La loi n° 2018-702 du 3 août 2018 avait accordé une dérogation aux communes membres des communautés de communes qui, au lendemain de la publication de la loi (soit au 5 août 2018) n’exerçaient pas, à titre optionnel ou facultatif, l’une des compétences «eau » et «assainissement ». Elle était également accordée aux communautés de communes qui, au 5 août 2018, exerçaient à titre facultatif seulement la compétence «assainissement non collectif ». Si, dans ces intercommunalités, 25 % des communes représentant 20 % de la population prenaient une délibération pour s’opposer au transfert de ces deux compétences, ou de l’une d’entre elles, le transfert était repoussé au 1er janvier 2026. En sachant que la décision devait intervenir au plus tard le 30 juin 2019.
La loi « engagement et proximité » du 27 décembre 2019 a prévu une double évolution de ces règles. D’une part, elle a accordé un délai supplémentaire de six mois (jusqu’au 31 décembre 2019) aux communes concernées pour s’opposer au transfert. D’autre part, elle a ouvert ce droit aux communes membres des communautés de communes qui exercent «en partie seulement » et « sur tout ou partie du territoire de ces communes », l’une ou l’autre des compétences. Mais les compétences seront transférées obligatoirement à l’EPCI à fiscalité propre, au plus tard le 1er janvier 2026.
Il reste qu’une communauté de communes n’exerçant pas lesdites compétences, ou ne les exerçant que partiellement, et dans laquelle il a été fait usage de la minorité de blocage, garde le droit d’exercer la ou les compétences avant le 1er janvier 2026. En effet, son organe délibérant peut à tout moment se prononcer par un vote sur le transfert de plein droit de l’une ou des deux compétences. En sachant que son projet peut être remis en cause si des communes s’y opposent, dans un délai de trois mois, selon les conditions décrites ci-dessous.
Si les communes n’ont pas réuni les conditions pour activer la minorité de blocage et décidé le transfert, le transfert de compétence a pour effet que les mises à disposition sont constatées sur le plan comptable. Le budget annexe M49 (assainissement et distribution d’eau) de la commune qui, jusque-là, exerçait la compétence, est clôturé et réintégré dans le budget principal de cette commune. S’il existait une régie municipale, celle-ci est dissoute. Dans le cas où le service était concédé, le contrat afférent est transféré à l’EPCI à fiscalité propre.
Dans le cas où le transfert porte sur l’ensemble des compétences relatives à l’eau, la commune transmet à l’EPCI le schéma de distribution d’eau potable (s’il existe), ainsi qu’un état financier de l’exercice de la compétence. Le solde positif du budget annexe du service d’eau est également transféré, si le schéma fait apparaître un taux de perte en eau supérieur à un taux déterminé par décret. Jusqu’ici, la jurisprudence administrative ne l’imposait pas. Un accord entre les représentants des communes et ceux de l’EPCI n’était toutefois pas exclu. Cette souplesse subsiste : la convention négociée sur cette question par la commune et l’EPCI peut prévoir «une disposition contraire ». En fonction de l’état du réseau, un transfert partiel de budget est envisageable.
La loi « engagement et proximité » permet aux communautés d’agglomération et de communes à qui les compétences « eau », « assainissement des eaux usées » et « gestion des eaux pluviales urbaines » ont été transférées de déléguer tout ou partie de celles-ci. Il est possible de déléguer une compétence, ou deux, ou les trois. Si par exemple la délégation porte sur l’eau, il peut s’agir de la production ou de la distribution de l’eau, ou bien encore des deux. En proposant ce dispositif, le gouvernement a souhaité que l’exercice des compétences susdites soit adapté à la diversité des territoires – en particulier dans les EPCI de grande taille –, selon le principe de différenciation territoriale.
