Depuis 2016, la ville s'est s'engagée
dans le programme Nature 2050 dont
l'objectif est de favoriser une biodiversité
locale plus à même de s'adapter aux
changements climatiques.
En 1995, Kodak ferme son usine de traitement de films argentiques, après 70 ans de présence à Sevran. L’entreprise démolit les bâtiments, dépollue le site : 550 000 m3 de terre sont évacués, en partie remplacés par du remblai stérile. En 2012, Kodak cède le terrain à la ville avec des contraintes : pas de production alimentaire, pas de construction et maintien d’une zone naturelle. « La ville étudie alors un projet de parc paysagé avec bassins et fontaines, se souvient Dominique Mériguet, conseiller municipal délégué au suivi des projets de la ville. Mais des risques d’effondrement interdisent de créer les chapes de béton prévues. »
C’est alors qu’est choisie l’option « d’adapter le territoire au changement climatique avec les solutions fondées sur la nature », explique Sophie Elie, cheffe de projet sur le site pour CDC Biodiversité. « Il est important de disposer d’une zone de fraîcheur et de nature en pleine ville, alors que l’État a des plans de densification maximale », estime Dominique Mériguet. La ville décide, en 2016, d’entrer dans le dispositif Nature 2050 de CDC Biodiversité (lire ci-dessous). Un inventaire écologique définit le potentiel du site de 14 ha. Selon la nature du sol et la présence de la nappe phréatique, se développent zones boisées, prairies, points d’eau… Déjà des espèces reviennent, dont certaines rares (cricket italien, papillon écaille marbrée…), et des bosquets se développent librement.
L’un des objectifs du programme est précisément de favoriser une biodiversité locale qui s’adaptera spontanément au changement climatique. Un mur d’enceinte est détruit vers le canal de l’Ourcq pour une plus grande perméabilité pour la faune, la flore, mais aussi le public. «Le public est bienvenu. Il peut aller partout, mais ne trouvera pas d’équipements ni d’aires de jeux », souligne le conseiller municipal délégué. Des parcours prioritaires sont malgré tout signalés par des chemins fauchés, afin de préserver la faune et la flore. Une partie du sol de la friche est stérile. « Les résidus du broyage de fauche des chemins et des milieux herbacés servent à l’enrichir. Il s’agit d’améliorer la vie microbienne du sol et de faire du site un puits de carbone », explique Sophie Elie. Dans cette zone très urbaine, la friche devrait apporter de la fraîcheur, ce qui sera objectivement mesuré en partenariat avec un laboratoire de recherche.
Pour la municipalité, peu d’investissement et des charges de fonctionnement réduites puisqu’elle finance l’entretien des accès, des animations pédagogiques et la fermeture du site le soir. CDC Biodiversité prend en charge toute la gestion de la biodiversité. « Le budget de Nature 2050 est réduit. Il nous oblige à être le moins interventionniste possible et à atteindre notre objectif avec la nature sur place », souligne Sophie Elie. En contrepartie du financement de CDC Biodiversité, la ville s’engage sur le projet jusqu’en 2050, sans changement de programme possible. « La biodiversité se gère sur la durée », conclut la cheffe de projet.
Le programme Nature 2050
Ce programme, lancé fin 2016 par CDC Biodiversité, vise à renforcer l’adaptation des territoires au changement climatique et à restaurer la biodiversité grâce à des solutions fondées sur la nature. Il est mené en partenariat avec des associations environnementalistes et des établissements publics. Il s’appuie sur des acteurs publics ou privés qui s’engagent sur des versements volontaires, au-delà de leurs obligations réglementaires. Pour chaque versement de 5 €, CDC Biodiversité restaure et préserve 1 m² de surface jusqu’en 2050. En contrepartie, la collectivité doit garantir la pérennité de l’action jusqu’en 2050. www.nature2050.com/
Martine KIS
n°368 - Mai 2019