Autre problème, soulevé par Pascal Bories, maire de Villeneuve-lès-Avignon (30) : «L’État n'est plus capable de nous donner une visibilité [sur le montant] des subventions. » La baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et les modalités de calcul de la dotation de solidarité rurale (DSR) sont aussi pointées du doigt. La DSR est calculée sur la longueur des voiries sans tenir compte de la situation géographique (altitude, météo, climat…), de l'importance des flux et du trafic de véhicules lourds affectant les communes.
Pour ajouter encore à la confusion, le mode de calcul de la longueur des voiries a changé depuis peu. Désormais, les voies retenues sont extraites des bases de données de l’Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), alors qu’auparavant le calcul se fondait sur les voies classées dans le domaine public communal, sur la base des éléments transmis par les communes aux préfectures. Or, dans certaines communes, les données ne correspondent pas à la réalité selon les élus. Un point soulevé par l’AMF auprès de la Direction générale des collectivités locales (DGCL).
Outre les routes, le bloc communal gère les ouvrages d’art afférents (ponts, passerelles, murs de soutènement, etc.), dans un état plus que préoccupant. Après l’effondrement du pont Morandi de Gênes en 2018, l’État a confié au Cerema, en 2021, la mission de recenser et d’évaluer les ouvrages d’art communaux (programme national ponts 1 et 2). Un bilan alarmant vient d’être publié : sur les 64 004 ouvrages recensés, seuls 28 % des ponts et 52 % des murs sont en bon état.
Pour aider les collectivités à financer les travaux (jusqu'à 60 % pour les communes de moins de 10 000 habitants), depuis septembre 2023 et jusqu’à la fin juin 2026, une nouvelle procédure, baptisée «PNP-Travaux », permet aux communes de solliciter une subvention pour des réparations ou la reconstruction d’un pont, qu’elles aient participé ou non au volet 1 ou 2 du PNP.
Le programme est doté d’une enveloppe de 44 millions d’euros. Une enveloppe «qui sera totalement consommée à la fin du premier trimestre 2026 », a indiqué un représentant du Cerema au forum. Mais il y a aujourd'hui des débats au Parlement pour réabonder cette enveloppe (50 millions d’euros dans le PLF 2026) ».
Une somme qui reste largement insuffisante pour l’AMF, qui a organisé avec le Cerema, en mai dernier, un webinaire sur les aides au bloc communal.
Autre sujet de préoccupation crucial pour le bloc communal, la politique des mobilités. Pour Sylvain Laval, maire de Saint-Martin-le-Vinoux (38) et co-président de la commission transports, mobilités, voirie de l’AMF, «aucune politique publique ne peut être conduite si on ne la coordonne pas avec l'enjeu du déplacement et de la mobilité. C’est pour cela qu'il faut bien réfléchir à la manière de l'organiser et de fixer son périmètre. »
Ce qui n’est pas chose aisée : la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019 a permis aux intercommunalités de prendre ou non la compétence d’autorité organisatrice des mobilités (AOM) à l’issue de délais (très) contraints (une communauté de communes sur deux environ l’a prise). Un «péché originel » pour Didier Mandelli, sénateur de la Vendée (85) et rapporteur de la LOM, qui mise sur la future loi-cadre – annoncée par le gouvernement pour début 2026 - pour corriger le tir.
Certaines intercommunalités qui n’ont pas pris la compétence et l’ont laissée aux régions, le regrettent, à l’instar d’Emmanuelle Favre, maire de Saint-Loubès (33) et vice-présidente de la communauté de communes Les Rives de la Laurence : «on a décidé de confier la compétence à la région, pensant qu'on faisait le bon choix pour que ça avance vite et bien. Aujourd’hui, nous n’avons toujours pas de bus à haut niveau de service, mais on nous demande si, pour un abri vélo, on préfère du bois ou du métal ! On se retrouve ainsi dépossédés sans possibilité de revenir en arrière. »
Un sujet central pour l’AMF, qui demande à l’Etat de rouvrir la possibilité, pour les intercommunalités volontaires, de prendre la compétence AOM, sur la base de son étude révélant que 75% des communautés de communes non AOM «se saisiraient ou étudieraient sérieusement la question de se saisir de cette compétence ». Avec précaution, néanmoins : «ll faut pouvoir rouvrir la compétence là où c'est nécessaire : tout le monde ne la demande pas, il ne faut pas revenir sur ce qui fonctionne », prévient Sylvain Laval.
Autre demande constante de l’AMF : repenser le versement mobilité qui finance les AOM. Prélevé sur les entreprises de 11 salariés et plus, son assiette défavorise les territoires peu denses. «Il y a un angle mort sur les enjeux de politique de proximité, selon Sylvain Laval. Ne faisons pas croire qu'une petite intercommunalité, qui n’a pas de bassin économique puissant et donc pas de recettes fiscales suffisantes, va pouvoir seule monter son réseau de transport. »
Pour aller plus loin :
. Lire nos articles " Financer la réparation ou la reconstruction d'un pont " , " Les communautés de communes se saisissent des mobilités "
. Retrouvez la vidéo du forum " Infrastructures et mobilités : répondre aux besoins de tous " dans le cadre du congrès
. Retrouvez l'interview-vidéo de Sylvain Laval, maire de Saint-Martin-le-Vinoux (38) et co-président de la commission transports, mobilités, voirie de l’AMF, intitulée " Remettre à plat le mode de financement de la route ", réalisée par Maire-info, dans le cadre du congrès
. Lire notre dossier spécial " 107e Congrès de l'AMF 2025 "