1 extension de l’instruction obligatoire
• Instruction obligatoire à 3 ans (art. 11 à 14).La loi impose l’obligation d’instruction des enfants à partir de 3 ans à compter de la rentrée 2019, avec une possibilité d’aménagement du temps de présence en petite section sur demande des responsables légaux et après autorisation du directeur académique.
• Compensation financière (art. 17). Sur la compensation financière de l’État liée aux incidences de l’obligation d’instruction des enfants à partir de 3 ans, c’est la version initiale proposée par l’Assemblée nationale qui l’a finalement emporté, à savoir la prise en compte de «l’augmentation des dépenses obligatoires au titre de l’année scolaire 2019-2020 par rapport à l’année scolaire 2018/2019, dans la limite de la part d’augmentation résultant directement de l’abaissement à 3 ans de l’âge de l’instruction obligatoire ». La réévaluation de ces ressources peut être demandée par la commune jusqu’en 2022.
La solution proposée par le Sénat, qui avait la faveur de l’AMF, consistant à compenser toutes les collectivités, y compris celles qui avaient déjà accepté de participer financièrement aux écoles maternelles privées sous contrat d’association, n’a pas été retenue. Et de fait, la formulation de la loi, qui fait référence à une «augmentation des dépenses obligatoires », a suscité un débat d’ordre juridique sur le périmètre des dépenses à prendre en compte : création d’une dépense obligatoire par la loi, impliquant une compensation pour toutes les communes concernées, ou prise en compte du seul surcoût constaté entre les années 2019/2020 et 2018/2019 ? C’est cette deuxième option qui a été retenue par la loi puis validée par le Conseil Constitutionnel.
La détermination des dépenses à prendre en compte ainsi que les modalités de versement, qui seront définies par décret d’ici la fin de l’année, demeurent à ce stade floues.
L’AMF avait indiqué, dès l’annonce de cette mesure d’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire, qu’elle partageait l’ambition du gouvernement pour des raisons de justice sociale, sous réserve que cette évolution n’entraîne aucun surcoût pour les collectivités et que les postes d’enseignants nécessaires soient bien pourvus. Elle a mis en relief les impacts potentiels pour les collectivités, selon les situations locales, tant en matière de locaux que d’encadrement, qu’il s’agisse des écoles publiques ou privées sous contrat. S’agissant des écoles maternelles privées sous contrat d’association, l’AMF a considéré que la loi entraîne un basculement du régime actuel de financement facultatif (lié à un accord de la collectivité) vers un régime de financement obligatoire tant pour les communes et EPCI d’implantation que pour les communes et EPCI de résidence, justifiant la nécessité d’une compensation financière pour toutes les collectivités concernées, et non pour les seules communes qui auraient jusqu’alors refusé de reconnaître le contrat d’association comme le prévoit la loi (sauf hausse des effectifs). Elle a demandé aussi qu’une solution soit trouvée dans le contexte du plafonnement des dépenses de fonctionnement à 1,2 % pour les grandes collectivités.
• Jardins d’enfants (art. 18). L’instruction des enfants âgés de 3 à 5 ans est possible dans un jardin d’enfants, dès lors qu’il est ouvert à la date d’entrée en vigueur de la loi, et jusqu’à l’année scolaire 2023-2024. Une déclaration devra être effectuée par les familles auprès du maire, à l’instar d’une instruction à domicile. La possibilité d’une instruction au sein de jardins d’enfants à titre pérenne, comme le souhaitait le Sénat, n’a donc pas été retenue. Le sort de ces structures à partir de 2024, pour les collectivités qui en sont dotées, se pose avec acuité.
2 . instruction à domicile (art. 19 et 20) dans les écoles privées hors contrat (art. 22 et 23) et les jardins d’enfants
S’agissant de l’instruction à domicile, la loi clarifie les objectifs du contrôle opéré par l’Éducation nationale, qui doit vérifier la conformité de l’enseignement dispensé dans la famille (connaissances, compétences). En cas de refus, deux fois de suite et sans motif légitime, de soumission au contrôle, la loi prévoit une mise en demeure des responsables légaux d’inscrire leur enfant dans un établissement d’enseignement public ou privé (lire p. 69). De son côté, le maire peut désormais saisir le procureur de la République en cas de manquement à l’obligation scolaire, y compris d’absence d’instruction à domicile, dans le cadre de ses propres obligations de contrôle (art. 24).
Globalement, sur l’instruction à domicile, l’AMF se satisfait de ce renforcement, qui répond à l’attente exprimée dans son vademecum sur la laïcité, publié en 2015. Elle rappelle cependant les difficultés rencontrées par les élus quant au contrôle leur incombant (dès la 1re année, puis tous les deux ans, visant à établir quelles sont les raisons alléguées par les personnes responsables et s’il est donné à leur enfant une instruction compatible avec son état de santé et les conditions de vie de la famille). Des difficultés de repérage de ces familles, et d’accès à leur domicile sont notamment citées, malgré la publication d’un guide interministériel en 2017.
