Tout en saluant la loi «Industrie verte », André Laignel, maire d’Issoudun (36), président de la communauté de communes du Pays d'Issoudun et premier vice-président délégué de l’AMF, a dénoncé «les nombreuses injonctions contradictoires de l’Etat » au premier rang desquelles la conciliation entre les contraintes du ZAN (zéro artificialisation nette) et la nécessité de développer l’industrie. Une critique partagée par tous les intervenants.
« Je n’ai pas été élue pour dire " non " à des entreprises qui veulent s’implanter ou s’étendre, s’est emportée Isabelle Le Callennec, maire de Vitré (35) et présidente de Vitré Communauté, territoire dynamique accueillant 40% d’emplois industriels avec un taux de chômage de 3,5%. Parmi les freins, elle a cité aussi l’opposition forte d’associations environnementales qui ralentit les projets voire amène les entreprises à aller ailleurs.
La maire de Vitré «refuse de devoir arbitrer entre le développement économique et l’habitat ». Sur ce sujet, Guillaume Guerin, président de Limoges Métropole (87) et vice-président de l’AMF, indique sans hésiter qu’il choisira l’accueil d’entreprises «car j’en ai besoin pour recréer de la richesse dans mon territoire ». «Mais encore faut-il avoir du foncier disponible », a-t-il reconnu. Et de citer le cas d’une entreprise de literie qui souhaite s’étendre (90 emplois supplémentaires) sur une parcelle de 14 hectares qu’il n’a pas. «Demain, avec la mise en application du ZAN, cela sera encore pire », s’est-il alarmé en demandant à «l’Etat d’entendre les remontées des élus ».
Pour sa part, Bruno Bernard, président de la métropole de Lyon (69), estime qu’« on ne peut plus accepter des projets industriels sur de grandes superficies qui génèrent peu d’emplois ». Il défend un «soutien sélectif à l’industrie » et propose plusieurs dispositifs d’aide sur la décarbonation.
« Tous les élus sont d’accord pour tendre vers la sobriété foncière mais attention de ne pas mettre en péril l’aménagement du territoire », a prévenu Guillaume Guerin. La maire de Vitré a plaidé ainsi pour «une évolution de la loi ZAN pour des raisons de bon sens ».
Présent lors du forum, Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie, a défendu les simplifications prévues par la loi «Industrie verte ». Il a relativisé le manque de foncier industriel, en indiquant qu’il faut seulement 22 000 hectares : «cela se trouve ». «Pour réussir la dépollution et financer les services », il a mis en avant «le plan d’un milliard d’euros de la Banque des territoires pour développer du foncier industriel et financer le dispositif 50 sites clés en main, de toutes tailles et sur tous les territoires ».
Pour trouver les 22 000 hectares nécessaires, Olivier Sichel, directeur de la Banque des territoires, a indiqué «les trois sources que sont la verticalisation (8 000 hectares), la réhabilitation des friches (8 000 hectares) et 6 000 hectares à trouver sur cinq ans, ce qui est faisable », selon lui. Isabelle Le Callenec a demandé, pour sa part, «en premier lieu, de sortir ces 22 000 hectares du calcul du ZAN ».
D’une même voix, les élus ont fustigé la suppression de la CVAE et la perte du lien entre l’entreprise et le territoire d’accueil. «La compensation à l’euro près n’est pas au rendez-vous et nous avons été spoliés de 765 millions d’euros », s’est insurgé André Laignel. Dans la salle, Thierry Delbreil, maire de Lafrançaise (82), a chiffré à 100 000 euros la perte pour l’EPCI qu’il préside. «La fraction de TVA [en compensation de la perte de CVAE] constitue un outil indigeste pour nos petits budgets, dénonce-t-il. Les dispositifs décidés par le législateur ne sont pas faits pour la ruralité et nous fragilisent ».