Drac. Lorsque des vestiges sont découverts en cours de chantier, ou lorsque le porteur de projet souhaite faire réaliser un diagnostic préalable au lancement des travaux, l’État est le premier interlocuteur de l’aménageur. Sous l’égide du préfet de région, les services régionaux de l’archéologie des directions régionales des affaires culturelles (Drac) prescrivent les fouilles et les diagnostics, en fixant leurs objectifs scientifiques. Ils désignent également les responsables scientifiques et contrôlent le bon déroulement des recherches.
Diagnostic. Les diagnostics, prérogative publique, sont réalisés soit par l’Institut national de recherches d’archéologie préventive (Inrap) – établissement public rattaché au ministère de la Culture –, soit par le service d’archéologie préventive d’une collectivité locale, habilité par l’État (lire ci-dessous). Ainsi, une commune, un groupement de communes, un département ou une région peut intervenir en tant qu’opérateur, en réalisant les diagnostics et/ou les fouilles, au même titre que les archéologues de l’Inrap.
Pour désigner l’opérateur de diagnostic, «un droit de priorité » s’exerce en faveur des services archéologiques territoriaux habilités. L’Inrap n’intervient qu’en dernier ressort. Dans les faits, c’est néanmoins l’Inrap qui réalise 80 % des diagnostics, soit 2 000 à 2 500 diagnostics par an. Une fois désigné, l’opérateur réalise le diagnostic, puis remet son rapport au service archéologique de la Drac, qui vérifie sa conformité. Le préfet de région a ensuite trois mois pour autoriser l’aménageur à démarrer les travaux, prescrire la réalisation de fouilles ou demander la modification du projet. Dans ce dernier cas, le préfet doit délivrer l’autorisation de fouilles ou la refuser dans le délai d’un mois.
Demande anticipée. Les maîtres d’ouvrage ont tout intérêt à faire une demande anticipée de diagnostic, pour savoir si leur projet donnera lieu à des prescriptions archéologiques. Ne pas anticiper, c’est prendre le risque d’une perte de temps et d’argent, et de devoir revoir sa programmation de travaux. Le préfet de région a deux mois pour répondre à cette demande.
Fouilles. Si le préfet prescrit la réalisation de fouilles, c’est l’aménageur qui choisit l’opérateur. Depuis 2003, cette activité économique est soumise aux règles de la commande publique. Les marchés publics de fouille d’archéologie préventive ont été considérés par la cour administrative d’appel de Marseille du 11 janvier 2021 (n° 18MA00776) comme des marchés de services et non plus comme des marchés de travaux (cet arrêt n’a pas été confirmé par le Conseil d’État).
Les aménageurs, publics comme privés, peuvent donc faire appel à des opérateurs privés pour réaliser les fouilles. Une fois l’opérateur désigné, l’aménageur doit conclure avec lui un contrat de fouilles pour définir, sur la base des prescriptions de la Drac, le projet scientifique d’intervention et les conditions de sa mise en œuvre (prix, délais…).
À Moulins (Allier, 20 060 hab.), c’est une future passe à poisson qui a révélé des vestiges exceptionnels (le pont Mansart, construit entre 1705 et 1710, emporté par les crues). Prescrite par la Drac Auvergne-Rhône-Alpes, la fouille a été réalisée par le service d’archéologie préventive du département de l’Allier (SAPDA). Des restes inestimables ont été mis au jour : échafaudages, pieux en bois, vestiges monumentaux…
« Sur le terrain, le SAPDA a mobilisé 90 % de ses effectifs pour tenir les délais très courts (six semaines) », explique Mathilde Duriez, responsable d’opération Moyen-Âge/Moderne du SAPDA. L’urgence est d’ordre écologique : la remontée des saumons dans l’Allier a lieu au printemps, période où des oiseaux migrateurs nichent aux abords du fleuve. «En tant qu’opérateur, on doit s’adapter aux contraintes du chantier, comme à l’emploi du temps de l’aménageur. » Maître d’ouvrage de l’opération, la communauté d’agglomération de Moulins devra assumer le coût des fouilles : 360 000 euros environ.
Coût. Le financement de l’archéologie préventive repose sur l’aménageur et diffère selon le type d’opération (diagnostic ou fouille). Une redevance d’archéologie préventive (RAP) est due par toute personne publique ou privée bénéficiant d’une autorisation d’urbanisme pour réaliser des travaux affectant le sous-sol.
Cette redevance abonde aussi le Fonds national pour l’archéologie préventive (FNAP), destiné au financement des projets d’aménagement d’intérêt général. Avant 2016, lorsque la collectivité disposait d’un service archéologique habilité, elle pouvait récupérer une partie de la RAP au prorata de son activité. Depuis, c’est une subvention de l’État, fixée par arrêté ministériel, qui compense les coûts de ces opérations. Lorsque la collectivité fait appel à un opérateur extérieur, elle doit assumer le coût réel des fouilles. Le FNAP peut verser des subventions si le projet peut être compromis par le coût des fouilles.
Valorisation. Concilier recherche scientifique, développement économique et aménagement des territoires est une équation complexe, mais pas insoluble. Elle peut même être un choix politique, les collectivités étant les seuls acteurs autorisés à intervenir sur toute la chaîne opératoire.
Un outil permet de renforcer la protection de leur patrimoine : les zones de présomption de prescription archéologique (ZPPA), créées en 2003. Elles permettent à la Drac d’abaisser le seuil des travaux pour lesquels des diagnostics ou des fouilles peuvent être prescrits. Les collectivités peuvent participer à la cartographie de ces zones.
L’occasion aussi de mettre en avant le résultat de fouilles comme à Narbonne (56 472 hab., Aude) où des trésors de l’époque romaine (fragments d’amphores, traces d’un mausolée…) ont été découverts lors de travaux de voirie. Des découvertes inestimables pour l’histoire de Narbonne, et une carte à jouer sur le plan de l’attractivité touristique : ces vestiges sont présentés au musée du patrimoine romain de la ville.