Sur le contrôle des écoles privées hors contrat, la loi procède, une nouvelle fois, à un renforcement de la surveillance (en cas de modification du projet, de l’objet de l’enseignement, des horaires, des diplômes…) et des sanctions (en cas de risque pour l’ordre public).
Pour les enfants inscrits dans des jardins d’enfants, le contrôle de l’obligation scolaire relève de la responsabilité du directeur de l’établissement. Il en rend compte à l’inspecteur d’académie et au maire. Selon le décret n° 2019-822 du 2 août 2019, cette règle vaut jusqu’à l’année scolaire 2023-2024. Le décret n° 2019-825 du 2 août 2019 relatif au contrôle des établissements d’accueil collectif dits «jardins d’enfants » recevant des enfants soumis à l’instruction obligatoire précise que ces structures «sont assimilées à des établissements d’enseignement privés hors contrat pour ce qui est du contrôle du contenu des connaissances requis des élèves » (lire p. 69).
3 création des eplei (art. 32)
La loi prévoit la possibilité de créer des établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI) intégrant des classes des premier et second degrés, ouverts aux élèves aptes à suivre les enseignements dans la langue choisie. Ces EPLEI sont créés par arrêté du préfet du département sur proposition conjointe de la région, du ou des départements et de la ou des communes ou EPCI compétents concernés, après conclusion d’une convention et avis du Dasen. Le conseil d’administration comprend, outre les représentants de l’administration de l’établissement, de 24 à 30 membres (dont 1/3 de représentants des collectivités). La convention signée détermine la collectivité de rattachement et le siège de celui-ci, fixe le nombre de membres du conseil d’administration, ainsi que la répartition des charges incombant aux collectivités concernées au titre de la gestion des écoles, des collèges et des lycées.
Le gouvernement remettra au Parlement, dans un délai de deux ans, un rapport appréciant l’équilibre de l’offre en matière d’enseignement international sur le territoire national, ainsi qu’un bilan pour l’Outre-mer. Ce dernier point répond en partie à la demande de l’AMF, qui considère que cette nouvelle faculté ne doit pas conduire à accentuer le déséquilibre de l’offre éducative entre les territoires.
4 langue régionale dans les école privées sous contrat (art. 34)
Cette disposition prévoit que la participation financière des collectivités est une contribution volontaire. Elle fait l’objet d’un accord entre l’établissement d’enseignement et la commune de résidence si cette dernière ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale. À défaut d’accord, le préfet réunit les acteurs pour la résolution du différend en matière de participation financière.
5 CAEN et CDEN (art. 55)
La loi autorise la simplification, par ordonnance, dans un délai d’un an, du fonctionnement des conseils académiques et départementaux de l’Éducation nationale. Leur fonctionnement devra être simplifié et leurs attributions redéfinies pour tenir compte de l’évolution des compétences des collectivités territoriales. En réalité, les élus attendent une évolution plus profonde de ces instances, qu’ils considèrent comme des chambres d’enregistrement des décisions du directeur académique. L’AMF demande à être étroitement associée à leur transformation.
Une satisfaction et une déception de l’AMF
L’AMF est satisfaite de la suppression de la création des établissements publics des savoirs fondamentaux, compte tenu de l’absence d’évaluation de ses incidences sur le maillage scolaire territorial. En revanche, elle regrette la suppression de la mesure prévoyant que les inscriptions à la cantine s’effectuent dans la limite des places disponibles. Elle aurait permis de régler la problématique du droit d’accès à la cantine posée par la loi égalité et citoyenneté de 2017, qui fait l’objet actuellement d’un contentieux, dont l’objectif, louable, ne tient pas compte des contraintes réelles des communes
(capacité d’accueil, locaux disponibles).
Des dispositions pour une école inclusive
Intégration (articles 26 à 31). La loi prévoit la mise en place de pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL) pour une meilleure interface entre les professionnels de santé et le secteur médical. Elle autorise le recrutement conjoint d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) par l’État et les collectivités territoriales, pour favoriser la conclusion de contrats à temps plein et assurer la continuité avec le temps hors scolaire. En outre, les communes, lors de la construction ou réhabilitation d’une école, doivent tenir compte des recommandations pour une école inclusive de l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement.
Le financement de l’accompagnement. L’AMF évoque souvent le manque de moyens humains d’accompagnement des élèves en situation de handicap dans les classes ou sur le temps périscolaire, accru depuis la forte diminution du nombre de contrats aidés. La formation des ATSEM et des encadrants périscolaires est capitale pour l’accueil en collectivité de ces enfants, mais des questions demeurent notamment sur la prise en charge des AESH sur le temps périscolaire. L’article L. 916-2 du Code de l’éducation prévoit la signature d’une convention entre l’Éducation nationale et la collectivité bénéficiaire, sans régler la question du financement.
Le Conseil d’État, dans une décision du 20 avril 2011, a estimé que la prise en charge par l’État du financement de ces accompagnants n’est pas limitée aux interventions pendant le temps scolaire. Devant de nouveaux recours introduits par l’Éducation nationale, il convient cependant d’attendre une nouvelle décision du Conseil d’État.
Référence
• Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance (JO du 28 juillet 2019, NOR : MENX1828765L).