La délégation peut être consentie à l’une de leurs communes membres, ou à un syndicat existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre de l’EPCI à fiscalité propre. L’éventualité d’une délégation fait l’objet d’un examen par la communauté de communes ou la communauté d’agglomération, dès lors qu’une commune ou un syndicat en fait la demande. Même si elle a été prise dans les tout premiers jours de 2020, la délibération de la commune ou du syndicat n’a pas le pouvoir de remettre en cause le transfert à l’intercommunalité à fiscalité propre de la ou des compétences. En effet, seule une minorité de blocage constituée dans les conditions précisées ci-contre permet de faire opposition au transfert (dans une communauté de communes).
Le conseil communautaire statue dans un délai de trois mois. En cas de refus, il motive sa décision. Dans cette éventualité, la commune pourra faire ultérieurement une nouvelle demande. En revanche, ce ne sera pas possible pour le syndicat infra-communautaire. S’il n’a pas d’autres missions, ce dernier sera dissout.
L’EPCI à fiscalité propre – qui a le statut de délégant – demeure responsable de la compétence déléguée. De son côté, en tant que délégataire, la commune ou le syndicat agit au nom et pour le compte du délégant et lui rend compte.
Lorsque la convention vise un syndicat, les deux parties disposent d’un an pour mettre au point une convention détaillant le périmètre et les modalités d’exécution de la délégation. Soumise à l’approbation des assemblées délibérantes concernées, elle définit les objectifs à atteindre en matière de qualité du service rendu et de pérennité des infrastructures, ainsi que les modalités de contrôle du délégant sur le délégataire. Des indicateurs de suivi de chaque objectif, déterminés par les deux parties et inscrits dans la convention, permettront d’évaluer sa mise en œuvre. Cette évaluation prendra la forme d’un bilan transmis à dates régulières à l’EPCI à fiscalité propre. En outre, la convention précise les moyens humains et financiers consacrés à l’exercice de la compétence déléguée. Inscrite dans la convention, la durée de la délégation est nécessairement limitée, mais elle est renouvelable.
Dès lors qu’ils respectent l’ensemble de ces obligations, les collectivités et EPCI sont libres d’utiliser ou non le modèle de convention élaboré par la Direction générale des collectivités locales (DGCL).
Lorsque la convention de délégation est signée entre l’EPCI à fiscalité propre et le délégataire, ce dernier ouvre un budget annexe M49 sans autonomie financière, afin d’isoler budgétairement la gestion du ou des services publics industriels et commerciaux délégués.
Le transfert de la compétence à l’EPCI à fiscalité propre s’accompagne du transfert des services communaux concernés. Mais la Direction générale des collectivités locales (DGCL) admet une exception dans l’hypothèse où les deux parties s’accordent rapidement, après le transfert, pour mettre en place une délégation de compétence. Dans ce cas-là, elles «doivent s’interroger sur l’opportunité d’un transfert des services communaux ».
Par ailleurs, pour permettre l’exercice des compétences par le délégataire, des fonctionnaires de la communauté de communes ou de la communauté d’agglomération peuvent être mis à sa disposition, selon les modalités de droit commun.
Le délégataire fixe le prix de l’eau et de l’assainissement. Toutefois, si ses responsables élus ne parviennent pas à s’accorder sur une tarification, l’EPCI prend la décision.
Une commune ou un syndicat peut solliciter une délégation. Mais cela ne suspend pas les effets du transfert des compétences à l’EPCI.
Thomas BEUREY
• Loi «engagement et proximité »
n° 2019-1461 du 27/12/2019.
• Note de la DGCL du 28/12/2019 sur les dispositions de la loi traitant des modalités d’exercice des compétences relatives à l’eau, l’assainissement des eaux usées et la gestion des eaux pluviales urbaines et des indemnités des élus des syndicats. https://bit.ly/2THBtD4
• Questions-réponses du 30/12/2019 traitant des mêmes sujets (DGCL).
• Note de l’AMF
« Transfert de l’eau et de l’assainissement ». www.amf.asso.fr (réf. BW39786).