement dès l’entrée en fonction effective et ce, même si la délibération a été prise ultérieurement. 
La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a confirmé l’automaticité des indemnités de fonction des maires au taux plafond dans toutes les communes, sauf à ce qu’ils décident eux-mêmes de les moduler à la baisse. Elle a revalorisé les indemnités des maires et des adjoints dans les communes de moins de 3 500 habitants. Les conseillers municipaux délégués des communes de moins de 100 000 habitants peuvent bénéficier d’une majoration de leurs indemnités. Dans les communes et EPCI de plus de 50 000 habitants, les organes délibérants peuvent moduler les indemnités en fonction de la présence des conseillers. 
La loi du 27 décembre 2019 maintient le versement des indemnités de fonction, à compter du 1er janvier 2020, pour les présidents et vice-présidents de tous les syndicats intercommunaux et de tous les syndicats mixtes ouverts restreints et syndicats mixtes fermés, quel que soit leur périmètre. Le tableau récapitulant l’ensemble des indemnités versées doit être joint à la délibération. Le respect de l’enveloppe globale indemnitaire est impératif. Les communes et EPCI à fiscalité propre doivent présenter un état annuel de toutes les indemnités perçues par leurs élus qui doit être communiqué aux conseillers municipaux et communautaires avant le vote du budget. L’ensemble des nouvelles dispositions relatives aux indemnités sont détaillées dans la fiche pratique « Conditions d’exercice du mandat » à lire dans ce numéro, p. 51. Le Guide du maire fournit de nombreux détails sur la façon de procéder et les règles à respecter (notamment indemnité d’un adjoint ou d’un conseiller municipal qui ne peut en aucun cas dépasser l’indemnité du maire, le principe du plafond indemnitaire et de l’écrêtement…).

4 Adopter le règlement  intérieur
Toute commune de 1 000 habitants et plus doit se doter d’un règlement intérieur du conseil municipal, dans les six mois qui suivent son installation. Ce document fixe les règles de fonctionnement de l’assemblée délibérante. Il doit préciser de façon obligatoire les modalités d’organisation du débat d’orientation budgétaire, les conditions de consultation des projets de contrats ou de marchés, la fréquence, les règles de présentation et d’examen des questions orales, les modalités d’expression dans le bulletin municipal des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale, les règles dans les communes de 50 000 habitants et plus de présentation et d’examen de la demande de mission d’information et d’évaluation. Le règlement peut fixer, de façon facultative, d’autres règles relatives au fonctionnement du conseil.
Il appartient au nouveau conseil municipal d’établir ce règlement intérieur. Jusqu’à son adoption, l’ancien règlement continue à s’appliquer. Les communes de moins de 1 000 habitants sont invitées à en établir un également, mais elles n’en ont pas l’obligation.
À noter : les dispositions de l’ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 sur le fonctionnement des assemblées délibérantes continuent de s’appliquer pendant la durée de l’état d’urgence (jusqu’au 10 juillet inclus) : nouvelles règles du quorum (un tiers des membres au lieu de la moitié), possibilité de réunir l’organe délibérant à la demande d’un cinquième de ses membres, suspension de l’obligation de réunir le conseil municipal ou communautaire au moins une fois par trimestre, obligation d’informer les conseillers municipaux et communautaires élus au premier tour des décisions du maire ou du président de l’EPCI, organisation de visio ou audio-conférences, possibilité d’organiser les débats à huis clos, possibilité d’envoyer au préfet par voie électronique les actes en vue du contrôle de légalité, publication dématérialisée des arrêtés. 

