Cécile Gallien, maire de Vorey-sur-Arzon (43) et co-présidente de la commission des communes et des territoires ruraux de l’AMF, n’a pas dit autre chose en appelant à la reconnaissance des aménités que sont les services rendus par les territoires ruraux à la nation. «Selon l’Insee, 88 % du territoire hexagonal est rural. Il faudrait que ces espaces aient une valeur économique voire un prix compte tenu de leur valeur écologique ou productive », considère l’élue en rappelant que 30% de l’emploi industriel se situe dans les communes rurales et même 70% dans celles de moins de 20 000 habitants.
La ruralité redresse la tête. Pour réussir, Josiane Corneloup, présidente de l’Association nationale des pôles territoriaux et des pays (ANPP) et députée de Saône-et-Loire, prône un changement de modèle. «Face à des urgences et des transitions majeures, les territoires ne peuvent plus être en concurrence. Ils doivent se réinventer et penser des modes de fonctionnement différents. L’ADN des pays et des pôles territoriaux est de travailler ensemble et d’établir un projet de territoire à 15-20 ans, stratégique et partagé par tous ». Et de mettre en avant, à cet effet, le récent vade-mecum de l’ANPP, intitulé « Coopérons pour réussir nos transitions ».
Les communes rurales constituent un formidable réservoir de biodiversité. Plusieurs témoignages l’ont montré durant le débat.
Philippe Gamen, maire du Noyer (73) et président du parc naturel régional (PNR) du massif des Bauges (67 communes et 67 000 habitants), a décrit un territoire préservé et entouré de grandes villes (Annecy, Chambéry, Aix-les-Bains, Albertville). «Bien que préservant la biodiversité, nous ne sommes pas un territoire sous cloche et nous avons des projets de développement avec des productions alimentaires, de ressources naturelles ou d’énergies renouvelables », a-t-il argumenté. Le PNR a signé des contrats de réciprocité avec les agglomérations notamment en matière de tourisme.
Autre illustration avec Bertrand Hauchecorne, maire de Mareau aux Prés (45) et co-président de la commission transition écologique de l’AMF. Avec 7 km de berges sur la Loire, il se démène pour protéger cette riche biodiversité. «Nous avons lancé une grande opération de rachat de près de 600 parcelles avec un conservatoire municipal, aidé par la Safer, grâce à un financement européen Leader à 80% », a expliqué l’élu. Un travail sur le temps long avec l’établissement public foncier (EPF) Cœur de France, qui achète les terrains puis les rétrocède à la commune.
Saluant ces initiatives, Sarah El Haïry, secrétaire d’Etat chargée de la Biodiversité, a mis en avant «le rôle de l’Etat pour porter des outils et des financements en faveur des territoires ruraux ». Elle a cité en particulier les augmentations successives de la dotation Biodiversité qui atteindra 100 millions d’euros en 2024.
Christine de Neuville a insisté sur la nécessité de mettre en place des contrats de réciprocité entre l’urbain et le rural. Il en existe environ 200 aujourd’hui, a précisé Dominique Faure, ministre déléguée aux Collectivités territoriales et à la Ruralité. «Il faut que les territoires urbains et ruraux se réconcilient, a-t-elle estimé. Le mot d’égalité entre les territoires devrait être remplacé par celui de réciprocité ».
La ministre propose de structurer cette complémentarité autour de cinq axes : l’alimentation, le tourisme, la culture, l’emploi et la mobilité. «Pour donner plus de force aux contrats de réciprocité, ne faudrait-il pas les rendre plus incitatifs voire obligatoires à partir d'une certaine taille ? », avec également un accompagnement financier, s’est interrogé la maire de Vicq-sur-Breuilh.
Karine Gloanec Maurin, présidente de la communauté de communes des Collines du Perche (41) et co-présidente de la commission des communes et territoires ruraux de l’AMF, a cité l’exemple d’une coopération «hors cadre » entre Couëtron-au-Perche (41) et Arcueil (94) autour de la culture.
« Fruit du hasard et de rencontres humaines, notre projet gagnant-gagnant repose sur des résidences d’artistes à Couëtron-au-Perche qui apportent beaucoup aux habitants de nos deux villes », a expliqué Christian Métairie, maire d’Arcueil (94). Selon le vice-président de l’AMF, «le Covid a changé le regard des urbains sur la ruralité qui fait à présent envie. Malgré nos différences, nous avons beaucoup de choses en commun à partager ».
Dans la même veine, Gilles Leproust, maire d’Allonnes (72) et président de Ville & Banlieue, a plaidé pour «ne pas laisser une partie de notre pays de côté (…). Il faut cesser l’opposition entre les territoires et réaliser un travail en commun pour faire République ensemble », a-t-il résumé. «Tournons le dos à la rhétorique de la fragmentation et de la séparation des territoires pour construire des alliances entre eux », a conclu Dominique Faure.