Dans la salle, plusieurs élus du Cantal, du pays de Gex, de Bretagne, de Dordogne ont interpellé directement le ministre de la Santé et de la Prévention notamment sur la «dérive des hôpitaux » et l’insuffisance des structures et des moyens dévolus à la santé mentale. Sur ce dernier point, Aurélien Rousseau ne leur a pas apporté des réponses concrètes mais il a indiqué que le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 "aura un angle beaucoup plus fort sur la santé mentale".
S’agissant des hôpitaux, «tant qu’on peut garder un service ouvert, on le garde ouvert », s’est-il borné à expliquer. Le ministre a réfuté le qualificatif de «pays sous- développé » pour qualifier l’état général de l’offre de soins en France : «il y a une géographie qu’on ne comprend plus car des territoires sont attractifs et d’autres ne le sont plus. Mais à force de dire que l’hôpital "se casse la gueule", cela ne donne pas envie d’y aller », a-t-il estimé en assurant les élus qu'il n'y aura plus de fermetures de services ou d'hôpitaux pour des raisons purement financières.
L’évolution des pratiques des professionnels de santé est devenue l’alternative pour pallier la raréfaction des médecins et dégager le précieux «temps médical », et la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé devrait y contribuer, le ministre s’engageant à ce que ses décrets d’application soient publiés cette année. «Les pratiques avancées en 2023 ont beaucoup progressé » du côté des infirmiers, a assuré Patrick Chamboredon, président de l’Ordre des infirmiers. Il en va de même du côté des pharmaciens.
Déjà amenés à s’investir dans la vaccination, prochainement autorisés à renouveler des ordonnances et à délivrer sans prescription médicale des médicaments (antibiotiques notamment) dans certains cas. Mais le président de la fédération des pharmaciens d’officine, Patrick Besset, a mis en garde le ministre. «Sur les 8 500 communes équipées d’une pharmacie, 5 000 n’en ont qu’une, dont 4 000 ont moins de 1 500 habitants, donc si leur pharmacie ferme, ces communes n’auront plus la possibilité de rouvrir… ». Il appelle donc l’Etat à autoriser un «retour des dérogations » (supprimées en 2007) pour l’installation d’officines.
Au niveau local, les initiatives se multiplient également pour renforcer l’accès aux soins, sous l’impulsion et/ou grâce au soutien des collectivités, comme en ont témoigné des élus du Bergeracois, de la Sarthe, de Seine-et-Marne, de la Martinique, venus présenter des exemples de coordination des praticiens dans le cadre de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), au sein de contrats locaux de santé (CLS), de maisons de santé pluridisciplinaires (dont la Première ministre souhaite porter le nombre à 4 000 d’ici à 2027) ou de centres municipaux de santé. Et l’État ? Il doit faire sa «transformation culturelle » et «j’ai à faire bouger les équipes », a reconnu le ministre en affirmant la nécessité de soutenir les initiatives locales.
« La santé ne dépend qu’à 22% de la qualité du système de soins, le reste dépend de l’accès aux espaces verts, de la qualité de l’habitat, de l’alimentation, tout cela forge la légitimité des maires à parler de santé, car c’est notre quotidien ! », a expliqué Frédéric Chéreau pour convaincre que l’avenir du système de santé repose sur une profonde révolution : la prévention. Aurélien Rousseau a acquiescé. Les maires ont un rôle clé à jouer dans ce domaine, a souligné le président de la Mutualité française. «L’essentiel des déterminants de santé - ce qui contribue à la capacité à rester en bonne santé le plus longtemps possible - dépendent de politiques publiques relevant du local : sport, logement, aménagement urbain, etc. », a-t-il exposé.
Mais la France figure en queue de peloton parmi les pays de l’OCDE sur le champ de la prévention. «Il y a donc des marges de progrès », a estimé Éric Chenut. «La prévention n’est pas un supplément d’âme, mais l’avenir de notre système de santé », a abondé le ministre. Et si «tous les ministres se sont plantés pour arriver à formuler cela », il a dit sa volonté d’y remédier.
Retrouvez la vidéo du débat sur l'accès aux soins du 105e Congrès des maires