« Les communes de moins de 500 habitants ont [une trésorerie équivalente à] 581 jours de dépenses de fonctionnement, soit 1,5 an de dépenses de fonctionnement d’avance. Mais cela s’explique, pour André Laignel. Elles n’ont pas les moyens d’avoir des services capables de gérer une trésorerie comme dans les grandes collectivités. La trésorerie coûte cher ! Et les petites communes gèrent souvent en bon père ou bonne mère de famille ! Il est difficile pour elles d’anticiper. Les communes de 100 000 habitants et plus ont, elles, l’équivalent de 26 jours de dépenses de fonctionnement en trésorerie et les communes entre 10 000 et 100 000 habitants l’équivalent de 98 jours. Il faut donc relativiser le discours sur la trésorerie des collectivités consistant à dire qu’elles sont assises sur un tas d’or. Les 18 000 communes de moins de 500 habitants, ce n’est pas Fort Knox ! »
Sur la dette et le déficit public, même constat. Les collectivités restent plus vertueuses que l’État puisqu’elles ont dégagé un excédent de 4,8 milliards d’euros en 2022 (+3 ,8 Md€ pour le seul bloc local). Leurs dépenses de fonctionnement ont essentiellement augmenté (+ 4,9 % pour l’ensemble des collectivités, + 5,8 % pour le bloc local) en raison de la hausse du point d’indice de la fonction publique, ce qui a pesé dans les dépenses de personnels en 2022 (+ 5,1% ; et même + 7 % pour les communes moyennes et plus importantes).
Les recettes de fonctionnements ont crû de 4,7 % mais sont restées inférieures aux dépenses de fonctionnement (+ 4,9 %). Les impôts et taxes ont rapporté davantage en 2022 (+ 4,8 %) mais pas au profit des communes puisque cette hausse est essentiellement tirée par la TVA (qui n’abonde quasiment pas cette strate de collectivités). Il y a eu, par ailleurs, une hausse en euros courants des concours financiers de l’État (+0,6%) mais qui est, en réalité, une baisse en euros constants.
La situation de l’épargne apparaît, elle aussi, très différente selon les catégories et les strates de collectivités. L’épargne brute est positive dans les communes jusqu’à 5 000 habitants, mais devient négative à partir de ce seuil (de moins 2,7 % à - 6,4 % pour les communes les plus importantes).
L’état de l’épargne brute dans les communes de plus de 100 000 habitants apparaît bien pire avec une chute de - 40 % (communes hors Paris et Marseille)… Les tendances sont comparables pour l’épargne nette.
L’investissement se révèle lui-aussi en trompe-l’œil : il a augmenté de 6,8 % en 2022 en raison de la reprise de projets qui n’avaient pas pu être réalisés pendant la période Covid et surtout sous l’effet de l’inflation. «La hausse des dépenses d’équipement est due pour 84 % à l’inflation », a illustré André Laignel. La capacité de financement reste positive (1 Md€ en 2022) mais moindre qu’en 2021 (2,5 Mds€).
Dans ces conditions, difficile pour les collectivités d’investir massivement, en particulier dans la transition écologique, comme l’État leur demande. «Il ne faudrait pas que l’État se serve de ce prétexte pour cibler les aides vers la transition écologique, avertit André Laignel. Les communes, qui ont la compétence générale, ne peuvent pas abandonner des domaines comme le social, l’économie, la culture, le sport… à un moment où on nous demande d’intervenir de plus en plus sur le logement, la santé. Nous sommes en permanence les pompiers de service mais la lance à incendie est de moins en moins [efficace] »….
Les Assises des finances publiques, organisées par l’État le 19 juin et lors desquelles les premières mesures d’économies pour réduire le déficit public seront annoncées, doivent amener chaque partie à s’entendre sur un constat partagé de l’état des finances du pays. Ce pré-rapport et les premières réunions techniques préalables à la rencontre laissent déjà poindre les divergences d’appréciation entre les collectivités et le gouvernement.