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23/05/2022
Justice Marchés publics

Prévenir la prise illégale d'intérêts

Le délit a été redéfini par le législateur, qui a également encadré le risque pénal s'agissant des élus représentant leur collectivité ou leur groupement au sein d'organismes extérieurs.

 La loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire a redéfini le délit. La loi « 3DS » du 21 février 2022 a précisé les mesures de prévention de ce risque.

1. Une nouvelle définition du délit

La loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 (art. 15) évite dorénavant à un élu d’être condamné pour un « intérêt quelconque ». Selon la nouvelle écriture de l’article 432-12 du Code pénal, la prise illégale d’intérêt doit désormais être caractérisée par « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». Ce délit est passible de 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €. 

2. Représentation au sein d’organismes extérieurs

La loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (dite « 3DS ») précise, dans son article 217, les règles applicables aux élus locaux qui représentent leur collectivité ou leur groupement au sein d’organismes extérieurs, en application de la loi (personne morale de droit public ou privé : le CCAS par exemple). Ces élus ne sont plus considérés, du seul fait de cette désignation, en application de la loi, comme ayant un intérêt « lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur une affaire intéressant la personne morale concernée ou lorsque l’organe décisionnel de la personne morale concernée se prononce sur une affaire intéressant la collectivité territoriale ou le groupement représenté » (art. L. 1111-6 I du CGCT).

Ils peuvent participer aux débats du conseil portant sur les relations avec l’organisme extérieur où ils siègent, sans être considérés, de ce seul fait, comme étant intéressés à l’affaire ou se trouvant en situation de conflit d’intérêts ou de prise illégale d’intérêts. Le juge pénal devra donc apprécier, in concreto, l’influence que l’élu a pu avoir sur la décision.

Ces dispositions concernent aussi les élus locaux agissant comme mandataires des collectivités ou de leurs groupements au sein du conseil d’administration ou de surveillance des SEM locales et des SPL, et exerçant les fonctions de membres ou de présidents de conseil d’administration, de président-directeur général ou de membre ou de président du conseil de surveillance, lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur ses relations avec la SEM locale.

Attention : cette limitation du risque pénal ne concerne pas les élus siégeant dans des associations loi 1901 en tant que représentants de la collectivité, ou au conseil d’administration d’une entreprise privée dont la collectivité est actionnaire, par exemple.

3. Les précautions  à prendre 

Les élus représentant leur collectivité ou leur groupement au sein d’organismes extérieurs doivent impérativement se déporter afin de ne pas participer aux délibérations attribuant un contrat de la commande publique à la personne morale de droit public ou privé concernée, ou une aide (garantie d’emprunt, subvention, bonification d’intérêts…). Ils ne peuvent pas participer aux commissions d’appel d’offres ou à la commission de délégation de service public lorsque la personne morale concernée est candidate. Ils ne doivent pas non plus participer aux délibérations portant sur leur désignation ou leur rémunération au sein de l’organisme extérieur. 
 

Les élus doivent se déporter
Le CGCT interdit aux élus de prendre part aux délibérations portant sur un objet qui pourrait les intéresser « soit en leur nom personnel, soit comme mandataires » (art. L. 2131-11). Ils doivent donc impérativement se déporter dans ce cas et quitter le lieu de la délibération. La loi 3DS du 21 février 2022 (art. 218) prévoit la possibilité pour tout élu local de consulter un référent déontologue chargé de lui apporter tout conseil utile au respect des principes déontologiques énoncés dans la charte de l’élu local (article L. 1111-1-1 du CGCT). Un décret en Conseil d’État précisera les modalités et les critères de désignation des référents déontologues. 

 

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Christophe Robert
n°401 - MAI 2022