Emplois fonctionnels et emplois de cabinet dans les collectivités
Le maire ne peut mettre fin au détachement d’un fonctionnaire sur un emploi fonctionnel (DGS, DGA, DST) qu’au terme d’un délai de 6 mois suivant soit la nomination de l’agent, soit l’élection du maire (lire dans ce numéro, la fiche p. 53). Pendant cette période de transition, le fonctionnaire peut rechercher une nouvelle affectation. La fin de détachement obéit à une procédure règlementaire : le maire doit motiver sa décision, s’entretenir avec l’agent, informer le conseil municipal et le centre de gestion ou le CNFPT. Les emplois de direction dits «fonctionnels » peuvent être pourvus par des fonctionnaires de catégorie A ou des contractuels pour les collectivités de plus de 40 000 habitants. 
En revanche, le maire ne peut nommer que des contractuels sur les emplois de cabinet. Il peut mettre fin à leurs fonctions en cours de mandat.  
À lire : le chapitre 3 du Guide du maire publié par l’AMF. www.amf.asso.fr
(réf. BW39956).
En savoir +
- La brochure « Statut de l’élu(e) local(e) » de l’AMF comprend l’ensemble des dispositions relatives aux conditions d’exercice des mandats locaux à jour au 25 mai 2020. Elle est régulièrement actualisée et les nouveautés par rapport à la version antérieure apparaissent en rouge. www.amf.asso.fr
(réf. BW7828).
- Les obligations des élus en début de mandat. En début de mandat, les élus ont des obligations personnelles que Maires de France rappelle dans ce numéro (p. 48), parmi lesquelles la déclaration de patrimoine et d’intérêts pour les maires et présidents d’EPCI concernés.
- Carte d’identité. La loi du 27/12/2019 «engagement et proximité » prévoit que les maires et les adjoints seront destinataires de la part de la préfecture d’une carte d’identité tricolore attestant de leurs fonctions (art. L.2122-34-1 du CGCT).

5 Premières décisions budgétaires et fiscales
Dans les communes et EPCI qui ne l’avait pas adopté avant le scrutin, la date limite pour l’adoption du budget primitif a été reportée au 31 juillet (3). Le vote du débat d’orientation budgétaire (DOB) peut intervenir lors de la même séance, mais doit faire l’objet d’une délibération séparée. La date butoir pour l’adoption du compte administratif est aussi le 31 juillet. La date de transmission du compte de gestion du comptable aux organes délibérants des collectivités et de leurs groupements est reportée au 1er juillet.
Les délibérations sur les taux et tarifs des impôts directs locaux (TFPB, TFPNB, CFE, TEOM, GEMAPI, etc.) devront être adoptées avant le 3 juillet. L’adoption du coefficient de la taxe locale sur la consommation finale d’électricité (TCFE) ainsi que l’institution et la fixation des tarifs de la taxe locale sur la publicité extérieure (TLPE) devront avoir lieu avant le 1er octobre 2020. La date permettant d’instituer la redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM) est décalée du 1er juillet au 1er septembre 2020. 

6 Constituer les commissions municipales
Le conseil municipal peut former des commissions permanentes ou temporaires. Il fixe le nombre des conseillers qui y siègent et les désigne, par vote à bulletin secret. Dans les communes de 1 000 habitants et plus, la représentation à la proportionnelle est obligatoire en leur sein. Présidées de droit par le maire, les commissions sont chargées d’instruire les dossiers soumis au conseil municipal et élaborent un rapport communiqué à l’ensemble du conseil, ce dernier étant seul habilité à prendre les décisions finales.
À noter : le rôle important de la commission communale des impôts directs (CCID), qui doit être constituée dans les deux mois suivant l’élection du conseil municipal.
Le conseil municipal peut également créer des comités consultatifs sur tout problème d’intérêt communal qui, cette fois, peuvent comprendre des personnes n’étant pas des élus, notamment des représentants des associations locales. Pour rappel, la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a ouvert la possibilité, pour les communes de moins de 3 500 habitants, de créer un conseil consultatif des habitants.
 
7 Récoler les archives
La responsabilité des archives municipales, au civil comme au pénal, fait partie de celles endossées par le maire lors de sa prise de fonction. Rapidement après l’élection, un inventaire des documents les plus importants conservés par la commune doit être dressé, accompagné d’un procès-verbal de décharge et prise en charge qui acte formellement le transfert de la responsabilité de l’ancien au nouveau maire. 
Ce document, établi en trois exemplaires (destinés au maire sortant, au maire entrant et au directeur des archives départementales), obéit à une classification spécifique. Le maire réélu n’est pas dispensé de cette tâche. Une fiche pratique publiée dans ce numéro (p. 54) détaille la mise en œuvre de cette obligation qui doit intervenir après l’élection du maire ou celle du président de l’EPCI.

