Le 20 novembre, lors du forum interactif «Maires et présidents employeurs », ils ont donc choisi de se montrer physiquement unis devant le ministre présent dans la salle. Une première, à un tel événement, pour la Coordination des employeurs territoriaux (CET, voir photo ci-dessous), créée en 2018 et composée de l’ensemble des associations et organisations d’élus employeurs et instances officielles de la fonction publique territoriale (voir ci-dessous). Une manière de rappeler qu’ils avaient bel et bien leur mot à dire dans les décisions relatives à la fonction publique. La CET parle d’une seule voix et négocie, au niveau national, des accords avec les organisations syndicales. Pour preuve, celui signé le 11 juillet 2023 sur la protection sociale complémentaire. Les employeurs territoriaux ont tenu à le signifier. Le ministre n’a pu tenir de discours officiel au forum.
Les échanges ont été fermes. « Nous sommes tous sur le même bateau », a tenté de se défendre Guillaume Kasbarian pour justifier ses décisions. On fait nation. On ne peut pas appeler à la responsabilité budgétaire et augmenter le point d’indice, la Gipa… Je sais que c’est très dur pour les communes. Nous devons faire des efforts pour préserver la santé financière de notre pays. » Une déclaration qui a fait bondir la secrétaire générale de l’AMF, Murielle Fabre, co-présidente de la commission FPT-RH de l’association. «Tous dans le même bateau ? Le budget de l’État n’est pas le budget des collectivités territoriales. Nous demandons un dialogue. Si nous sommes sur le même bateau, il faut des échanges. Nous avons besoin de payer justement, et non pas grassement comme on semble nous le reprocher, nos agents. »
La fonction publique se heurte en effet à un important problème d’attractivité. Les collectivités n’arrivent plus à recruter, ni à fidéliser. Le format du forum, choisi cette année, ne se prêtait pas à la tenue de discours : une séance de questions/réponses par smartphone entre maires sur leur vision de la FPT en 2024. Là aussi, une première ! Réponses sans appel : les moyens financiers et les règles juridiques constituent les principaux freins pour recruter. Une problématique à laquelle le ministre répond : «simplification, flexibilisation » sur le juridique, et travail sur les grilles indiciaires.
L’apprentissage est un autre sujet de dissensions. Le président du CNFPT, Yohann Nédélec, annonce avoir reçu 21 000 demandes de la part des collectivités. Insupportable financièrement pour l’établissement de formation : «Nous prenons déjà 13 millions d’euros sur notre budget général, en plus des 0,1% de cotisations versées par les collectivités. Or, l’État et France Compétences se désengagent du financement de l’apprentissage public, mais continuent de financer l’apprentissage dans le secteur privé. J’espère convaincre l’Etat de revenir sur cette décision et surtout j’aimerais comprendre pourquoi cette différence entre le public et le privé ».
Au moment du 106e Congrès, Yohann Nédélec avait vu son rendez-vous avec le ministre reporté à deux reprises, a-t-il révélé à la presse, et n’avait toujours pas, alors, de nouvelle date de fixée. Le ministre rencontrerait la CET le 11 décembre après la séance plénière du CSFPT. Mais les employeurs territoriaux attendent la confirmation.
Le sujet de la rénovation des concours semble davantage rassembler employeurs territoriaux et ministre. Les premiers reprochent aux épreuves d’être trop académiques et éloignées de la réalité du terrain, le second les a «dans le viseur ». Vincent Le Meaux, maire de Plouëc-du-Trieux (22), premier vice-président de la FNCDG, admet qu’il y a sans doute «des concours pour certains métiers à revoir. A-t-on besoin d’un concours pour recruter des musiciens, des infirmiers ? Les concours sur titre peuvent être des outils intéressants. Il faudra aussi professionnaliser certaines épreuves pour donner aux candidats les moyens de s’exprimer sur ce qu’ils font dans leurs collectivités ».
Le ministre a également promis de lancer rapidement la transposition de l’accord national signé le 11 juillet 2023 entre la CET et les organisations syndicales territoriales sur la protection sociale complémentaire (PSC). Ce travail se fera soit via une proposition de loi soit via un projet de loi en fonction de ce qui sera «le plus rapide ».
Un consensus semble également se dégager pour faire évoluer le statut de la fonction publique. Sans le remettre en cause. Les employeurs territoriaux sont «prêts à mener les chantiers nécessaires pour adapter la fonction publique aux besoins de la population et relever le défi des transitions, et seront force de propositions comme ils l’ont écrit dans leur contribution en octobre 2023 au précédent projet de réforme ou, plus récemment, dans un mémorandum adressé au nouveau ministre et resté à ce jour sans réponse », ont-ils appuyé dans un communiqué de presse publié le jour même.
Le dialogue de sourds entre les maires employeurs et le ministre a été conclu de manière vive par Yohann Nédélec, président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et co-président de la commission FPT-RH de l’AMF : «La fonction publique territoriale n’est pas à vendre ! »
Revoir la vidéo du forum: "Faire entendre la voix des maires et présidents employeurs"
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