Coût global. Assigner à la commande publique de tels objectifs n’est pas nouveau. Mais pour la première fois, la loi oblige les acheteurs publics à insérer un critère environnemental dans tous les marchés publics et les concessions !
Clairement, désormais, le choix de l’offre économiquement la plus avantageuse «interdit » le recours au critère unique du prix. La Direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l’Économie, qui fait autorité en matière d’explication des règles régissant la commande publique française, le clame haut et fort dans une fiche consacrée à la loi Climat : «si l’acheteur fait le choix de ne retenir qu’un seul critère de sélection, seul le critère unique du coût global intégrant nécessairement des considérations environnementales pourra désormais être retenu ».
Le coût global devra intégrer la notion de cycle de vie. Le gouvernement doit mettre à disposition des acheteurs, au plus tard le 1er janvier 2025, des outils opérationnels de définition et d’analyse du coût de cycle de vie des biens pour les principaux segments d’achats (art. 36 de la loi Climat).
Critères d’attribution. Aujourd’hui, un marché est attribué en fonction de «l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base d’un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution » (art. L2152-7 du Code pour les marchés publics, L3124-5 pour les concessions). Des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social, à l’emploi ou à la lutte contre les discriminations peuvent être introduites comme conditions d’exécution. Mais ce choix reste pour l’heure à la discrétion de l’acheteur public.
Toutefois, la loi Climat (article 35) va obliger à prendre en compte des considérations environnementales dans les critères d’attribution et dans les conditions d’exécution (art. L2112-2 du code). Ces dispositions (pour lesquelles un décret doit être publié) entreront en vigueur au plus tard le 22 août 2026. Le gouvernement a souhaité laisser le temps aux acheteurs publics de s’adapter à ces nouvelles exigences.
À noter qu’il deviendra possible, une fois la réforme en vigueur, d’exclure un soumissionnaire soumis à des obligations en matière de prévention des risques sociaux et environnementaux par le Code de commerce et qui ne les respecterait pas.
Spécifications techniques. L’autre changement apporté par la loi Climat concerne la phase amont des consultations. Actuellement, le Code de la commande publique oblige à prendre en compte les objectifs de développement durable au moment de la détermination de la nature et de l’étendue des besoins à satisfaire (article L2111-1).
L’article 35 de la loi Climat étend cette obligation aux spécifications techniques des marchés publics et des concessions qui devront, elles aussi, contenir un aspect environnemental.
La loi renforce aussi les schémas de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (SPASER), mais ceux-ci ne concernent que les collectivités dont le montant total annuel des achats est supérieur à 100 millions d’euros HT. Et à partir du 1er janvier 2030, 25 % des rénovations lourdes et des constructions relevant de la commande publique devront utiliser des matériaux biosourcés ou bas-carbone (art. 39).
Volet social. Concernant la prise en compte des considérations relatives au domaine social ou à l’emploi, la loi Climat prévoit l’insertion obligatoire d’une clause dans les conditions d’exécution des marchés publics et concessions dont le montant est supérieur aux seuils européens (montant à retrouver en annexe 2 du Code de la commande publique).
Il y aura cependant quatre dérogations possibles pour les marchés publics : besoin satisfait par une solution immédiatement disponible ; pas de lien suffisant entre l’objet du marché et la dimension sociale ; clause qui conduirait à restreindre la concurrence ou à rendre techniquement ou économiquement difficile l’exécution de la prestation ; marché de travaux d’une durée inférieure à six mois.
Pour les concessions, il n’y aura que deux dérogations : en cas d’absence de lien possible entre des conditions d’exécution sociales et l’objet du contrat de concession, ou si de telles conditions d’exécution risquent de restreindre la concurrence ou de rendre l’exécution du contrat plus difficile d’un point de vue technique ou économique. Cette réforme entrera en vigueur, comme pour le volet environnemental, au plus tard le 22 août 2026.
La collectivité peut toujours, à discrétion, prendre en compte des considérations sociales dans les critères d’attribution, dans les conditions d’exécution des marchés publics et des concessions, mais aussi passer des marchés publics réservés à des structures particulières, ou des marchés publics dont l’objet porte sur un service social ou service spécifique.
CCAG. De nouveaux cahiers des clauses administratives générales (CCAG) ont été publiés cette année (lire Maires de France n° 391 de juin 2021, p. 48). Ces documents auxquels peuvent se référer les marchés publics comportent pour la première fois des aspects environnementaux et sociaux.
Des obligations en matière de transport, d’emballage et de gestion des déchets, avec pénalités à la clé en cas de non-respect par les titulaires de marchés, y sont introduites. L’ensemble des CCAG prévoient aussi «une clause d’insertion sociale, qui pourra être activée par l’acheteur dans les documents particuliers du marché », explique la DAJ dans sa notice sur la réforme des CCAG 2021.
Si une collectivité veut pousser plus loin sa politique d’achats responsables, elle pourra bientôt réaliser un «autodiagnostic flash » sur la plateforme impact.gouv.fr. Le dispositif permettra de déterminer son niveau de maturité sur ce sujet.