8 Établir un état des lieux
Afin d’appréhender au mieux la gestion de la commune, le maire doit, dès le début de son mandat, disposer de certains indicateurs clés. Les principales données à connaître sont de trois ordres : données générales, indicateurs financiers, biens et contrats (marchés publics, délégations de services publics, baux d’habitation, baux commerciaux, baux ruraux, contrats d’assurances…). Le Guide du maire rentre dans le détail de chacun de ces aspects. Pour effectuer l’inventaire du patrimoine immobilier et mobilier, les informations contenues dans le document intitulé 
« Détermination et expression des besoins d’assurances », établi lors de la souscription de police d’assurance, permettent d’avoir une bonne vision de l’ensemble des biens appartenant à la commune. S’agissant des contrats en cours, il convient d’en faire un inventaire en veillant à lister, en particulier, les durées et les échéances de ces conventions, pour anticiper les délais des renouvellements et des résiliations.
      
Fabienne NEDEY et Xavier BRIVET

(1) Lire l’analyse juridique publiée dans Maires de France, n° 379, mai 2020, pp. 58-59. 
(2) www.amf.asso.fr (réf. CW40118) et circulaire du 15 mai 2020 sur https://bit.ly/2TLLUF4
(3) Lire la fiche sur les règles budgétaires et fiscales impactant les collectivités parue dans Maires de France, n° 379, mai 2020, p. 50.

 

Formation : l’AMF aux côtés des nouveaux élus
L’AMF accompagne les élus issus du scrutin municipal de 2020 et met à leur disposition son expertise pédagogique. Elle proposera pour cela une offre de formation spécifique qui s’attachera à les préparer à l’exercice de leur futur mandat. Conçue sous la forme d’un stage de 6 jours répartis sur plusieurs mois, à raison d’une journée par mois, cette formation leur permettra de se familiariser aux fondamentaux de l’exercice. Au programme : le fonctionnement du conseil municipal, les conditions d’exercice des mandats, les pouvoirs de police, les fondamentaux de l’intercommunalité, ceux de l’urbanisme, l’élaboration du budget, le maire manager. Les stages se dérouleront à Paris, dans les locaux de l’AMF, à partir de septembre. Une offre en distanciel est à l’étude. Elle pourrait être proposée à partir de mi-juin. Par ailleurs, aux élus cessant leur mandat en mars ou dont le mandat n’a pas été renouvelé, l’AMF propose, le 14 septembre, une formation leur permettant de faire le point sur les compétences acquises sur le mandat, afin de valoriser leur parcours d’élu local dans une perspective de reconversion.  Enfin, par l’intermédiaire de Mairie 2000, un vaste dispositif d’accueil est mis en œuvre sur le territoire national, en lien avec les associations départementales de maires. Ce dispositif a pour vocation de les sensibiliser à des thématiques majeures du début de mandat à travers des ateliers pédagogiques d’1h30 à 3h00. Ces ateliers, proposés depuis le mois de mai sous forme de cycles de visio-conférences, pourront être organisés en présentiel, de septembre 2020 à mars 2021. Pour compléter ces différents dispositifs, plusieurs cours en ligne seront accessibles gratuitement sur la plateforme de Mairie 2000, qui a subi une refonte totale afin d’être totalement opérationnelle dès le 23 mars. http://mairie2000.asso.fr

 

 

Les règles évolueront prochainement
La loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique prévoit que les règles de formation des élus seront redéfinies par une ordonnance dans un délai de neuf mois suivant la publication de la loi. L’AMF participera aux travaux de rédaction de ce texte.
Le conseil municipal doit délibérer dans les trois mois suivant son renouvellement «sur l’exercice du droit à la formation de ses membres » et voter un budget formation. De plus, en application de la loi 
« engagement et proximité », l’ensemble des communes, et non plus seulement celles de plus de 3 500 habitants, sont dans l’obligation «d’organiser une formation au profit de leurs élus titulaires d’une délégation au cours de la première année de mandat ». Cette obligation concerne les élus municipaux et intercommunaux.
 
n°380 - Juin 2020