« Dès notre arrivée en 2020, nous avons fait de grandes concertations, des études et des projets. Le calendrier fixé par l’État prévoit l’interdiction des véhicules Crit’Air 5 depuis le 1er janvier 2023, les Crit’Air 4 au 1er janvier 2024, les Crit’Air 3 au 1er janvier 2025, les Crit’Air 2 au 1er janvier 2028. Ces interdictions sont nécessaires pour atteindre les seuils de la directive européenne. En 2020, la ZFE concernait le cœur de la métropole : Lyon, Villeurbanne, Caluire-et-Cuire, une partie de Bron et Vénissieux. À l’issue de la concertation, nous avons finalement décidé de ne pas l’étendre. »
La métropole a mis en place des amortisseurs. «Nous avons augmenté les aides : soutien financier des ménages pour changer de véhicule (jusqu’à 10 000 euros avec l’aide de l’État pour les particuliers travaillant dans la métropole), “compte mobilité” donnant accès, pendant un an, aux transports en commun et aux vélos en libre-service ; dérogation “petit rouleur” 52 jours par an, notamment », explique l’élu.
La question sociale est en effet sensible : «il faut faire évoluer les flottes de véhicules, et nous déshabituer de la voiture. La “bombe sociale” est là : les ménages les plus pauvres n’ont pas de véhicule, ou des véhicules anciens », constate l’élu. «À Lyon, nous avons une agence de mobilité avec des permanences dans les communes, les centres communaux d’action sociale, dans les territoires les plus paupérisés. Notre priorité reste de développer des alternatives à la voiture. »
Cette politique volontariste nécessite le concours de l’État aux abonnés (quasi) absents jusqu’ici, notamment s’agissant des dispositifs de contrôle. «En 2018, l’État s’était engagé à mettre à disposition des radars automatiques pour contrôler les plaques d’immatriculation. Depuis, rien : actuellement, c’est la police municipale qui contrôle le respect de la ZFE, à travers le stationnement », indique Jean-Charles Kholhaas.
Le décret n° 2023-563 du 5 juillet 2023 autorise désormais les policiers municipaux à constater «sans interception » des infractions «commises sur les sections d’autoroutes situées sur le territoire de la commune où ils sont territorialement compétents » et ce, dans deux cas particuliers : les ZFE-m et les voies réservées à des véhicules propres. Le décret complète la liste des infractions pouvant être constatées avec un appareil de contrôle automatique homologué, en y ajoutant la circulation dans une ZFE-m.
L’État s’est engagé à participer au financement des équipements nécessaires dans le cadre d’une convention signée avec les collectivités prévoyant une rétrocession du produit des amendes issues des contrôles en faveur des collectivités territoriales, rétrocession que l’AMF souhaite voir calculée sur l’ensemble du bassin de mobilité et pas seulement sur les collectivités comprises dans la ZFE-m. Le dispositif devrait figurer dans la loi de finances pour 2024 en cours de discussion.
Nicolas Mayer-Rossignol, maire et président de la métropole Rouen Normandie, souligne aussi l’absence de moyens de l’État. «Pour l’instant, seuls les diesels d’avant 2006 sont interdits : ce sont les véhicules des ménages modestes. L’enjeu social est donc fort. Le problème de la loi LOM est qu’elle fixe des contraintes sans donner d’outils aux collectivités. Il n’y a aucun moyen pour augmenter les transports en commun, l’aide au covoiturage est très récente, et les aides pour changer de véhicule sont encore très limitées.
La métropole de Rouen propose une aide à la conversion de 5 000 euros : c’est la seule à le faire avec Strasbourg. » L’élu déplore qu’« une fois encore, les collectivités se retrouvent à devoir appliquer les règles de l’État sans accompagnement. Dans la métropole, nous avons augmenté de 15 % les transports en commun (gratuits tous les samedis) et nous finançons intégralement le covoiturage. Nous avons aussi mis en place une caisse d’avance avec un système de tiers-payant pour inciter à changer de voiture. L’État doit absolument tenir ses engagements pour accompagner la mise en place de transports alternatifs ».
Pour l’heure, l’État a mis en place une campagne de communication mi-octobre baptisée «Changeons d’air, changeons de mobilité ». Elle redirigeait vers le portail mieuxrespirerenville.gouv.fr qui présente les règles et les aides en matière de ZFE.