« La proximité crée la responsabilité qui est source d’efficacité. Il faut donc plus de liberté d’action pour les collectivités, plus de décentralisation et plus de subsidiarité », a estimé David Lisnard, le 18 novembre, dans son premier discours prononcé en tant que président de l’AMF, au lendemain de son élection, en clôture du 103e Congrès des maires. «Nous sommes au bout du rafistolage en matière de décentralisation et il faut de nouveaux transferts de responsabilités aux communes sur les politiques de proximité, a-t-il affirmé devant le chef de l’Etat. Il ne s’agit pas de défiance vis-à-vis de l’Etat mais de la conviction des élus de terrain que le besoin de libertés locales n’a jamais été autant nécessaire dans notre pays ». Outre un renforcement et «une clarification des compétences du quotidien des communes notamment dans les domaines du logement, de la culture et du sport », le maire de Cannes (06) a proposé à Emmanuel Macron d’élaborer «un pacte financier et fiscal de mandature avec l’Etat qui pourrait se traduire par une loi de programmation financière des collectivités ». Objectifs : stabiliser les concours financiers de l’Etat aux collectivités, leur donner de la visibilité sur leurs moyens et bâtir «un nouveau système fiscal local » privilégiant l’attribution d’une ressource fiscale par niveau de collectivités. «L’AMF fera des propositions en la matière », a indiqué le président de l’AMF.
Décentralisation : le «oui, mais » du chef de l’Etat
En réponse, le chef de l’Etat a tout d’abord rendu un vibrant hommage à «l’action essentielle » et «au sens du devoir » des maires dans la gestion des crises qui ont émaillé son quinquennat, en leur adressant à plusieurs reprises ses remerciements. Il a ensuite défendu le bilan de son action en soulignant notamment qu’il n’avait pas engagé de «grande réforme institutionnelle » conformément aux voeux des élus, qu’il a «préservé les moyens des collectivités » en «sanctuarisant le montant de la DGF », «soutenu l’effort d’investissement des territoires via la DSIL et la DETR », et promu «des contractualisations nouvelles » à travers les programmes «Action cœur de ville » et «Petites villes de demain ».
Evoquant l’avenir, Emmanuel Macron n’a pas fermé la porte à une nouvelle étape de la décentralisation. Mais en posant quelques conditions : «décider les règles, les normes, les financements, c’est cela la décentralisation. Si la décentralisation permet de transférer des blocs de compétences complets avec une clarté des responsabilités et des financements, alors engageons cela ! », a-t-il lancé à l’adresse des congressistes. Le chef de l’Etat a notamment estimé qu’« il faut aller vers une décentralisation plus grande dans les domaines de la transition écologique et du logement ». Il est aussi «convaincu qu’il faut faire évoluer l’organisation de notre système de santé », notamment en «construisant des solutions de santé publique à l’échelle des territoires », ce que demande l’AMF.
« Sanctuariser la stabilité des dotations de l’Etat »
Il a cependant expliqué qu’il croyait avant tout au triptyque «déconcentration [de l’Etat]-contractualisation[avec les collectivités]-pluriannualité [budgétaire] », en y ajoutant la nécessaire «simplification de l’action publique locale. (…) L’Etat doit accompagner les projets plutôt que de produire de la norme », a-t-il affirmé tout en assurant au passage les élus que le gouvernement «recrée des postes dans les services déconcentrés de l’Etat ».
Outre une nouvelle étape de la décentralisation, qui ne sera évidemment pas engagée d’ici la fin de son quinquennat, le chef de l’Etat a estimé nécessaire, comme l’AMF le demande, de «sanctuariser la stabilité des dotations de l’Etat » aux collectivités. Il s’est aussi déclaré favorable à la demande de réforme de la fiscalité locale formulée par l’AMF : «oui pour aller vers de la fiscalité fléchée » par niveau de collectivités, a-t-il affirmé.
Au-delà de ces perspectives, le chef de l’Etat s’est élevé contre «le débat mortifère qui veut opposer les élus à l’Etat. Il ne peut pas y avoir de face à face. L’Etat, c’est vous aussi car vous êtes élus et agents de l’Etat. Il ne peut pas y avoir une division de l’Etat », a-t-il insisté. Dans son discours, David Lisnard n’avait pas dit autre chose, en assurant le président de la République que l’AMF «sera un partenaire exigeant et loyal de l’Etat » mais que «cela doit être réciproque ».
Lire la Résolution générale du 103è congrès de l'AMF